Tin Hinan, Lalla Fatma N'soumer, Hassiba Benbouali, Assia Djebbar, Annissa Lebdjed, Hassiba Boumerka… Que de noms de femmes ont marqué des ères et des époques dans une Algérie antique ou contemporaine. Des femmes adulées ou applaudies, des femmes guerroyeuses ou douces pacifistes, il y en a encore dans l'Algérie de 2012 et sont capables de faire des merveilles. La participation de la femme algérienne à la vie politique depuis la fin de la guerre de libération nationale dans une Algérie qui a sauté de 12 millions à 35 millions d'habitants de 1962 à 2012, est inversement proportionnelle au degré d'instruction de celle-ci quoiqu'elle soit présente dans tous les secteurs économiques, culturels ou sociaux. La gente féminine est marginalisée dès qu'il s'agit de passage par les urnes. Son émancipation accuse des ratés flagrants.Et c'est ainsi qu'une loi fut adoptée en novembre dernier pour fixer la participation des femmes à toute assemblée élue. Toute liste ne comportant une certaine proportion sera tout simplement rejetée. Habituellement, le gente féminine occupe 7% des sièges. Des sièges timides de contrées où la femme s'efforce à relever la tête tant bien que mal. Ainsi, à titre d'exemple, nous verrons plus de députées femmes dès la nouvelle assemblée nationale, c'est-à-dire au mois de mai 2012. Le taux sera de 20% pour les wilayas de 4 sièges, 30% pour plus de 5 sièges, 35% pour 14 sièges et plus, et enfin 40% pour plus de 32 sièges. Malgré cela, l'on a entendu : « Cette loi est une discrimination territoriale et sexuelle à l'encontre des femmes » d'Amina Gharbi Bounab et « Même dans les foyers, les hommes sont devenus de simples pères biologiques. Les femmes gèrent tout » de Saïda Bounab. La rue est en effervescence. On ne parle plus de mutation, mais de changement. Malgré le machisme des Algériens, la loi est au dessus de tous. Même en dessus des partis et de notre société conservatrice. Une femme maire ou députée dans l'Algérie profonde est une utopie. Quoique sa représentation paraitra en force pour certains, elle ne l'est point, du moment que la gente féminine en Algérie représente 52% contre 48% d'hommes. La société rurale n'est certainement pas prête et affirmer le contraire serait méconnaître l'Algérie. Dans les villes, on s'attèle à faire de son mieux. Les cadres supérieurs de la nation, aux fourneaux le soir venu, qui n'ont jamais franchi les portes d'une kasma FLN ou une mouhafada RND et qui ne connaissent que de noms le PRA et encore moins le FNA ou le MDS, se poussent pour être têtes de listes. Les nouveaux partis, moins aguerris en politique ne trouveront certainement pas preneur dans les wilayas des hauts Plateaux et du sud. L'élargissement vers la base pour une grande représentation au sein de la société n'est plus d'actualité. Ceux qui voulaient ratisser large se voient acculés à choisir la crème des crèmes afin de faire moins de mécontentes et d'attirer d'autres pour l'avenir. Place aux plus diplômées. Et c'est ainsi que les militantes qui faisaient la joie de l'UNJA-FLN et les salles archicombles du HMS se voient écartées par de nouvelles têtes. LES FEMMES DEBOUSSOLEES Selon certaines indiscrétions, le RND avance à petits pas. Il est dit dans ce parti que l'ancienneté et le niveau d'instruction sont des critères qu'il est impossible d'ignorer. Mais il est dit aussi que « les contacts avec la société civile et la capacité à mobiliser les électeurs » du candidat seront pris en compte. Et ces deux derniers critères se verraient bien subjectifs. Au RND, on affirme que « chez les femmes, on ressent un grand engouement et une grande organisation pour cette première expérience ». Au MSP, le parti de feu Mahfoud Nahnah, l'heure n'était pas à « la députée » même s'il a décroché deux sièges en 2002. Deux sièges qui, plus tard, serviront le Front pour le Changement d'Abdelmadjid Menasra. Une dissidence imputable au déchirement du MSP qui ne compte pas une seule femme dans l'hémicycle de Ziari. La tâche sera rude et la discipline des militants qui veulent aller plus loin que l'alliance présidentielle donnera des ailes pour franchir tous les obstacles. L'on se rappelle feu Nahnah et son « pour une place honorable de la femme au sein, d'abord des institutions du parti, mais aussi des assemblées élues », sans compter sur l'éclatement de son parti après sa disparition. Toujours est-il que la femme est bien présente au sein de la base. Il n'y a qu'à voir les meetings et les listes électorales où elles figuraient bel bien, en bon nombre, mais en queue. Les femmes RCD et FFS auront leur mot à dire, mais certainement pas à travers les 48 wilayas du pays contrairement à d'autres petits et moyens partis tels le PT de Louisa Hanoune, le FNA de Moussa Touati et les émergents qui n'ont pas encore tenu leur congrès pour une légalité et une reconnaissance. QU'EN EST-IL DANS L'ALGERIE PROFONDE ? Le porte-parole du PLJ - Parti de la liberté et de la justice- de Mohamed Saïd ne va pas de main morte : « Il nous sera difficile de respecter le quota dans certaines wilayas, à moins de recourir au remplissage de façon artificielle, en recrutant les femmes au hasard ». Rien que ça. Qui de sa kheïma tolérait la mère de ses enfants aille voter ? Il a fallu des caravanes mobiles pour les atteindre et leur « ôter » leurs voix. Aujourd'hui, il serait utile de rappeler qu'en matière de « nif » rien n'a changé. Enfin presque et encore si nif, il y a. Même le médecin n'a pas droit de cité dans certaines contrées. Rien qu'à quelques encablures de Mostaganem, dans les environs de Nekmaria l'on exige un médecin femme faisant fi de la gratuité des soins de la part d'un homme. Les machos payent cash chez les femmes en blanc plutôt qu'un traumatisme social de « déshonoré ». La loi est votée, reste à l'appliquer sur le terrain. Si la femme devrait venir renforcer nos élus, avec un pourcentage conséquent, n'y va-t-il as de la précipitation d'une loi si délicate et où la qualité prime sur la quantité ? Il aurait été judicieux, selon certains connaisseurs, d'aller doucement sur un terrain qui reste à déblayer afin de répondre d'une manière ardue à une longue attente. Quoiqu'il en soit, pour l'instant, Salima Souakri, la judokate, s'entraine pour décrocher sa prochaine médaille, Annissa Lebdjed, la peacemaker de l'ONU arpente les jungles équatoriales du Congo, Khalida Toumi prépare quelque colloque… La femme algérienne s'affirme, gagne du terrain et advienne que pourra.