? Le commerce entre les Etats de l'Afrique du Nord équivaut à 1,3% de leurs échanges extérieurs, ce qui représente le taux régional le plus bas du monde. Cela traduit la défaillance de l'Union du Maghreb arabe (UMA) qui avait comme principaux objectifs la création d'une zone de libre-échange, la création d'une union douanière et la réalisation d'un marché commun maghrébin. L'échec de l'UMA a pesé lourdement sur les économies de chaque pays du Maghreb. Selon des analystes, le coût de la non-intégration économique du Maghreb s'élève annuellement à 10 milliards de dollars, soit une perte à chaque Etat maghrébin évaluée chaque année à 2% du produit intérieur brut. Les causes de ce manque à gagner pour les économies nationales maghrébines ont alimenté le débat tenu hier par le Cercle d'action autour de l'entreprise (Care) sous le thème «Le coût du non-Maghreb». De l'avis de Francis Ghilès, chercheur au Centre d'études internationales de Barcelone (Cidob), «le conflit du Sahara Occidental représente toujours l'un des obstacles majeurs à une coopération indispensable entre le Maroc et l'Algérie, freinant les échanges commerciaux régionaux». Le conflit politique entre l'Algérie et le Maroc, explique t-il, constitue un frein au développement économique de cette région et ne favorise guère ses intérêts dans un environnement international marqué par un ensemble de défis nécessitant l'intégration et réfutant la division. Aussi, les expériences étrangères en matière d'intégration régionale, a-t-il argué, ont montré que certaines intégrations ont largement dépassé les aspects économiques pour atteindre des objectifs politiques à travers une fédération des Etats membres de l'organisation régionale concernée. Le modèle de l'Union européenne demeure à cet égard exemplaire pour les Etats membres de l'UMA. Par contre, M. Rahabi, représentant de l'ambassade de Tunisie en Algérie, a affirmé que le coût du non-Maghreb ne doit pas être supporté que par l'Algérie, car aucun de ces cinq pays ne trouve un intérêt particulier à construire ce grand Maghreb. Autrement dit, la volonté chez ces pays n'existe pas. M. Rahabi a rappelé que sur le plan de la participation des Etats du Maghreb au processus de partenariat dans la région euro-méditerranéenne, ces Etats se sont présentés individuellement aux pourparlers internationaux, ce qui a diminué largement leur marge de négociations limitant ainsi la possibilité de mieux défendre leurs intérêts communs. Aussi, les Etats maghrébins ont signé des accords bilatéraux de partenariat avec l'Union européenne sans prendre en considération les intérêts économiques de la région maghrébine dans son ensemble. Toutefois, là où le bât blesse dans cette démarche, regrette M. Rahabi, c'est que le Maroc et la Tunisie ont adhéré à l'UE au moment où l'Algérie était beaucoup plus préoccupée par sa lutte antiterroriste. «Après 20 ans, nous assistons, aujourd'hui, au retour de la demande de réédification du projet du Grand-Maghreb. Pour réaliser ce rêve longuement attendu, il est extrêmement important de faire appel à la diaspora maghrébine, sachant que 200 milliards de dollars d'épargne privée nord-africaine sont dans des banques basées à l'étranger. Ainsi, l'investissement peut constituer une valeur ajoutée au développement de cette région. Sur ce chapitre, M. Rahabi pense que si seulement 5% de cette épargne déposée à l'étranger est investie au Maghreb, cela serait bénéfique à l'économie maghrébine. Pour démontrer que la diaspora est la clé de réussite de l'intégration économique maghrébine, M. Francis a précisé que «un million de salariés européens sont payés par des patrons maghrébins».