Indigène éditions a lancé une nouvelle collection dédiée aux voix féminines : Femmes, où en êtes-vous ? On y trouve, en plus d'autres titres, Féminismes, ailleurs. Commençant par une introduction de Sylvie Crossman, ce petit essaicollectifcomprendcinqpetitstextesécrits par cinq femmes, sur les femmes. « Cinq femmes caractérisées par unepenséesavante, libre, maisjamaisséparées de la complexité, de l'implacabilité du réel.Solidaires de leurpeupleou de leurssœurs, mais sans concession envers les dérives de leur tradition, ettoujoursreliées à l'espérance. » (p05).Chacuned'ellesparle des femmes dansuneaireculturelleetgéographiqueprécise, d'oùl'exigence de mettre le mot Féminisme au pluriel. Dans son texteintitulé « ‘'Romnialution'', unféminisme à l'œuvreparmi les femmes tsiganes », Claire Auziasparle de la femme rom et surtout de son statutcontemporain. En illustrant et en citant des exemples, elleévoque lesgrandesthématiques des congrès et des conférencesconsacrés aux femmes tsiganes. Elle met notamment la lumière sur la double solitude de cesfemmes : solitude au sein de la communautéoùellesvivent, et solitude vis-à-vis de la communautéditemajoritaire. « La civilisationromaniestpatriarcale_ au sensféministe du terme, c'est-à-dire repose sur le pouvoir des hommessur les femmes _, patrilinéaire et patrilocale » (p08). MichèleTherrien, dans son texteintitulé « La question du genre intéresse-t-elle les Inuit? », parle des femmes inuit tout en illustrant la complémentaritéhomme-femme dansleurcommunauté. En s'inspirant del'ethnographie, elledécritleur mode de vie. « Encore aujourd'hui, la fluidité des genres, la complémentarité, les valeurspartageablessontplacées aucœur des préoccupations des Inuit. »(p15.) « Ellesveulent de l'espoir » :c'est le titreque Marcia Langton donne à son texte. Elle y parle des femmes aborigènesd'Australie, montrant comment les arts, etsurtout le cinéma, abordent des sujetsrelatifs à la condition féminine, voireféministe. D'un ton mélancolique, elledévoile les différentsabusdont les Aborigènessontvictimes, et qui ontfavorisé la naissance d'unecertaine « politique de caïds. ». Pour elle, « le cinémaest un vraipouvoir pour libérer les femmes de la main meurtrière de la discrimination et du fardeau de l'histoire » (p25). Romancière de langue française, MalikaMokeddempeint, dans son textetitré « Nous, corps du délit », certainssujetsliés à la femme algérienne, qui inspirentsouvent son écritureromanesque. Elle montreavant tout qu'aprèsl'indépendance(1962), faire des études à l'Universitéétait, pour elle et les autres, un élan vital, une renaissance. Avec rage, elledécrit le processus qui menaçait la mixité des citésuniversitairesoùellesformaient, enversetcontretous, un microcosme. En somme, elledécrit la déception des Algériennes après l'indépendance. « Le vent dans les cheveux, pleinesd'insolence, de fougue et de défis, nous tournionsrésolument le dos aux abysses de la tradition. L'exil, c'estceque nous avionsdouloureusementvécudansnosfamilles ». (p32). De l'Algérie à la Tunisie.Dans son texteportant le titre « La femme tunisienneestaussihommequel'homme », Lina Ben Mhennifeuillette le passé lointain pour parler de sesaïeules et de sesancêtres, et pour pouvoirdonc dire cequ'est la Tunisienned'aujourd'hui. Elle montreque « la femme tunisienneestaussi HOMME quel'homme, estcitoyenne de notre monde actuel et de son pays qui renaîtrasûrement de sescendres. » (p40). Sans nier le Féminismegénéral, ces femmes parlent de certainsféminismesméconnus, à travers la condition de femmes de différentesairesculturelles et géographies (Roms, Inuit, Aborigènes, Algériennes, Tunisiennes). Ellesparlent du présentamer de ces femmes tout en faisant des retours pour interrogerleur passé. Traverséçà et là par des témoignagesrapportés, ce petit essaid'inquiétude etd'espoirjette un pont entre les femmes de différentescommunautés. Enfin, ildit les cris des femmes solitaires et solidaires. Les auteures : Claire Auzias : docteure en histoire, spécialiste des Roms et de l'anarchisme. Michèle Therrien : professeure des universités à l'institut national des langues et civilisations orientales à Paris. Marcia Langton : professeure d'études indigènes australiennes à l'université de Melbourne. Malika Mokeddem : médecin et écrivaine. Auteure de plusieurs romans dont « Des rêves et des assassins », « La désirante ». Lina Ben Mhenni : cyberdissidente à Tunis. « Féminismes, ailleurs », Collectif (Claire Auzias, Lina Ben Mhenni, Marcia Langton, Malika Mokeddem, Michèle Therrien), éd. Indigène, Montpellier, 2012, 40p. A propos de l'auteur : Tawfiq Belfadel, Auteur de « Kaddour le facebookiste » éd. Edilivre 2012.