Peut-on être honnête de nos jours sans être pointé du doigt ? Délicate question. De nos jours la vie n'est pas simple, ce sont les intrus, les recalés, les incompétents et les moins que rien qui font tout pour vous pousser vers le dégoût et la dépression. Quoique l'honnêteté demeure le fruit de la bonne éducation, n'empêche qu'il est parfois impossible de s'en tenir à cela. L'honnêteté peut ne pas exister. Car l'homme est un être faible et pêcheur. Mais dans un autre contexte, celui par exemple de l'environnement professionnel, l'« honnête homme », c'est d'abord quelqu'un qui sait briller en société. Il veut plaire, séduire. Il est passé maître dans l'art d'être agréable. Ses manières sont raffinées, ses vêtements propres, mais d'une élégance qui évite de tomber dans l'excès. Il possède le talent de la conversation, il ne se met jamais en avant, mais, au contraire permet aux autres de s'exprimer, souligne au passage la justesse d'une idée, d'une expression. Il montre son ouverture d'esprit, sa capacité à s'effacer, à dominer son égoïsme. Il offre à certaines occasions, un visage détendu, souriant, ne pas infliger le spectacle de mauvaise humeur ou de son irritation. Il doit avoir le sens de l'humour, de la plaisanterie, mais d'une plaisanterie fine qui fait sourire plutôt que rire. Cette manière de se comporter en société et au travail ne s'improvise pas : elle suppose à la fois un sens aigu de l'observation et une grande capacité d'adaptation. L'homme honnête excelle à apprécier avec exactitude ses subordonnés ou ses collègues, il ne les juge pas. C'est là une condition indispensable pour pouvoir faire bonne figure dans tous les milieux et en toutes circonstances. Il proscrit l'affectation, ne cherche pas à paraître ce qu'il n'est pas, s'efforce d'être simple, refuse l'exagération, défend les positions du juste milieu. La diversité des milieux qu'il a fréquente l'oblige à dominer un vaste champ de connaissances. Il possède des lumières sur tous les sujets. Mais il ne doit surtout pas ennuyer. Il sait qu'au cours d'une conversation, il a affaire à des personnages inégalement avertis. Tout ce comportement répond à cet impératif fondamental qu'est l'honnêteté. ‘'Dans le théâtre de Molière, les personnages excessifs prêtent à rire et connaissent l'échec, tandis que les partisans de la mesure suscitent la sympathie et réussissent dans leurs projets''. Mais à mon grand regret, cet homme là, sera désormais, taxé de tous les maux, il sera épié sur ses moindres faits et gestes. On essaiera de lui coller à son insu des étiquettes dont il est complètement innocent. Demeurer honnête, c'est un suicide, c'est se mettre dans le collimateur de tous. Mieux vaux intégrer le lot pour passer inaperçu. Ce n'est pas un choix, mais une pression.