Le déclenchement de mouvements de débrayage des travailleurs dans un secteur ou un autre, dans le respect des procédures réglementaires, n'aurait aucun effet surprise à l'ombre d'une chute vertigineuse du pouvoir d'achat, notamment. Pourtant, la journée nationale de protestation à laquelle appelle L'Intersyndicale de la santé (SNECHU-SNPSP-SAP), annoncée pour le 3 novembre prochain, a de quoi surprendre et suscite des interrogations. Loin des revendications « fondées et légitimes » soumises par ces trois syndicats, aucun signe ne laissait entrevoir un recours à l'action hostile, tant la tutelle ouvrait grandes ses portes au dialogue et à la concertation. Pratiquement depuis le mois de mai dernier, le ministre de la Santé, Abderrahmane Benbouzid, recevait les uns après les autres les représentants de différents syndicats du secteur. On se félicite même, de part et d'autre, de ce dialogue social à l'issue des rencontres entre le ministre et les syndicalistes. A l'issue d'une audience accordée le 11 octobre dernier à une délégation du Syndicat national des enseignants chercheurs hospitalo-universitaires (Snechu), le ministre de la Santé avait souligné à travers un communiqué «l'importance du dialogue responsable» avec les partenaires sociaux à tous les niveaux afin de renforcer et d'améliorer la prise en charge de la santé publique. Dans le même communiqué, le ministre s'est dit « disposé à écouter toutes les préoccupations et propositions des enseignants chercheurs hospitalo-universitaires en vue d'améliorer leur situation socioprofessionnelle, ainsi que celle des professionnels du secteur en général » et ce, « en application des instructions du président de la République, Abdelmadjid Tebboune ». De son côté, le président du Snechu avait « salué l'attention particulière » qu'accorde la tutelle pour ancrer la culture du dialogue sérieux avec le partenaire social. Mieux, le président du Snechu avait clairement indiqué que les échanges lors de la rencontre avec le ministre ont permis de parvenir à un «rapprochement des vues». Il y a une quinzaine de jours, donc, les deux parties étaient en parfait accord, sur toute la ligne. Et, c'est l'impression générale qui se dégage de ce dialogue entre le ministère de la Santé et les syndicats du secteur, initié au lendemain d'une autre action de protestation similaire, une grève d'une journée le 7 avril dernier, soumettant les mêmes points de revendications, notamment celui lié à la non-concrétisation sur le terrain des directives du président de la République en faveur de l'amélioration des conditions de travail ainsi que la situation socioéconomique des travailleurs. Et, depuis, le ministre de la Santé n'a pas manqué une seule fois d'exprimer son «soutien absolu aux revendications de tous les travailleurs et professionnels du secteur». Pourquoi alors recourir à la protesta si la tutelle s'associe presque au même combat engagé par les syndicalistes ? Est-ce parce que la concrétisation des revendications dépasse les prérogatives du ministère de tutelle ? Quand les syndicalistes soulignent dans le sillage de cet appel au débrayage d'une journée qu'il « il est regrettable de revenir encore une fois à la protestation comme seul moyen de communication », on peut comprendre que le dialogue avec une partie qui n'a pas les capacités ou les aptitudes à matérialiser ses engagements perd tout sens. Aussi, cette fois-ci, le rendez-vous des assises nationales sur la santé est très proche, sa tenue étant prévue avant la fin de l'année en cours, offre une opportunité aux syndicats de mieux faire entendre la grogne des professionnels du secteur aux plus hautes autorités du pays.