En Algérie, l'histoire officielle de la guerre d'indépendance contre la France (1954-1962) ne connaît qu'« un seul héros : le peuple ». Ce qui permet de gommer les individualités pour être à l'abri de toute rivalité possible, d'où la polémique qui ne sert qu'à nous détourner de certains hommes dont les actions sont à inscrire dans le livre d'Or. Toute biographie est nécessaire pour nous empêcher d'oublier tous ces hommes et femmes qui se sont sacrifiés pour que l'algérien puisse enfin vivre libre, aussi le fait d'évoquer Ali Boumendjel parmi ses martyrs c'est mettre en relief le parcours, d'un homme sage d'où la richesse d'une biographie et d'un engagement politique, voire celui d'un idéal à la fois algérien et républicain, partagé par nombre de nationalistes, qui l'ont connu et côtoyés. Ali Boumendjel, était le fils d'un instituteur kabyle qui parvint à devenir avocat à la cour d'Alger. Homme de bon sens, intelligent il a incarné une petite minorité de musulmans de l'époque. Membre du parti de Ferhat Abbas, il a défendu l'idée que « la nation algérienne ne se réduisait pas à la définition d'une identité arabo-musulmane », et avait proposé à la population « européenne » d'adhérer à une citoyenneté algérienne ouverte et consensuelle et c'est ce que fera le Front national de libération (FLN), dés 1956-1957, s'appropriant cette vision dans un premier tyemps. Un avocat engagé, un humaniste et membre du collectif de défense des militants du FLN L'homme était un militant de l'Union Démocratique du Manifeste Algérien (UDMA), l'organisation de Ferhat Abbas. Son parti était perçu comme modéré, bourgeois, francophone et intellectuel et l'on sait que cet homme ne figure que brièvement dans l'histoire officielle algérienne et a été largement ignoré par les historiens algériens du fait de la partialité qui a toujours subsisté. Cependant si l'on se refaire à certains écrits et témoignages rapporté Ali Boumendjel, a été l'un des conseillers politiques d'Abane Ramdane. L'on rapporte que c'était un avocat engagé, un humaniste et un pacifiste et ce bien avant le déclenchement de la lutte armée. Cependant son amour pour la patrie après constat de ce qui se passait en Algérie, du fait que c'était un homme de droit. Ecœuré l'homme était scandalisé par les pratiques coloniales, à l'encontre de ses concitoyens et ne pouvait accepter, en voyant que la torture y était déjà largement pratiquée, et cela le scandalisait. Homme sans complexe il conjuguait, la culture française avec le nationalisme algérien, républicain et démocratique. L'itinéraire personnel et militant d'Ali Boumendjel, jeune avocat, membre d'un collectif de défense des militants du FLN et militant du Mouvement mondial de la paix, reste une énigme, du fait que personne ne s'est penché sur l'itinéraire de cet homme qui a été torturé et assassiné par l'administration coloniale alors qu'il se luttait avec le droit et non avec les armes. Au moment de son arrestation, Ali Boumendjel faisait le lien entre la direction de l'UDMA et la direction algéroise du FLN. Il conjuguait alors, comme il l'avait toujours fait sans complexe. Sa mort avait secoué les intellectuels français et de tout bord et la vérité sur la mort de ce jeune avocat pacifiste, sauvagement torturé et assassiné par les paras de Massu en mars 1957, n'a jamais été reconnue par les autorités françaises. Sauvagement torturé sur ordre d'Aussaresses La mort de Ali Boumendjel a été révélatrice en un sens des méthodes utilisées par l'armée française durant la guerre d'Algérie : tortures de masse, assassinat, exécution et liquidation systématique de toute personne qui n'adhérait pas à la politique coloniale. Ali Boumendjel est d'abord sauvagement torturé avant d'être assassiné quarante-cinq jours plus tard, le 25 mars, sur ordre du commandant Aussaresses (qui lui-même l'a reconnu dans ses mémoires en 2001). Ali Boumendjel a été jeté du sixième étage d'un immeuble abritant un centre de torture, situé à El Biar sur les hauteurs d'Alger, là où justement, étaient détenus et torturés le journaliste Henri Alleg et le mathématicien Maurice Audin, lui-même porté disparu depuis lors. La mort d'Ali Boumendjel maquillée en suicide par les autorités militaires françaises La mort du jeune avocat, avait été maquillée en suicide, et dans la presse de l'époque, il avait été présenté comme un responsable de la région sud d'Alger du FLN et commanditaire de plusieurs actes terroristes, une histoire inventée de toute pièce par les autorités coloniales qui venaient de commettre un acte des plus barbares. Les journaux, avaient rapporté, et en gros titre que Boumendjel s'était suicidé. L'assassinat du jeune avocat était programmé car quelques jours auparavant, on avait prétendu qu'Ali avait fait une tentative de suicide, c'était pour préparer l'opinion public à la nouvelle. Selon les autorités coloniales, il aurait essayé de se couper les veines avec les verres de ses lunettes. Sous la torture Boumendjel signera des aveux extorqués sous la torture rapportent-on, mais cela a permis de sauver plusieurs militants et responsables du FLN, à l'instar de l'avocat Maitre Amar Bentoumi (qui fut garde des Sceaux dans le premier gouvernement de la République algérienne), ert qui ont admis qu'ils lui doivent la vie. Après son assassinat, le corps de Boumendjel sera chargé dans une fourgonnette a rapporté sa femme, avant de prendre la direction du cimetière, sous une escorte policière et selon elle tout avait été expédié en un quart d'heure, sans aucune cérémonie il n'avait que trente-huit ans lorsqu'il avait été assassiné. Son assassinat fut l'œuvre d'Aussaresses comme celui de Larbi Ben M'hidi. Ali Boumendjel ne s'est pas suicidé, comme l'on prétendu les autorités coloniales, mais bel est bien assassiné par Aussaresses et sous le commandement du général Massu, après avoir été torturé pendant des semaines. Il est indispensable de revenir à cet homme qui a milité tous comme de nombreux militants pour que vive l'Algérie indépendante, et connaître la vérité sur son parcours est indispensable pour les générations et pour l'Histoire.