Vendre son projet d'union méditerranéenne est la préoccupation centrale du chef de l'Etat français, M. Nicolas Sarkozy, qui a effectué hier une visite à Alger. Lors du point de presse qu'il a accordé à la résidence d'Etat de Zéralda, il n'a pas hésité à réitérer son invitation aux Algériens, qu'il souhaite voir partie prenante de son projet. Pour ce, il ne manquera pas de louer « la sagesse du président Bouteflika, et son expérience, qui saura formuler les propositions en évitant de mécontenter les uns et les autres ». Cette union a l'ambition de rassembler les pays du pourtour méditerranéen, comme la Turquie, qui, selon M. Sarkozy, n'ont pas vocation à intégrer l'Union européenne mais à avoir avec l'Europe des liens privilégiés. Plaidant la cause de son union méditerranéenne, le président français affirmera qu'il souhaite voir la région se transformer en un lac de sécurité. Il précisera que cette union se construira autour « des questions de l'environnement, de la paix, de la sécurité, du développement économique et du dialogue des cultures ». Il affirmera qu'il s'agit bien d'un « projet méditerranéen et non d'une idée française » dont le contenu et le contenant seront connus « lors de la réunion des chefs d'Etat prévue pour le premier trimestre de l'année 2008 ». Une précision ponctuée par son souhait de voir Alger, première destination du président français hors Europe, adhérer au projet et en être une force motrice. Alger reste cependant prudente sur ce projet et attend d'en connaître le contenu détaillé avant de se prononcer sur une probable adhésion. La visite d'Etat qu'effectuera le président français à Alger en novembre prochain en donnera certainement de plus amples détails. Pour l'instant, la préoccupation majeure des Algériens demeure la préparation de l'après-hydrocarbures. Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, l'a exprimée clairement à son hôte en lui signifiant la volonté de l'Algérie de faire de la France un partenaire économique. M. Sarkozy, qui n'ignore pas que ce partenariat constitue une chance inespérée pour la relance de l'économie française stagnante depuis quelques années, n'a pas manqué d'exprimer la volonté de la France de coopérer dans le secteur énergétique, « non seulement dans le domaine du gaz, mais également dans ceux du nucléaire civil et de l'agroalimentaire », souhaitant à cet effet que les entreprises françaises investissent « massivement » en Algérie. Sur tous ces points, « nos montres ont marqué exactement et strictement la même heure », a dit le président français aux côtés de M. Bouteflika qui n'a fait aucune déclaration. Quant au contentieux historique entre les deux pays, le chef de l'Etat français s'est obstiné à dire qu'il souhaitait avoir des relations résolument tournées vers l'avenir. M. Sarkozy a refusé une nouvelle fois le repentir, soulignant qu'il « n'a pas connu la guerre d'Algérie ». Il ajoutera : « Je ne viens ici ni pour blesser ni pour m'excuser » avant de conclure sur ce chapitre : « Les Algériens ont beaucoup souffert, je respecte cette souffrance mais il y a eu aussi beaucoup de souffrance de l'autre côté, il faut la respecter. C'est l'histoire, c'est le passé, maintenant construisons l'avenir. » En ce qui concerne les questions d'immigration et de circulation des personnes, M. Sarkozy a réaffirmé l'orientation de la France vers une immigration choisie selon les besoins de l'économie française. Il soulignera, dans ce sillage, que le nombre de visas délivrés par les services consulaires français a augmenté alors que les délais ont été réduits. Concernant la question du Sahara occidental, le président français, qui souhaite vraisemblablement un rééquilibrage des relations de son pays, ne s'est pas départi de « la position traditionnelle de la France ». Il a toutefois avoué « la complexité de la question » et sa volonté de « ne pas assumer un problème de plus ». C'est pourquoi, il estimera que « la solution proposée par l'ONU semble intéressante même du point de vue algérien et nous espérons la voir progresser pour que puisse progresser l'union du Maghreb ». Une union que la France « ne saurait imaginer sans l'Algérie et le Maroc ». Est-ce le prélude à une future neutralité ? L'avenir y répondra. Ghada Hamrouche, La Tribune