Aujourd'hui, le 12 octobre, François Hollande arrive à Dakar pour sa première visite en Afrique depuis son élection. Il est reçu par MackySall, le président du Sénégal. Au menu, bien sûr, le Mali. Chacun sa guerre. Nicolas Sarkozy a eu la Libye, François Hollande aura le Nord-Mali. Le président a fait de ce dossier ultrasensible sa priorité internationale. Au Conseil des ministres, la question est immanquablement évoquée. Le chef de l'Etat multiplie les déplacements à l'étranger et, à chaque fois, aborde le sujet. Depuis le coup d'Etat du 22 mars, cette partie du Sahel où 6 Français sont toujours otages est tenue par divers groupes armés, liés pour la plupart à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Pour préparer les Français à une intervention, le ministère de la Défense a diligenté des études d'opinion. Faites avant et après l'été, elles montrent que ceux-ci sont massivement opposés à une intervention dans la région et que ni la charia ni même les otages ne justifient, à leurs yeux, d'y aller. Encore plus délicat pour l'exécutif : moins de 15 % des Français considèrent comme réelle la menace terroriste de ces groupes. Dès septembre a donc été lancée une opération de sensibilisation de l'opinion publique. Ecoutez le président de la République, le patron du Quai d'Orsay, Laurent Fabius, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian. Tous martèlent la même chose : le Sahel, sanctuaire terroriste, menace notre sécurité et celle de l'Europe. Et pour éviter toute contestation, les membres de l'opposition sont choyés. « François Hollande a demandé à Jean-Marc Ayrault et Manuel Valls de tenir informés les présidents des groupes parlementaires sur toutes les affaires d'otages et de terrorisme », assure Bruno Le Roux, le patron des députés socialistes.
discrètement, la france prepare la guerre Dans les coulisses, on continue de s'activer. Laurent Fabius et Jean-Yves Le Drian ont multiplié les déplacements pour « responsabiliser les Africains et obtenir le soutien des Européens », dit-on au ministère de la Défense. A Bamako, dans les couloirs de l'Onu, de l'Union européenne, de la Cedeao, de l'Union africaine... des représentants français tentent d'obtenir du soutien pour monter l'intervention. Des documents confidentiels émanant des services de renseignements hexagonaux sur la menace terroriste en Europe, sur les attaques déjouées depuis plusieurs années en France et en Afrique et sur la filière de formation des djihadistes en train de se constituer au Nord-Mali ont été fournis à divers pays, notamment à l'Allemagne, au départ peu favorable à l'intervention. L'Algérie, pays clé mais réticent, a eu un traitement de faveur : outre la reconnaissance des massacres du 17 octobre 1961, plusieurs ministres s'y sont rendus et François Hollande y sera début décembre. D'ici au 26 novembre, la Cedeao devra pouvoir présenter à l'Onu une nouvelle résolution, toujours sous le chapitre VII, celui du maintien de la paix, ouvrant la voie à une intervention au Mali. Et là encore, c'est la France qui officie. Une coopération militaire vient d'être signée avec le Mali, qui a opportunément réintégré l'Union africaine ! Sur le papier, tout est en ordre. La Côte d'Ivoire, le Niger, le Burkina Faso, le Sénégal, et même le Togo pourraient soutenir l'opération. Mais seuls l'Algérie et le Tchad ont une armée en ordre de marche. Or ni l'une ni l'autre ne devraient mettre des hommes au sol. « Et nous avons vite compris que celle du Mali était moribonde », confie un militaire. Discrètement, l'état-major des armées françaises coconstruit le concept d'opération avec les pays africains. Des officiers spécialistes du commandement et de la planification sont à Bamako, mais aussi au siège de la Cedeao. « On leur explique comment se monte une opération », détaille un colonel. Selon ce qu'ils choisiront, plusieurs plans ont été élaborés : « Le Centre de planification et de conduite des opérations [CPCO] a préparé un plan A, B, C, D, E, ajoute-t-il. Les différents scénarios d'intervention ont été soumis au plus haut niveau de l'Etat. Quand François Hollande se déplace, il a une idée de ce que la France pourrait faire en fonction de ses moyens et du calendrier. Alors que le retrait anticipé des troupes combattantes d'Afghanistan s'achèvera, un autre front va s'ouvrir pour François Hollande.