La guerre d'Algérie a fait des milliers de «chouhada sans tombes» ; M'Hamed Bouguerra, Hamou Boutlilis, Mohamed Darlili, Mohamed Aichaoui, Mohamed Larbi Tebessi, Maurice Audin, Ali Boumendjel, Lagha … Durant leur combat, les chefs politico-militaires du FLN/ALN ont mis à mal l'armada française. Même morts depuis des décennies, ces révolutionnaires posent problème à la France. Et pour cause, la dépouille du colonel M'hamed Bouguerra est toujours détenue par l'ancien colonisateur. La Fondation de la Wilaya 4 historique l'a réclamée à l'Elysée durant la mandature de M. Chirac. C'est le colonel Si Hassen, dernier commandant de cette wilaya historique, qui a initié la demande par le biais de l'ambassadeur de France. Aux dernières nouvelles, la France fait toujours la sourde oreille.Le 5 mai 1959, l'éclat de la révolution de novembre 1954 s'est quelque peu assombri. Cette révolution populaire inscrite en lettres d'or dans le manuel de l'Histoire perdait l'une de ses valeurs sûres. Le douar Ouled-Bou-Achra, dans le sud du Titteri (Médéa), est le théâtre de cette tragédie pour le pays. L'armée française avait dépêché une immense armada contre Si M'hamed Bougara. Le héros est tombé au champ d'honneur, comme il a vécu, la tête haute, disent ses compagnons d'armes. Précisément, au sujet de sa mort, nous avons recueilli deux témoignages et pas des moindres. «Deux ou trois jours avant sa mort, je l'ai rencontré alors que je commandais une katibat. Il revenait d'une inspection à la limite ouest de la Wilaya 4. Je l'ai escorté pour traverser la zone 4 et je l'ai quitté à la limite de cette zone, pas loin du djebel Louh avant que les djounouds de la zone 2 ne prennent le relais», nous confie, ce dimanche 3 mai 2009, aâmmi Slimane, le secrétaire général de l'Organisation nationale des moudjahidine, ONM, de Boumerdès. Par la suite, l'ancien chef de la katibat nous fait part de cette grande bataille qui s'est déroulée au début de mai 1959. Il y a eu une énorme mobilisation des forces armées françaises, y compris de l'aviation. D'ailleurs, des avions auraient été abattus par les forces de l'ALN. Pour sa part, le colonel Si Hassen, qui a repris le commandement de la Wilaya 4, nous a déclaré au téléphone : «Le colonel Si M'hamed a été tué lors d'une bataille avec l'armée française qui a mobilisé d'importantes forces terrestres et aériennes. Son corps a été évacué par hélicoptère. La disparition du corps du chef de la Wilaya 4 était un acte prémédité permettant à l'armée française de se livrer à des tentatives de manipulation dans le but de semer la zizanie dans les rangs de l'ALN.» Le contenu de la lettre de Si Lakhdar Teguia, reprise dans le livre intitulé Les frères contemplatifs en zone de combat/ Algérie 1954/1962, conforte la thèse du Dr Khattib avec, cependant, une importante information supplémentaire. Le colonel Bougara aurait été blessé et capturé avant d'être torturé par les services spéciaux français. Dans cette lettre est déplorée la perte de ce chef exemplaire. «La disparition du colonel Si M'hamed, au sens propre et au sens figuré, car son corps ne fut pas trouvé, fut un coup rude pour l'état-major de la Wilaya, dont il représentait l'élément d'équilibre, celui qui se conformait le plus aux principes d'équité, de sagesse… » L'auteur fait cas, par la suite, du retour des survivants sur le champ de bataille pour enterrer leurs compagnons morts durant l'accrochage. Ils ne trouvèrent pas le corps de leur chef. Ensuite, la lettre revient sur la manipulation insidieuse de la propagande de l'armée française avant de conclure : « Lorsque la tempête passera, deux mois après, les éléments d'information que possédait le conseil de wilaya composé de deux membres de grade égal – les commandants Si Salah et Si Mohamed – permettaient de mettre fin aux spéculations de l'ennemi et aux questions que se posaient les combattants de l'ALN. Un tract fut édité expliquant que Si M'hamed avait été fait prisonnier le 5 mai 1959 à Ouled-Bou-Achra alors qu'il était blessé dans un combat contre les troupes de Challe dont les grandes opérations couvraient à cette époque tout le territoire de la Wilaya 4. Si M'hamed, disait ce tract, était resté vivant mais blessé et serait mort sous la torture. Ce crime a été dénoncé.» Il est aisé de conclure que la France séquestre la dépouille du chef de la Wilaya 4 Le nom et les actes héroïques de ce chef politico-militaire et de tous les autres chefs révolutionnaires appartiennent à la mémoire du peuple algérien. La dépouille du colonel Si M'hamed Bougara, chef de la Wilaya 4, qui a sacrifié toute sa vie pour l'émergence de la nation algérienne, doit être sous bonne garde de la République. Porter atteinte à ces symboles constitue une offense au peuple algérien. La France acceptera-t-elle un tel acte contre un résistant ? Dès lors, le simple citoyen, qui est redevable pour son droit de porter une carte nationale d'identité et un passeport algériens, est en droit d'interpeller le chef de l'Etat protecteur des attributs de l'Etat et de l'application de la Constitution pour mettre fin à cette séquestration d'autant plus que le président réélu arborait, au grand dam de l'opposition, pendant la campagne pour l'élection présidentielle du 9 avril, les portraits des chefs de la Révolution afin de s'attirer la sympathie des électeurs. D'une braise naquit le volcan Le 5 mai 2009, l'Algérie commémore le cinquantième anniversaire de la mort de l'un de ses héros de la guerre de Libération. Il s'agit du colonel Si M'hamed Bougara, chef de la Wilaya 4.«A l'heure où l'on se plait à dire que la rébellion a perdu la partie, parce qu'elle est étranglée aux frontières tunisiennes et marocaines, incontestablement, le djoundi souffre dans le maquis physiquement et moralement, nous assistons à un phénomène déconcertant. Au beau milieu du territoire algérien, la Wilaya 4 fait montre d'une vitalité et d'un dynamisme extraordinaires. Elle s'est toujours singularisée par rapport aux autres Wilayas. Cela tient à la personnalité rayonnante du Colonel Si m'hamed, un véritable chef de maquis. Grâce à lui, la flamme révolutionnaire brûle dans la Wilaya 4 ; une Révolution qui se veut pure et qui s'affermit même par opposition au relâchement relatif régnant dans les autres Wilayas.» Il s'agit-là du colonel Si M'hamed Bougara, chef de la wilaya IV historique, vu par son pire ennemi le général Massu qui, dans son livre Le Torrent et la digue (1959), témoigne du caractère résolu de ce chef politico-militaire de l'ALN. A suivre