A court terme, contrairement aux supputations du Parti des Travailleurs qui versent toujours dans l'alarmisme, sans proposer de solutions réalistes, il n'y aura pas d'implosion sociale durant cette rentrée sociale 2016. Mais attention, en cas du maintien de l'actuelle politique socio-économique, les tensions sont inévitables horizon 2018/2020. Il suffit d'aller enquêter dans les quartiers d'Algérie et de recueillir les sentiments des citoyens, loin des bureaux climatisés de nos bureaucrates, pour constater qu'existe une véritable crise morale. 1. Non il n'y aura pas d'implosion sociale à court terme. Je recense quatre raisons : Premièrement, l'Algérie n'est pas dans la situation de 1986, où les réserves de change étaient presque inexistantes avec un endettement qui commençait à devenir pesant. Avec 122 milliards de dollars de réserves de la banque d'Algérie fin 2016, 112 milliards de dollars selon le FMI, et une dette extérieure inférieure à 4/5 milliards de dollars, ces réserves de change, si elles sont bien utilisées, peuvent à la fois servir de tampon social. Deuxièmement, vu la crise du logement, le regroupement de la cellule familiale concerne une grande fraction de la population et les charges sont payées grâce au revenu familial global. Mais il faut faire attention : résoudre la crise du logement sans relancer la machine économique prépare à terme l'explosion sociale. Troisièmement, grâce à leur travail mais également aux subventions étatiques, les familles algériennes ont accumulé une épargne sous différentes formes. Cependant, il suffit de visiter les endroits officiels de vente de bijoux pour voir qu'il y a « déthésaurisation » et que cette épargne est , malheureusement, en train d'être dépensée face à la détérioration de leur pouvoir d'achat. Cela peut tenir encore deux à trois ans. A la fin de cette période tout peut arriver. Quatrièmement, l'Etat, malgré des tensions budgétaires qui iront en s'accroissant, les dispositions de la loi de finances 2016, certainement celle de 2017, continue à subventionner les principaux produits de première nécessité : il n'est pas question de toucher à deux produits essentiels pour les plus pauvres à savoir le pain et le lait. En revanche, à terme il s'agira de cibler les subventions qui généralisées sont insoutenables pour le budget. Pour rappel, sur les 28 milliards de dollars de subventions - sans compter les transferts sociaux - les carburants accaparent plus de 10 milliards de dollars. L'Algérie a un répit seulement de trois ans pour changer de cap et éviter de vives tensions sociales 2018/2020. Certes, à court terme, cette situation peut être maitrisable, sous réserve d'une plus grande rigueur budgétaire et d'une lutte contre les surcoûts, le gaspillage et la corruption. Avec la baisse des recettes de Sonatrach de 45%, il est indispensable d'accroître la fiscalité ordinaire : c'est là un exercice difficile sans pénaliser les activités productives et les couches les plus défavorisées. Mais à moyen terne, en cas de faiblesse de la production interne, d'un dérapage accéléré de la valeur du dinar corrélé à la baisse des réserves de change, nous devrions assister à un processus inflationniste accéléré. En effet, il faut être aussi conscient que sans réformes structurelles, évitant les replâtrages et les discours populistes, l'implosion sociale est inévitable horizon 2018/2020. L'inflation joue toujours comme facteur de redistribution des revenus au profit des revenus variables et il appartient à l'Etat de concilier l'efficacité économique et une profonde justice sociale, laquelle n'est pas antinomique avec l'efficacité. Tous les appareils de l'Etat doivent donner l'exemple. J'avais préconisé, lors d'une conférence devant le Premier ministre, en novembre 2014, que les responsables au plus haut niveau (présidence, gouvernement, hauts cadres de l'Etat, députés, sénateurs, etc.) donnent l'exemple par une réduction de leurs salaires et évitent des réceptions inutiles. Certes, une telle attitude n'aura pas une importante répercussion sur le budget de l'Etat mais ce sera un signe fort de mobilisation en faveur d'une austérité justement partagée. Car tout responsable doit penser au devenir de l'Algérie horizon 2025/2030. La question est pertinente et relève de la géostratégie. La population algérienne était de 40 millions d'habitants au 1er janvier 2016 et sera d'environ 50 millions en 2030 avec une la demande d'emplois additionnelle qui varierait entre 300.000 à 400.000 personnes par an, nombre d'ailleurs sous estimé puisque le calcul de l'ONS applique un taux largement inférieur pour les taux d'activité à la population féminine, représentant pourtant la moitié de la population active et dont la scolarisation est en forte hausse, qui s'ajouteront au stock de chômage. En projection, horizon 2030, avec la très forte consommation intérieure, le risque est que l'Algérie aura épuisé des réserves d'hydrocarbures traditionnelles, entendu en termes de rentabilité financière, Et 2030 c'est demain.et l'Algérie depuis l'indépendance politique a toujours fonctionné sur la rente des hydrocarbures malgré des promesses sans lendemain.
2. Pas de sinistrose ni de discours d'autosatisfaction démagogiques. -Le premier scénario serait le statu quo, de l'activisme, vivant de l'illusion d'un retour à un cours du pétrole supérieur à 80 dollars et des discours d'autosatisfaction, source de névrose collective, déconnectés des réalités tant locales que mondiales. Ce serai une erreur politique d'une extrême gravité, une fuite en avant (après moi le déluge), d'attendre les élections législatives de 2017 comme solution à la crise, se livrant entre temps à de l'activisme sans procéder à de véritables changements, car en économie le temps ne se rattrape jamais. Entre-temps, la crise financière risque de s'accentuer avec une demande sociale croissante, des exigences accrues de la jeunesse dont plusieurs centaines de milliers de diplômés, qui exigera un emploi et un logement. Ceux qui travaillent actuellement, auront en 2030, 60 ans et seront en retraite. De ce fait, il est à prévoir que sans hydrocarbures, et c'est une forte probabilité, il y aura forcément suppression du ministère des hydrocarbures et celui de la Solidarité nationale avec le risque d'implosion de la caisse de retraite, et sans devises pas d'attrait de l'investissement. Il s'ensuivra un chômage croissant, des tensions sociales et une instabilité politique à l'instar des pays les plus pauvres de l'Afrique subsaharienne, et le risque d'intervention de puissances étrangères. -Quant au second scénario, et je suis optimiste quant à l'avenir de l'Algérie, il se base sur les conditions favorables de développement de l'Algérie où l'on aura préparé l'après-pétrole. L'on aura révisé profondément la politique socio-économique en misant sur des segments de savoir en évitant l'instabilité juridique, le manque de cohérence et de visibilité. La corruption qui devient dramatique généralisable à tous les secteurs, source d'une démobilisation générale, serait alors combattue par de véritables contrepoids démocratiques et non par des organes techniques, aux ordres, de peu d'efficacité, dans les faits et non par des textes. Dès lors la sphère informelle intimement liée à la logique rentière, produit de la bureaucratie et des dysfonctionnements des appareils de l'Etat qui favorise cette corruption, serait intégrée progressivement au sein de la sphère réelle. Le développement se fonderait alors sur les piliers du développement du XXIe siècle, tels que la revalorisation du savoir, de l'Etat de droit et une nouvelle gouvernance par la réhabilitation du management stratégique de l'entreprise et des institutions, et par une libéralisation maîtrisée grâce au rôle central de l'Etat régulateur. Le dialogue politique, économique et social évitant la concentration excessive du revenu national au profit de rentes spéculatives destructrices de richesses aurait remplacé les décisions autoritaires. L'on aurait mis fin au gaspillage de la rente des hydrocarbures, de ces dépenses monétaires sans se préoccuper des impacts pour une paix sociale fictive. L'on aurait préparé un nouveau modèle de consommation énergétique reposant sur un Mix dont les énergies renouvelables. L'on aurait réhabilité l'entreprise publique et privée, loin de tout monopole, seule source de création de richesses permanente. Et l'on aurait misé sur l'investissement immatériel qui manque aujourd'hui cruellement à l'Algérie privilégiant la qualité et non la quantité , évitant des universités à fabriquer des chômeurs, non imputable uniquement à l'enseignement supérieur qui hérite du fonctionnement de l'école du primaire en passant par le secondaire et la formation professionnelle. En résumé Nous pouvons investir autant de milliards de dollars dans les infrastructures ou dans les Mines, comme actuellement, sans connaître de développement véritable , voire régresser, car s'annonce la quatrième révolution économique dont le couple investissement dans l'immatériel ( renvoyant à l'économie de la connaissance) et protection de l'environnement, avec une transition énergétique et un nouveau pouvoir énergétique mondial horizon 2030, étant une erreur politique de raisonner sur l'ancien modèle de consommation linéaire. Par ailleurs, la structure des sociétés modernes et puissantes qui dominent le monde, s'est bâtie d'abord sur des valeurs et une morale comme nous l'ont enseigné les grands penseurs dont le grand sociologue Ibn Khaldoun qui, dans son cycle des civilisations, montre clairement que lorsque l'immoralité atteint les dirigeants qui gouvernent la Cité c'est la décadence de toute société. Ce qui renvoie à l'Etat de droit et à une démocratie dynamique. Il s'agit de rétablir la confiance entre les citoyens et les institutions de la république, de préserver les libertés individuelles et consolider la cohésion sociale. C'est alors seulement que les algériens vivront dans leur différence, accepteront le dialogue productif, auront l'envie de construire ensemble leur pays et d'y vivre dignement.