L'autoroute Est-Ouest, un projet maghrébin de 7 000 km décidé par le président de la république, Abdelaziz Bouteflika et les s chefs d'Etat de l'Union du Maghreb arabe (UMA). Il traverse l'Algérie de part en part sur plus de 1 200 km, de la frontière marocaine à la frontière tunisienne. C'est en mars 2007 que le Président Abdelaziz Bouteflika a officiellement lancé les travaux de l'autoroute Est-Ouest, un immense projet de 1 216 km traversant tout le nord du pays, de la frontière marocaine à la frontière tunisienne. Une fois réalisée, cette autoroute devait relier entre elles vingt-quatre wilayas (départements) et desservir, sur son flanc sud, la région des Hauts-Plateaux, par le biais de raccordements. Cet ensemble autoroutier cumulé de 1 700 km s'inscrivait dans une politique de grands travaux caractéristiques de la politique du président Bouteflika et, plus particulièrement, d'une politique de développement autoroutier.C'est ainsi qu'une rocade autoroutière des Hauts-Plateaux, parallèle à l'autoroute Est-Ouest, devait être reliée à celle-ci par le biais de pénétrantes Nord-Sud. Le nombre d'échangeurs était de soixante, avec option de péage. Les initiateurs du projet avaient prévu la réalisation de 390 ouvrages d'art dont vingt-cinq viaducs et de onze tunnels. Partie prenante d'un projet d'autoroute maghrébine Saturée par l'accroissement des agglomérations proches et le développement gigantesque du trafic automobile, la capitale devait être encerclée par trois nouvelles rocades autoroutières en forme de croissant. Mais ce n'était pas tout. Ce tronçon algérien s'inscrivait lui-même dans un projet autoroutier régional, à l'échelle du Maghreb tout entier : Mauritanie, Sahara Occidental, Maroc, Algérie et Tunisie. Un projet long de 7 000 km avec instauration de péages pour assurer une rentabilité. L'étude économique financée par la Banque mondiale prévoyait un taux de rentabilité interne de 20%. Quant aux études préparatoires, elles avaient été finalisées plusieurs mois avant, en avance sur les délais initialement projetés. Près de 930 km de « nouvelles » autoroutes devaient être construites par deux entreprises chinoises et une entreprise japonaise. La China Railway Construction Corporation (CRCC) avait en charge le tronçon de l'ouest reliant Chlef à la frontière marocaine sur une longueur de 359 km. La compagnie japonaise COJAAL recevait pour sa part le lot Est reliant Bordj Bou Arreridj à la frontière tunisienne sur une longueur de 399 km. Ce projet, qui devait permettre la création de 100 000 emplois, était estimé à 805 mds DZD Ce projet, qui devait permettre la création de 100 000 emplois, était estimé à 805 mdsDZD (7,45mds€ sur la base du taux de change de l'époque). Mais les entreprises contractantes, les chinoises en particulier, auraient demandé une réévaluation de 2 mds$ (1,45mds €). Cette information fait bondir les experts qui rappellent que le coût moyen de réalisation du kilomètre d'autoroute s'est élevé jusqu'ici à 8,15 M€. En comparaison, ce prix serait de 7,1 M€ au Maroc pour le tronçon très accidenté qui débouche sur le port de Tanger. Alors qu'en Europe, le coût du kilomètre d'autoroute s'élève à 6 M€. Pourtant, rappellent les analystes, la main d'œuvre algérienne est très bon marché et le prix des carburants, de l'énergie électrique et des matériaux de construction est bien moins élevé de ce côté-ci de la Méditerranée. Quelques grandes sociétés algériennes ont participé à la réalisation d'environ 180 km d'autoroute. L'entreprise publique Cosider a ainsi réalisé des tunnels alors que l'Engoa et Sapta se chargent des ponts. Des entreprises privées comme l'ERTRHB ont également pris part à ce projet. Les spécialistes algériens s'interrogent cependant sur le fait que les pouvoirs publics n'aient pas fait appel à Sonatro, un fleuron public de la construction routière algérienne en train d'agoniser dans l'indifférence générale. Sur le plan technique, une autoroute aux normes internationales Sur le plan technique, la construction devait s'opérer sur la base des « normes européennes » du 2x3 voies et inclure des normes antisismiques, la région Nord de l'Algérie étant particulièrement sujette aux tremblements de terre. Des aires de repos, stations service, relais routiers et centres d'entretien et d'exploitation de l'autoroute étaient prévus. Les projections envisageaient l'utilisation de 2,8 millions de tonnes de ciment, de 5 MT de sable, de 45 MT d'agrégats, de 930 000 T d'acier et de 920 000 T de bitume. Plus de 110 000 ouvriers qualifiés et 4 000 ingénieurs et experts algériens ont pris part à sa construction. Lors de la cérémonie du lancement officiel des travaux en 2007, 126 km d'autoroute avaient déjà été réalisés et 158 autres étaient en cours de réalisation. Les pouvoirs publics tablaient alors sur une livraison en 2009. Trois ans après, le lancement officiel des travaux, l'autoroute Est-Ouest a avancé, mais elle n'est pas encore totalement achevée. Intervenant le 6 mars 2010 devant les députés de l'Assemblée populaire nationale (APN), le ministre des Travaux publics, Amar Ghoul, révélait que le tronçon ouest (frontière marocaine à la ville de Chlef) était achevé à 95%. L'état d'avancement des travaux du tronçon du centre (Chlef à Bord Bou Arreridj) était estimé quant à lui à 80%. Enfin, le tronçon de l'Est (Bordj Bou Arreridj à la frontière tunisienne) serait achevé à 85%. Le ministre indiquait par ailleurs que seize stations-services seraient prochainement réalisées et un avis d'appel d'offres pour la réalisation d'une centaine d'aires de repos bientôt lancé. Il s'agit d'équiper l'autoroute en panneaux de signalisation et de la doter d'un matériel d'entretien, de centres de péage et de caméras de surveillance. De même, 220 stations de comptage sont prévues, ainsi qu'une cinquantaine de stations météo. L'entretien de l'autoroute devrait revenir annuellement à 1,7 mdsDZD (17,37M€) si l'Etat choisit une entreprise étrangère pour la gérer aux normes étrangères. La gestion de cette infrastructure devrait générer la création de 4 000 postes de travail permanent. Des scandales de corruption éclatent en plein travaux Au mois d'octobre 2009 un immense scandale éclatait. Le secrétaire général du ministère des Travaux publics et le chef de cabinet du ministre étaient arrêtés en compagnie de deux autres personnes. Les retards et imperfections du projet auraient provoqué un doublement voire un triplement des coûts. Des enquêtes ouvertes suite à des plaintes des deux sociétés chinoises participant à la réalisation du projet (CITIC et CRCC) et à une protestation de l'ambassade de Chine à Alger, auraient permis de dévoiler que des personnes très haut placées auraient exigé de ces sociétés des pots-de-vin de plus de 500 M$ (368,2M€). L'affaire a connu de nouveaux développements au début du mois de mars 2010 avec la mise sous mandat de dépôt de l'ex-directeur des nouveaux projets de l'Agence nationale des autoroutes (ANA), Mohamed Khelladi, un ancien officier de marine puis de la gendarmerie. Cette arrestation porte à huit le nombre de personnes incarcérées. Le scandale de l'autoroute Est-Ouest a débordé le cadre du ministère des Travaux publics pour s'étendre à celui des Transports et de l'Hydraulique. La presse algérienne a même cité le nom d'un militaire impliqué dans ce scandale. L'affaire est donc loin d'avoir révélé tous ses secrets. 850 espèces végétales, 37 espèces de mammifères, 21 rapaces nicheurs, 70 espèces d'oiseaux d'eau…, etc. Menacées L'un des plus graves problèmes engendrés par la construction de d'autoroute Est-Ouest aura sans conteste été le massacre d'un joyau de la nature : le Parc national d'El Kala (PNEK), situé en bord de mer à l'extrême-Nord-Est du pays, à la frontière tunisienne. Il s'agit d'une aire protégée de 80 000 ha qui comprend, selon une pétition initiée par la Fédération nationale de la protection de l'environnement (FNPE), « 850 espèces végétales, le tiers de la flore d'Afrique du Nord, 37 espèces de mammifères dont 2 chiroptères et l'hypothétique phoque moine, 21 rapaces nicheurs dont l'aigle pêcheur et le faucon d'Eléonore, 70 espèces d'oiseaux d'eau… 9 oiseaux marins, une centaine de passereaux, des centaines de fleurs, d'orchidées, le nénuphar blanc, etc. » Classé mondialement, le PNEK avait été créé par décret présidentiel en 1983. Les défenseurs de l'environnement avaient demandé que le tracé de l'autoroute soit modifié afin d'éviter de la faire passer à l'intérieur du parc. Mais en dépit des assurances du ministre des Travaux publics, qui avait promis en juillet 2007 que pas un seul mètre d'autoroute ne serait construit dans le parc, le chef du Gouvernement d'alors, Abdelaziz Belkhadem, donna l'ordre de le faire, six mois plus tard. L'autoroute traverse donc le parc sur une longueur de 20 km. Comme l'expliquaient en 2008 les défenseurs algériens du projet, « en dépit de l'article 4 du statut des parcs nationaux algériens (décret présidentiel n°83-458) qui interdit le passage dans un parc d'une voie à grande circulation, les travaux de l'autoroute viennent d'être lancés dans le PNEK. »