Et fut ce qui devait être. Sans conviction, aucune, deux articles parus récemment sur notre quotidien ont traité de l'abattage illégal et clandestin à travers la wilaya de Mostaganem. Et la preuve en est qu'à une quinzaine de jours seulement du scoop médiatique à coup de décrets et de fonctionnaires, y compris à travers les ondes, l'abattage anarchique se porte bien aux risques et périls du citoyen. Quand la mort sévira De la Grande Bretagne à la Chine et de l'Indonésie à l'Egypte en passant par le Vietnam, on guette et on épie la moindre somnolence de l'oiseau en cage, de la poulette et de la vache. La moindre somnolence mettra sur le qui-vive toute une nation et mettra en branle gouverneurs et gouvernements. C'est que l'on mesure la portée des catastrophes dues aux pandémies. On a en mémoire la grippe espagnole, la myxomatose et autres épidémies de choléra. La peste qui emporta tant chez nous autres, les oublieux, et qu' Albert Camus en fit toute une « histoire », n'est qu'un papier parmi tant d'autres qui traitèrent également de typhus et de variole. L'Ebola ? Connais pas et ça n'arrive qu'aux autres. Et pourtant, de temps à autre, on signale chez nous des morts mystérieuses chez l'adulte comme chez l'enfant et sans qu'aucune suite ne soit donnée. Mesra, avant-hier vendredi 26 mars. Personne au monde n'arriverait à décrire le paysage de ce souk où le délit est roi. La température est clémente, car le printemps est à ses débuts. Et malgré le beau temps, l'air est suffocant et par endroits irrespirable. Une atmosphère poussiéreuse et ingrate enveloppe dattes, confiseries traditionnelles, brochettes, raisin sec, sardines, olives, herbes médicinales et autres denrées alimentaires. Un petit tour à la « boucherie ». Indescriptible, avais-je dit. Oui, on ne peut décrire d'aussi nauséabondes odeurs et il faut savoir où mettre les pieds. Quand le boucher est serré, c'est contre le mur qu'il se soulage devant l'assistance, avant de vous servir vos côtelettes de caprin qu'il vous fait passer pour de l'agneau. Le geste vous parait anodin et pourtant, il en a hospitalisé pas mal. Chez nous et chez d'autres. Quoique l'on dise, l'abattage hors normes, non-règlementaire et illégal bat son plein. Un délit. Petit ou grand, tout le monde reconnait que par les temps qui courent, il risque de se transformer en crime. Un crime faute du manque de contrôle et d'impunité. Le vendredi étant un jour de repos hebdomadaire, y aura-t-il un quelconque responsable pour gérer ce tableau assombri par la négligence totale des services devant superviser cette « foire » hebdomadaire où l'illégal côtoie le légal en toute. La mort dans la bonne humeur. Au souk de Mesra, il y règne une ambiance bon enfant du côté de chez les bouchers. Une humeur et une gaité particulières. Les marchands insistent avec dédain à ce que leurs dents paraissent afin de souligner l'étal qu'ils vous présentent, alors que vous êtes agressés par des odeurs pestilentielles de déchets d'abats, de sang coagulé et de restes de contenu de panses en amas verdâtres sur lesquels un « égorgeur » hebdomadaire vous fait l'affaire. Le couteau passé et la saignée terminée, la bête est tirée par le second qui lui « fait la peau » en un clin d'œil. Le plein air de l'abattage est appelé « abattoir » sans aucune ironie. Chèvres, boucs et brebis attendent allongées à même le sol, un preneur qui aurait épuisé sa marchandise pour les sacrifier, faute de quoi, ils auront la vie sauve. Ces animaux qui n'ont pas eu la chance d'être vendus plus haut près des négociants en matériaux de construction ont été introduits au marché moyennant 150 dinars la tête. Si l'éleveur introduit au souk dix bêtes, ce sera 1500 dinars et le retour chez lui avec ne serait pas rentable. Mieux vaut un couffin plein au retour tout en évitant les frais de transport du cheptel. Les méandres de la ruse Les services vétérinaires étant gratuits, qu'est-ce qui pousse les bouchers à pratiquer cet abattage clandestin ? Un secret de Polichinelle. L'abattage clandestin se fait au dépens de la qualité et vous pouvez constater de visu les conditions d'hygiène indignes dans un pays qui construit des satellites et projette des centrales nucléaires. Des conditions d'hygiène moyenâgeuses. Et si nous y sommes retournés, c'est pour constater l'application à la lettre des décrets et arrêtés et réjouir le citoyen que l'Algérie nouvelle est là à son grand étonnement. Etonnement pour étonnement, ce sont les prix pratiqués qui nous ont assommés. L'agneau ou mieux faux-agneau et pseudo-agneau est cédé à 760 dinars, la viande de vache que l'on fait passer pour du veau à 680 dinars. Le poulet est accordé à 240 dinars et là, c'est une autre paire de manche, car à voir les cous de dindes alignés et manipulés par des mains sales qui triturent les billets crasseux et où pullulent tous les germes que connait la biologie à quelques microbes près , vous enlève l'appétit et l'amour du tournebroche. L'abattage bat son plein après dix heures du matin quand le vétérinaire, dit-on, range son cartable. Et « quand le vétérinaire n'est pas là, les bouchers dansent ». La coriace viande de chèvre est cédée pour 400 dinars pour les avertis et pour les non avertis, « elle se fait passer » pour de l'agneau. Question économie : si un aller-retour Mostaganem-Mesra revient à 50 dinars, qu'économiserait un père de famille sur un kilogramme de chair tous types confondus ? Etant donné que la majorité ignore les conditions d'abattage au souk de Mesra, une vidéo sur le site de notre quotidien laissera abattues bon nombre de ménagères, enfants et mères de familles. Le leurre et la magouille privilégiant le dinar à la santé du citoyen, le célèbre souk qui, initialement, était réputé pour être un marché de véhicules automobiles d'occasions s'est transformé au fil des jours en un brouhaha poussiéreux où tout se vend et tout s'achète dans l'inconsciente indifférence d'un consommateur père de famille de surcroit qui croit économiser là il pourrait payer cher son aveuglement. Qui aura, un jour, le courage de dire non au sacrifice des démunis ?