La torture continue en Tunisie depuis le renversement de Zine ben Ali mais elle ne semble pas être systématique, a déclaré samedi le rapporteur spécial des Nations unies. La Tunisie devra enquêter "énergiquement" sur la torture massive pratiquée sous le règne autoritaire de Ben Ali, renversé le 14 janvier par une révolution populaire, a ajouté Juan Mendez.L'avocat envoyé par l'Onu concluait une mission d'une semaine en Tunisie, durant laquelle il a rencontré le gouvernement intérimaire, des associations et des victimes. Il a déclaré que les nouveaux dirigeants du pays étaient d'accord avec le fait que la torture devait être éliminée et il les a pressés d'agir rapidement."Il y a encore des cas (de torture) et le gouvernement ne devrait pas être pleinement satisfait", a dit Mendez à la presse. "Je ne pense pas que l'on puisse dire que c'est généralisé ou systématique", a-t-il ajouté.Sur les centaines de Tunisiens arrêtés au début du mois en marge de manifestations dénonçant la lenteur des réformes, l'avocat argentin a souligné, sur la base des informations obtenues, que 66 avaient été sévèrement traités. Ces personnes, dont un tiers de mineurs, ont été détenues pendant 12 heures sans pouvoir parler à un avocat ou à leur famille, a dit Mendez."Elles ont été forcées de s'agenouiller et de rester dans des positions inconfortables", a-t-il dit, ajoutant qu'il y avait des preuves de passages à tabac et de brûlures de cigarettes.Mendez, lui-même torturé en Argentine durant la dictature pour avoir défendu des prisonniers politiques, a souligné qu'il n'était pas inhabituel que ces pratiques se poursuivent après la chute d'un régime autoritaire. "C'est une transition. Ce qui est important, c'est que le gouvernement dise qu'il ne le tolère plus et qu'il l'empêche."Le rapporteur de l'Onu s'est par ailleurs inquiété de l'avancée, trop lente selon lui, des poursuites contre les dirigeants de l'ancien régime."Je m'inquiète que nous n'ayons entendu parler jusqu'à présent que de poursuites contre M. Ben Ali et une poignée d'anciens ministres et conseillers", a-t-il dit, ajoutant que les enquêtes en cours visaient 60 hauts dirigeants."Nous aimerions en savoir davantage sur les motifs des poursuites, par quel tribunal, le rythme de l'enquête."Les pratiques de l'ère Ben Ali, détaillées dans le rapport, "sont parmi les plus émouvantes, les plus touchantes et les plus tristes" que l'avocat ait jamais entendues, a-t-il dit.Le gouvernement de Tunis pourra lire le rapport de Mendez avant qu'il soit transmis dans les prochaines semaines au Conseil des droits de l'homme des Nations unies.