Vendredi dernier, le ministre tunisien de l'Intérieur, Ali Larayedh, annonçait l'arrestation de 16 membres de deux groupes armés, opérant sur Jendouba et Kasserine alors que 18 autres font toujours l'objet de recherches. Larayedh précisait que «les commandos armés de Fériana voulaient créer une branche d'Al Qaïda en Tunisie». Lors de sa conférence de presse où des journalistes n'étaient pas les bienvenus, le ministre a précisé que «les groupes armés, munis de cartes militaires et de tenues militaires, visaient des édifices publics et sécuritaires et qu'ils s'apprêtaient à gagner l'Algérie, alors que le groupe de Kasserine se préparait à commettre des opérations en Tunisie, ajoutant que la préparation de ces opérations avait commencé depuis des mois». Il a, en outre, confirmé qu'il y a un lien entre les groupes de Kasserine et de Jendouba et également avec les accrochages de Rouhia et Bir Ali Ben Khalifa.
- Qui sème le vent récolte la tempête ! L'information avait choqué toute une Tunisie à qui son ministère de l'Intérieur répétait sans arrêt que l'ordre, la paix et la tranquillité sont revenus et n'arrêtait pas de publier les chiffres des faits d'armes de toutes les forces de l'ordre. Une Tunisie, dont le ministre du Tourisme croyait tellement avoir maîtrisé la situation qu'il accepte de partager son temps avec le ministère hautement technique des Finances. Une Tunisie qui attend la saison touristique 2013 comme on attend le Messie, pour renflouer ses caisses et empêcher que ce qui reste d'hôtels après les crises successives, n'atterrisse dans l'escarcelle de la banque de rachat des 3 milliards de crédit du secteur hôtelier. L'information était pourtant attendue, tant tout ce que répétait Ali Larayedh était faux, presqu'un mensonge éhonté. On se rappelle que la presse tunisienne s'était fait, il y a quelques mois, l'écho de l'existence de bases terroristes en Tunisie et de la prolifération des armes dans ce pays des mille et unes nuits touristiques. Comme à son accoutumée et tout comme les ministères de l'Intérieur de Ben Ali, celui d'Ali Larayedh dément de manière catégorique, jusqu'à ce que tout le pays se réveille sur ces images qu'il croyait disparues avec la Révolution et avec la venue au pouvoir de ceux qui croyaient en Dieu, ceux qui se présentaient aux électeurs, en octobre 2011, au nom des valeurs d'un islam tolérant et ceux qui disaient qu'ils craignaient trop Le Seigneur pour faire du mal ou pour accepter qu'on fasse du mal à ouailles tunisiennes. Et pourtant !
- Tourisme ou terrorisme, le non paradigme de la Tunisie d'Ennahdha. Ce sont bien ces Grands Pieux et ces représentants, aux yeux des Américains et des Européens, qui avaient pourtant libéré les terroristes de Soliman, arrêtés et jugés pendant le règne de Ben Ali. Ce sont ces mêmes dirigeants qui montreront un laxisme sans bornes avec les terroristes tunisiens de Bir Ali Ben Khlifa. Et ce sont bien ces mêmes individus qu'on retrouvera dans les évènements de Rouhia, sans que cela ne dérange outre mesure le ministre de l'Intérieur, celui de la Défense et encore moins les fameuses ligues de protection de la Révolution. En février 2012 déjà, le ministre tunisien de l'Intérieur connaissait l'existence de sérieuses menaces de groupes terroristes liés à l'AQMI, sur le sol tunisien. Ce 14 février 2012, en effet, le ministre Larayedh annonçait que «douze Tunisiens en relation avec des groupes proches d'Al-Qaïda en Libye ont été arrêtés après les accrochages meurtriers survenus dans la région de Sfax (sud-est tunisien), les 1er et 2 février. L'enquête a montré qu'ils ont partie liée avec des groupes proches d'Al-Qaïda en Libye et peut-être avec des membres d'Al-Qaïda en Algérie mais on n'a pu confirmer ce dernier point, a-t-il ajouté, soulignant que les armes saisies, lors des accrochages, provenaient de Libye. Les armes devaient être stockées en Tunisie en cas de besoin». Il précisait même, comme un aveu, que «certains des hommes arrêtés avaient bénéficié de l'amnistie générale au lendemain de la révolution en janvier 2011. Des liens avec le groupe de Soliman suspecté d'appartenance à Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et jugé en 2007 avaient été évoqués». Il avait pourtant nié l'existence de bases de l'AQMI en Tunisie. Cette même Tunisie s'était même permis le luxe de prendre une position de refus du plan franco-américain, d'attaque de l'AQMI, à partir du désert libyen, pas loin de celui de la Tunisie. Le gouvernement nahdhaoui de la troïka avait semé le vent, en libérant ceux de Soliman, en étant laxistes avec ceux de Bir Ali Ben Khlifa, en se cherchant des excuses pour ne pas sévir durement contre ceux de Rouhia. Semant le vent, le gouvernement de Hammadi Jbali n'avait ainsi pas su anticiper la tempête. Beaucoup de professionnels du tourisme disent, en aparté, que la tempête, ils devraient la sentir passer l'été prochain et que ses premiers vents pourraient souffler, dès la fin de la période du Booking pour la prochaine saison estivale.