Arrivé dimanche à Alger en début de soirée, le Haut représentant de l'Union européenne (UE) pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité et vice-président de la Commission européenne, Josep Borrell a été reçu hier, lundi, par le président de la République. L'audience accordée à Josep Borell par Abdelmadjid Tebboune s'est déroulée en fin de matinée, au siège de la présidence de la République, à El Mouradia. A son arrivée dimanche à Alger, le responsable européen a été reçu par le Premier ministre, Aïmene Benabderrahmane au Palais du Gouvernement. «La rencontre a permis d'évoquer l'état et les perspectives des relations entre l'Algérie et l'UE, ainsi que les moyens de renforcement de la coopération bilatérale dans différents domaines», fait savoir le communiqué des services du Premier ministère. Il a précisé que «la rencontre s'est déroulée en présence du Secrétaire général du ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l'étranger, Amar Belani». Pour l'heure, rien n'a filtré à propos de la teneur des discussions, au niveau de la présidence de la République ou à celui du Premier ministère. Il est cependant connu que parmi les questions qui «tiennent à cœur» l'Union européenne, c'est bien la coopération énergétique notamment depuis le déclenchement, il y a plus d'une année, de la crise russo-ukrainienne. L'on note que plusieurs pays de l'UE avaient entrepris des démarches auprès de plusieurs pays comme certains du Golfe, notamment le Qatar, de l'Afrique comme le Mozambique ou de l'Asie comme l'Azerbaïdjan en vue de palier aux quantités de gaz que leur fournissait la Russie. Mais l'Algérie reste le fournisseur qui lui convient le plus au regard de sa proximité du continent, de sa disponibilité, de sa fiabilité et du respect de ses engagements, tout au long des longues années de coopération énergétique qui lie les deux parties. Borell s'est déjà exprimé à plusieurs reprises sur la question notamment devant des responsables et des élus européens. Il a toujours noté «l'importance et la régularité» des entretiens entre l'Algérie et l'Union européenne autour des questions énergétiques. En février 2022, c'est-à-dire dès le déclenchement de la crise entre la Russie et l'Ukraine, il avait déclaré que «les autorités algériennes ont rassuré, à plusieurs reprises, sur la poursuite de l'approvisionnement à travers le gazoduc Medgaz, et si nécessaire par la fourniture du gaz naturel liquéfié (...)». Les doléances de l'Union européenne L'ensemble des responsables européens estiment que «l'Algérie reste un partenaire clé pour l'Europe (...)» et, a précisé un de leurs diplomates, «depuis l'agression russe en Ukraine, la question de l'approvisionnement en gaz naturel est devenue une question essentielle pour les pays européens. Surtout pour ceux qui se trouvaient en situation de forte dépendance vis-à-vis de la Russie. Ainsi, l'Italie, comme l'Allemagne, ont eu à cœur d'exprimer une demande supplémentaire en gaz en provenance d'Algérie qui a fait preuve de beaucoup de bonne volonté pour livrer davantage de gaz à l'Europe, notamment par ses infrastructures vers l'Italie». Pour eux, «l'Algérie a sans doute objectivement gagné une place plus importante encore à nos yeux dans cette situation malheureuse de guerre avec la Russie». Mais nos relations restent, comme par le passé, très variées et dans tous les domaines». L'UE veut, a dit le diplomate européen, «élargir notre agenda à de nouveaux thèmes sur lesquels on estime qu'on peut faire encore mieux, notamment en matière de migration, de coopération judiciaire, régionale...». Il note que «dans l'Accord d'Association, il y a d'ailleurs un agenda très riche en matière de coopération sur lequel on n'a pas encore travaillé». Ce qui a laissé Josep Borrell noter, hier, dans une interview que «c'est plutôt de sa mise en œuvre (l'accord d'association) qu'il faudrait rediscuter, comment exploiter tout son potentiel, nous devons être plus pragmatiques et efficaces et cela dans tous les domaines. En 2015-2016, un travail important avait été engagé dans ce sens conjointement par l'UE et l'Algérie. Les recommandations issues de ces échanges restent toujours d'actualité (...)». La rupture par l'Algérie de ses relations diplomatiques avec l'Espagne leur reste aussi à travers la gorge parce que, a soutenu le diplomate, «les dégâts potentiels pour nos relations bilatérales sont là». L'Accord d'Association et les demandes de l'Algérie Le Haut représentant de l'Union européenne (UE) pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité et vice-président de la Commission européenne en a évoqué cette teneur hier dans son interview. «Je suis convaincu qu'une solution est possible et nous devons œuvrer ensemble pour la trouver rapidement, dans notre intérêt mutuel, pour surmonter les blocages existants et éliminer toute entrave à nos échanges». Les responsables européens pensent que la crise entre l'Algérie et l'Espagne et les décisions des autorités algériennes à cet effet, ont eu de lourdes conséquences sur les échanges commerciaux Algérie-UE notamment pour ce qui est stipulé dans les articles 17, 38 et 39 de l'Accord d'Association entré en vigueur en septembre 2005, «qui prévoient la libre circulation des capitaux et l'absence totale de restrictions sur les opérations d'exportation». L'APS avait rappelé, dans une présentation de l'Accord en question, qu'en décembre 2020, lors de la 12ème session du Conseil d'Association avec l'UE, l'Algérie avait discuté autour «de mesures de révision de l'Accord sur la base de l'équilibre entre les deux parties». L'Accord, faut-il le rappeler, comporte des dispositions pour la protection de la production nationale, entre autres «des mesures antidumping (article 22), des mesures compensatoires (article 23), des mesures de sauvegarde (article 24). Ce dernier stipule que «les opérateurs lésés, s'ils constatent une véritable menace, à n'importe quelle filière de la production nationale, peuvent introduire une demande collective pour protéger un quelconque produit concurrencé par un autre étranger similaire (...)». En outre, «les mesures de sauvegarde du produit national comptent également des clauses contre l'inondation du marché par les marchandises et des mesures compensatoires et d'autres exceptionnelles en faveur des industries nouvellement créées ou certains secteurs objet de restructuration», rapportait l'APS dans une dépêche présentant l'Accord d'Association. Il comporte aussi «des mesures exceptionnelles en faveur des industries naissantes, ou de certains secteurs en cours de restructuration (article 11)».