La wilaya de Sétif est depuis quelque temps déjà le théâtre d'une concurrence atypique à laquelle se livrent la grande majorité des officines pharmaceutiques. Aussi, n'est-il guère exceptionnel de voir la quasi-totalité des officines en exercice les jours fériés et à des heures indues de la nuit. Au vu de l'immense chaos qu'est devenu ce secteur, l'on serait enclin à penser qu'aucune loi ni réglementation ne régissent l'exercice de la pharmacie, ce qui n'est pourtant pas le cas. Le fait est que très souvent, les gérants font tout bonnement fi de la loi et de ce qu'elle préconise en matière de modalités d'ouverture et de fermeture, et de gardes. La circulaire ministérielle nº 453 MSP/D.PH.MED/97 du 26 avril 1997 établit pourtant les horaires d'ouverture et de fermeture des points de vente pharmaceutique. Quant aux gardes de permanence, le jeudi après-midi, le vendredi et les jours fériés, elles sont fixées par le tableau des gardes, dont la charge revient à la DSP. La garde étant une réquisition pure et simple, sa non-observation est sanctionnée par la loi, tout comme l'est l'ouverture d'officines ne figurant pas sur le tableau de garde. Comment expliquer alors que la réglementation semble être délibérément et impunément bafouée. M. Trabelsi, président du Conseil régional de l'Ordre impute cet espèce de chamboulement des lois au peu d'implication des pouvoirs publics, qui devraient veiller plus, selon lui, au respect des règles en vigueur. « Il existe toutefois, depuis quelques mois, des inspections initiées par le ministère de la Santé et de la Réforme hospitalière qui sont effectuées par des médecins mandatés et qui promettent, d'après notre interlocuteur, de mettre un peu d'ordre. » La dernière visite des praticiens inspecteurs au niveau de certaines officines (voir El Watan de dimanche 24 décembre 2006 n°4900) a relevé de nombreuses anomalies. La correspondance n°2836 du 11 décembre 2006 transmise par la direction de la santé et de la population, s'apparentant à un dernier ultimatum, démontre le mal qui ronge une telle profession. L'absence du pharmacien au niveau de l'officine, le recrutement de personnel non qualifié, la pratique d'analyses médicales non conformes et non autorisées, la présence d'importantes quantités de produits périmés figuraient en pole position. Les points relatifs aux registres d'ordonnances mal tenus, les règles d'hygiène non respectées, la vente de produits pharmaceutiques sans vignette n'ont pas échappé aux inspecteurs ayant, en outre, mis le doigt sur le non-respect des règles de conservation des médicaments et des produits pharmaceutiques. Il paraîtrait également que certains pharmaciens de la wilaya exerceraient de façon non réglementaire car n'étant pas inscrits au tableau, en complète violation de l'article 204 du décret exécutif nº 92-276 du 06 Juillet 1992 qui préconise que « nul ne peut exercer la profession de pharmacien, s'il n'est pas inscrit au tableau ». Dans un autre registre, Il semblerait que de plus en plus de pharmaciens rechignent à délivrer certains médicaments, des psychotropes en particulier, aux non habitués de leurs officines, malgré des ordonnances en bonne et due forme et ce, de crainte que les acheteurs n'en fassent un usage illégal. Selon M. Trabelsi, il existerait à ce sujet, très peu d'ordonnances contrefaites. Dans la plupart des cas, le médecin prescrit en toute bonne foi des psychotropes à un patient qui simule. Mais il arrive également que ce soit des ordonnances de complaisance. L'automédication est également un phénomène à prendre en considération, vu l'ampleur qu'elle a pris et ce, en partie, à cause de la facilité de se faire délivrer certains médicaments. Il s'agit souvent d'antibiotiques qui appartiennent pourtant à la même nomenclature que les psychotropes, et qui ne doivent être délivrés que sous prescription médicale. De l'avis de M. Trabelsi, « le phénomène d'automédication n'est que d'importance secondaire vu le nombre limité des personnes qui la pratiquent. La réelle préoccupation devrait que l'on fasse en sorte que les médicaments vitaux, notamment les hypotenseurs et antidiabétiques, soient toujours disponibles ». L'exercice de la pharmacie étant ce qu'il est à Sétif, le Conseil régional de l'Ordre, dont la juridiction s'étend à M'sila et El Bordj, prévoit d'organiser une journée d'étude fin mars dont le thème principal sera « L'aspect réglementaire de la profession de pharmacien ». A cet effet, le Conseil prévoit, entre autres, d'éditer tous les textes réglementaires auxquels est soumise la profession et d'en délivrer un recueil à chaque pharmacien. Des juristes seront également présents à la conférence, aux titres de guides, pour faire mesurer aux pharmaciens l'étendue de la responsabilité qui leur incombe. Ferrad Sawsen Kamel Beniaiche