VI Comment dynamiser l'intégration maghrébine ? Malheureusement, les échanges commerciaux inter maghrébins ne dépassent pas 2/3%( soit entre 7 et 8 milliards de dollars, une goutte dans un océan) à les comparer aux 21 % de l'Asean, aux 19 % du Mercosur et aux 10,7 % de la Cedeao dont le PIB est plus élevé sans compter la majorité des échanges des pays européens, se fait au sein de cet espace. Selon le rapport de la CNUCED (Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement) publié le 26 juillet 2011 sur l'investissement dans le monde, en termes de flux d'investissements directs étrangers (IDE) l'Algérie a drainé 2, 594 milliards de dollars en 2008, 2, 761 milliards de dollars en 2009 et 2, 291 milliards de dollars en 2010 mais essentiellement concentré dans les hydrocarbures. Le Maroc a drainé respectivement durant les mêmes années respectivement que 2, 487 milliards de dollars, 1, 952 milliard de dollars et 1, 304 milliard de dollars. Pour la Tunisie, ils sont de l'ordre de 2, 758 en 2008, 1, 688 en 2009 et 1, 513 en 2010 et la Libye 4,111 milliards de dollars, 2,674 milliards de dollars et 3,833 en 2010 principalement par la relance de son secteur hydrocarbures. Ainsi le total des IDE pour ces quatre pays du Maghreb totalisent 8, 941 milliards de dollars soit 0,6% des IDE estimés à 1500 milliards de dollars devant aller à plus de 2000 horizon 2013.. Fait marquant de l'année 2010, les pays en voie de développement reçoivent, pour la première fois, près de la moitié des flux d'IDE dans le monde. Ils sont également à l'origine d'un nombre record d'investissements, notamment en direction des pays du Sud. Les multinationales s'investissent de plus en plus dans les économies en développement, ou en transition, en recourant plus largement à de nouveaux modes d'implication, désignés par la CNUCED comme les modes de « production internationale et de développement sans participation au capital ». En 2010, les pays MED-11 (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Egypte, Jordanie, Autorité palestinienne, Israël, Liban, Syrie et Turquie), ont attiré 37,7 milliards de dollars (28,5 milliards €) de flux d'IDE, un montant quasiment identique à celui enregistré pour cette région en 2009. C'est que les grosses firmes ayant besoin des économies d‘échelle évitant les micros Etats. Pourtant, la consolidation des échanges entre les 5 pays du Maghreb avec pour objectif créer un marché de 90 millions de consommateurs les aideraient à faire face à leurs principaux défis. Ceux-ci consistent à améliorer les perspectives de croissance et à réduire le chômage. Dans son dernier rapport sur la région du Maghreb, le Fonds Monétaire International (FMI) note qu'une coopération régionale accrue et une libéralisation du commerce permettraient aux pays maghrébins de tirer le maximum de profits de leur intégration avec l'Europe et le reste du monde. De plus, le développement du commerce régional au Maghreb aiderait à créer un marché régional et par là attirer de nouveaux investissements. Force est de constater, que l'organisation régionale n'a jamais eu qu'une existence virtuelle. Fondée le 17 février 1989 à Marrakech, l'Union du Maghreb arabe (UMA) ne cesse, depuis, de faire du surplace. Les responsables des cinq pays membres (Algérie, Libye, Maroc, Mauritanie, Tunisie) continuent certes de se rencontrer périodiquement et de développer une coopération bilatérale dans plusieurs domaines, mais force est de constater qu'il n'y pas d'amélioration sur le plan économique. Or je peux dissocier l'Algérie et le Maroc du Maghreb, pont entre l'Europe, le Moyen Orient et l'Afrique. La coopération euromaghrébine par une prospérité partagée en matière d'investissement grâce à un partenariat gagnant/gagnant, évitant cette vision mercantile du passé, doit être orientée à l'avenir vers l'Afrique enjeu du XXIème siècle et ce afin d'éviter que des milliers de maghrébins et d'africains émigrent vers l'Europe. Il s‘agira de relancer le projet de la banque d'investissement maghrébine avalisé en 2010 par l'UMA, d'unifier les tarifs douaniers, de prévoir la création d'une grande université euro maghrébine, d'une banque centrale et bourse magrébine support d'une monnaie maghrébine, devant au préalable résoudre le problème de la distorsion des taux de change, ces structures devant s'insérer horizon 2020 dans le cadre d'une banque centrale et bourse euro-méditerranéenne. Il faut le reconnaitre, la signature de conventions commerciales ou d'accords de libre-échange avec l'Europe par la Tunisie, le Maroc et l'Algérie n'a pas suffi à impulser un véritable co développement entre les deux rives de la Méditerranée. Donc est posé le bilan mitigé des accords de Barcelone et de l'UPM (union pour la Méditerranée) qu'il ya impérativement de dynamiser à travers des projets concrets..Six mesures concrètes faciles réalisables à court terme peuvent être mise en œuvre pour dynamiser les échanges. Rendre immédiatement opérationnel la banque d'investissement maghrébine ; les nombreux accords de libre-échange complique le système commercial et rend sa gestion par les agents de douane difficile. Dans ce cadre, une harmonisation régissant les échanges commerciaux s'impose ; les règles restrictives qui imposent notamment une autorisation préalable pour de nombreux produits doivent être supprimées au même titre que les normes techniques locales utilisées à des fins protectionnistes ; le niveau élevé des tarifs douaniers et la complexité des structures tarifaire (moyenne des tarifs est de 19,2 % en Algérie, 26,2 % au Maroc et 31,7 % en Tunisie) implique la poursuite de la réforme tarifaire en réduisant la dispersion et la moyenne des tarifs. Donc améliorer les procédures douanières qui manquent de «transparence et de prévisibilité» et sur l'automatisation des déclarations douanières pour un meilleur traitement des documents ; lever les lacunes du système de paiement (dont la disparité des systèmes de fixation de la cotation des monnaies) et des chaînes logistiques par l'assouplissement de la réglementation des changes et la mise au point des services conjoints d'assurances des exportations ; et enfin promouvoir des investissements dans les transports et les autres chaînes logistiques et services subsidiaires, l'organisation des ports constituant le principal obstacle au commerce maritime dans la région. La preuve en est que les containeurs restent bloqués dans les ports durant 20 jours en moyenne en Algérie, 18 jours en Tunisie et 11 jours au Maroc. Des comités techniques devraient être mis en place pour élaborer des mesures concrètes permettant de progresser dans les six domaines examinés. Pourtant, je suis optimiste quant à l'avenir de notre région. Comme je lai démontré dans plusieurs récentes contributions parues au niveau international, j'ai grand espoir après le printemps arabe notamment en Tunisie et Libye que l'avancée de la démocratisation qui ne se fait pas par une baguette magique, demandant du temps comme cela a été le cas en Occident, certains pays d'Asie et d'Amérique latine, fonction des rapports de force tant au niveau internes(conservateurs/réformateurs) qu' international, tenant compte des anthropologies, sera un facteur catalyseur de l'intégration du Maghreb. L'intégration du Maghreb par une prospérité partagée pont entre le Moyen et l'Afrique noire permettra de réaliser une zone de prospérité et de stabiliser le Sahel par la lutte contre le terrorisme qui ne peut se faire uniquement par des moyens militaires. L'objectif stratégique est d'œuvrer durant les dix prochaines années pour que les échanges inter maghrébines atteignent au minimum un volume de 30% en 2020. La diaspora contrairement aux discours n'est pas mise à contribution alors que selon le FMI, globalement, l'épargne de la diaspora nord-africaine, sans compter le savoir faire accumulé difficilement quantifiable, est de l'ordre de 200 milliards de dollars. Mais cette épargne ne profite pas au Maghreb, dont les pays devraient prendre exemple sur la Chine, l'Inde et l'Afrique du Sud, donc à faire appel à cette diaspora pour contribuer à construire l'économie de leurs pays. Il existe quelques exceptions à la différence des Algériens qui alimentent le marché parallèles du fit du dérapage du dinar algérien. A titre d'exemple, les Marocains installés à l'étranger envoient chaque année dans leur pays d'origine un montant en devises deux fois plus important que celui des investissements directs étrangers ; ils possèdent 6 milliards d'euros en dépôt sur des comptes bancaires marocains. Il s'agit d'impliquer concrètement la diaspora maghrébine afin qu'elle soit les ambassadeurs de la modernisation de leurs pays d'origine VII Quelle est la destination des flux d'échange des pays du Maghreb ? Les échanges intermaghrébins sont orientées essentiellement vers l'Occident et notamment l'Europe pour des raisons historiques. Si l'on s'en tient aux échanges, les échanges commerciaux (exportations plus importations) avec l'Europe représentent aux alentours des deux tiers du total pour le Maroc (63%), l'Algérie (64%) et la Tunisie (72%). Plus précisément, selon un rapport de l'OCDE moyenne 2009, l'Union Européenne représente 75% des exportations de la Tunisie, 90% des rapatriements des émigrés, 83% des revenus touristiques et 73% des investissements directs étrangers. Au Maroc où 60% des exportations sont vendues sur les marchés de l'UE. De même, 80% des revenus du tourisme et 90% des rapatriements des émigrés proviennent de l'UE. Pour l'Algérie une grande partie de ses importations provient de l'Europe, 55/60% et également pour ses exportations de gaz à travers Medgaz (via Espagne) et Transmed via Italie, le projet Galsi via a Sardaigne qui devait également approvisionner la Corse, étant toujours en gestation. L'analyse détaillée de ces relations commerciales laisse apparaître certaines différences quant à l'importance relative des différents partenaires européens, mais les trois principaux restent cependant l'Espagne, la France et l'Italie. Ce panorama général assez homogène cache des réalités bien différentes selon les pays étudiés. Par l'analyse de la composition du commerce extérieur de chaque pays, le Maroc apparaît principalement comme un exportateur de produits manufacturés, le textile/cuir, les produits de l'industrie électrique et mécanique ainsi que de produits agricoles. Les minéraux et la chimie représentent également une part significative, bien que mineure, des exportations, notamment grâce à l'industrie des phosphates, principale richesse minière du pays. Le cas de la Tunisie est similaire à celui du Maroc, bien que la spécialisation dans la production manufacturière soit encore plus marquée. La situation est radicalement différente pour l'Algérie dont les exportations dépendent quasi exclusivement du secteur des hydrocarbures. En ce qui concerne les importations de produits de l'UE se détache très nettement, pour tous les pays, la part du matériel électrique et mécanique, principalement des biens d'équipement (équipement de transport, centrales électriques).Ainsi pour le cas du Maroc et de la Tunisie, nous avons des biens industriels intermédiaires, lesquels sont ensuite transformés sur place pour être réexportés. Dans le cas de l'Algérie en plus des équipements, nous avons en particulier les produits de la métallurgie, principalement de l'acier, les produits agro-alimentaires, la chimie, des produits pharmaceutiques et des plastiques. Au cours des dernières années, les pays du Maghreb ont perdu des parts de marché face à leurs concurrents, ce qui est la marque d'un manque de compétitivité, en particulier face à des pays de l'Asie, comme la Chine, censés être pénalisés par leur éloignement géographique.