Depuis le début de ce mois, on compte déjà quatre cas d'immolation en Algérie. Cette pratique serait "inédite comme mode d'expression, presque une exclusivité arabe, maghrébine surtout. Mais face à d'importantes pressions, nombreux sont ceux à choisir la voie de l'immolation pour manifester haut et fort leur malaise social et économique. A travers cet acte de suicide, ils s'adressent aux autorités car ils ne sont entendus nulle part, et il n'y a personne pour les écouter", explique un sociologue. Et de ce fait, ces anonymes prennent comme exemple le jeune Tunisien Mohamed Bouazizi qui a réussi, en martyr, à insuffler un vent de révolte. La liste s'allonge avec le déces de « Yachir » à Bechar La liste de ces Algériens qui ont tenté de se suicider en s'immolant par le feu s'est allongée la semaine avec le décès de Yachir Boumediene. Agé de 32 ans, Yachir, marchand de fruits et légumes, s'est donné la mort par immolation dans la région de Béchar. Issu d'une famille d'extraction modeste, le père à la retraite et la mère au foyer, Yachir Boumediene vit de petits boulots. Son passé de repris de justice ,n'étant pas de nature à l'aider à trouver un emploi fixe, il devient vendeur des fruits et légumes devant le marché Souk Bouhelal, situé au centre-ville de Bechar.Comme chaque matin, ce dimanche 19 juin, Yachir pose ses victuailles sur sa petite table dressée sur le trottoir. Seulement , la police décide, sur ordre du wali de délocaliser les marchands ambulants pour tenter de mettre fin à ce commerce informel. Selon les sources , Yachir s'est fait rabrouer par un agent de l'ordre. Celui-ci aurait renversé la marchandise de Yachir d'un coup de pied faisant valdinguer sa petite table de fortune.Agité par l'attitude du policier, le jeune homme s'éloigne du trottoir avant de revenir quelques instants plus tard avec un bidon d'essence. Yachir s'asperge les vêtements, craque une allumette et s'immole. Un officier de police qui dirigeait l'opération de délocalisation, tente de venir en aide au désespéré. Il finira lui aussi par être touché par le feu qui a déjà consumé les vêtements et la chair de Yachir. Brûlée au troisième degré sur la totalité du corps, la victime est évacuée à bord d'un taxi pour recevoir les premiers soins à l'hôpital de Méchéria (350km au nord de Béchar).Il succombera à ses profondes blessures lors de son transfert dans un hôpital spécialisé à Oran. Des passants présents sur les lieux filment, à l'aide de téléphones portables, la victime courant dans la rue, la chair en lambeaux, les vêtements consumés par le feu. Depuis janvier 2011, l'Algérie a enregistré plus d'une trentaine de cas de suicide. Cinq personnes sont mortes par immolation. Aouichia, Karim, Mohcin, Lyachi… Morts, immolés par le feu Le 12 janvier, Bordj-Menaiel, Mohamed Aouichia, 41 ans, agent de sécurité, s'asperge d'essence et allume le feu, dans l'enceinte de la sous-préfecture où il travaille. Relogé après des inondations en 2001 et le séisme de Boumerdès en 2003, il s'était inscrit sur une liste d'attribution de logements sociaux. Mhamed attendait une réponse à sa demande depuis sept ans. Le 18 janvier, Karim Bendine, 35 ans, célibataire et souffrant de troubles mentaux, s'asperge d'essence avant de craquer une allumete. La scène se passe en plein centre-ville de Dellys, dans l'est de l'Algérie. Cinq jours plus tard, il meurt des suites de ses brûlures. Le 24 janvier, Mohcin Bouterfif chômeur résident dans la commune de Boukhadra, wilaya de Tébessa, rend la mort neuf jours après s'est brûlé. Samedi 14 janvier, accompagné d'un groupe de personnes, devant le siège de la mairie pour soumettre leurs doléances au président de l'APC, Mohcin s'est fait rabrouer par le maire . Le 5 mars, Lyachi, chômeur âgé d'une trentaine d'années décède des suites de ses brûlures. La veille il s'est immolé par le feu devant le siège du commissariat de police de la ville d'Aokas, à l'est de Béjaia.