Les Alg?riens install?s au Qatar, dont nous ne connaissons pas grande chose, en dehors de la cha?ne pol?mique Al Jazeera, occupent des fonctions de haut rang et ont pu r?ussir et imposer leurs comp?tences. Voyage au c?ur d?une diaspora pas comme les autres. Les Alg?riens qui vivent au Qatar ne sont pas plus de mille, mais beaucoup d?entre eux sont des c?l?brit?s nationales et internationales. Il s?agit en fait d?une ?lite qui, ici, fait souvent parler d?elle, parfois r?ver aussi. On peut en citer ces monstres de la t?l?vision, comme Khadidja Benguenna, dans Al Jazeera news ou Lahbib Benali, Abdelkader Daamiche et Leila Smati qui sont des vedettes d?Al Jazeera Sports. On peut aussi ?voquer d?autres, comme Madani Amer, cadre ? la cha?ne gouvernementale Qatar TV, Boualem Bino, actuel patron de la cha?ne sportive Al Kaas, et bien d?autres moins connus qui travaillent dans la production, l?information ou les nouvelles technologies. On pourrait ?galement citer quelques-uns de nos sportifs, surtout l?ancien international Rabah Madjer, consultant d?Al Jazeera Sports aux analyses et pronostics tr?s exp?riment?s, ou son autre ex-co?quipier gardien de buts des verts Mahdi Cerbah, ainsi le natif d?Oran, Ali Benarbia, qui y a fini sa carri?re de footballeur. Mais aussi, et bien s?r, dernier arriv? sur les lieux et qui n?est plus pr?senter depuis longtemps, le pr?sentateur sportif et non moins ancien directeur g?n?ral adjoint, Hafid Derradji, qui a ?t? recrut? pour un contrat d?encadrement, avec un salaire qui se chiffre en milliers d?euros et un traitement de faveur digne de sa notori?t? et, en attendant son logement de fonction, un transit forc? par le sublime Ritz Carlton, un cinq ?toile ? faire p?lir de jalousie les plus beaux h?tels de la rue Rivoli ? Paris. Toutes ces personnalit?s sont un exemple de la r?ussite des Alg?riens dans beaucoup de pays arabes, ont un statut social bien class?, voyagent souvent gr?ce aux avantages de leurs contrats, en premi?re classe des compagnies les plus renomm?es et sont tr?s ?cout?s dans leur milieu professionnel. Un niveau de vie ?lev? Des journalistes alg?riens, travaillant au Qatar, qui n?ont pas souhait? que soient publi?s leurs noms ni leur employeurs, sans doute par souci de respect du secret professionnel qu?autre chose, nous r?v?lent que ce qui les avait attir? ici, c??tait le niveau de vue qui est de plus agr?able au Qatar, mais aussi la possibilit? d??voluer dans un niveau professionnel parmi les plus haut monde. Ainsi, pour a premi?re motivation, ils nous disent avoir ?t? souvent agac?s de lire dans des journaux alg?riens (qu?ils suivent quotidiennement par Internet) qu?ils touchent des salaires de ministres. ?Ici, les salaires vont entre 7.000 et 40.000 ryals qataris, selon le niveau hi?rarchique, ce qui ?quivaut ? 2.500 ? 8.000 euros?, nous pr?cise l?un d?eux, rencontr? au Costa Caf?, l?un des lieux de rencontre privil?gi? des Alg?riens. Mais, ajoute-t-il, ?on oublie souvent que cet argent, qui est gagn? ici, n?est tout de m?me pas d?pens? en Alg?rie. C?est ici que nous vivons avec cet argent, en prenant en compte la v?rit? des prix quand un appartement lou? co?te jusqu?? 10.000 ryals (1.800 euros) par mois alors qu?une voiture lou?e co?te au minimum 700 euros par mois, bien que l?essence ici est des moins chers au monde avec un plein ? 30 ryals?. Toutes proportions gard?es, il faut cependant rappeler que le niveau de vie au Qatar est le plus ?lev? au monde. Ce qui oblige d?ailleurs le Qatar ? adopter une r?glementation des plus strictes en mati?re de circulation des personnes. Le Qatar, cette p?ninsule aux fronti?res de l?Arabie Saoudite est un v?ritable carrefour entre le Golfe persique, l?Asie, l?Afrique et le Moyen-Orient. Si le pays est le champion du melting-pot, avec la pr?sence de plus de 700.000 ?trangers, contre 250.000 nationaux, majoritairement concentr?s dans la capitale, Doha, c?est qu?on y retrouve des travailleurs des cinq continents. Ils viennent des pays arabes, de l?Inde, des Philippines, du Pakistan, de Chine, des Etats-Unis, d?Europe, de Somalie, d?Iran, etc. On bien dit ?travailleurs?, non seulement parce que les Alg?riens en touristes pr?f?rent g?n?ralement Dubai s?il s?agit de se rendre dans le Golfe, mais aussi car il n?y a pas d?autre moyen pour s?installer au Qatar que d?y venir avec un contrat de travail pr?alablement, ou d??tre le parent d?un travailleur r?sidant, le tout, nous explique-t-on, ?tant sur la responsabilit? de l?entreprise qui fait venir ces employ?s et qui s?occupe donc de leurs formalit?s de visas et de r?sidence. La particularit? du Qatar avec ce syst?me de circulation des personnes, c?est qu?il est totalement souple, puisqu?un visa d?entr?e au pays ne se fait pas ? l?ambassade, mais constitue un simple document fait au Qatar m?me par l?employeur ou le parent qui vous l?envoie par fax ou par email. L?autre avantage, c?est que cela confr?re au Qatar un contr?le total sur la circulation des personnes et en fait, de facto, un des pays les plus s?curis?s au monde o? l?on compte une police des plus discr?te et le taux de criminalit? et de d?linquance parmi les plus bas au monde, sans recours pour cela ? un appareil r?pressif muscl? et omnipr?sent. ?Il est rare, nous dit-t-on, qu?une personne s?inqui?te de quitter le pays apr?s avoir oubli? de fermer sa maison ? cl? ??. Le boom m?diatique L?autre motivation des Alg?riens, mais aussi des autres ressortissants arabes qui viennent au Qatar, c?est le niveau professionnel des m?dias, et notamment de la t?l?vision. L?exemple d?Al Jazeera que ni l?Arabie Saoudite, avec al Arabya, ni les Etats-Unis, avec Al Hurra, ni encore moins la France avec son ?dition arabe de France 24, n?ont pu concurrencer, est l? pour le d?montrer. Des professionnels rencontr?s dans un restaurant libanais ? Soug Wagef, l??quivalent de la Casbah, mais ? Doha, dans l?architecture d?une m?dina aux ruelles emplies d?artisans et de caf?s et restaurants traditionnels, nous expliquent le secret de la r?ussite d?Al Jazeera. ?Le concept est simple, il s?agissait d?ouvrir ses ondes ? toutes les forces politiques ou personnalit?s qui n?avaient pas acc?s aux m?dias dans les pays arabes. Le slogan, l?avis et l?avis contraire (erra? oua erra? el akhar), trouve ainsi son explication?, nous dit-on. C?est gr?ce ? cette politique que le Qatar est devenu un pays dont on parle de plus en plus, peut-?tre maintenant plus que son voisin et a?n?, l?Arabie Saoudite, politique qui a trouv? sa rampe de lancement avec le 11-Septembre et, ensuite, avec la guerre en Irak. Le deuxi?me ?l?ment, c?est que tout l?encadrement, le staff r?dactionnel ainsi que les vedettes d?Al Jazeera sont issues ou ?t? intensivement form?s par la BBC, chose qui ressort dans l?approche de anglo-saxonne de la cha?ne. Cr??e en 1993, cette cha?ne adopte depuis quelques ann?es une strat?gie de d?veloppement remarquable, en s?organisant en r?seau (Network), qui lui fera lancer le bouquet sportif, en sus d?Al Jazeera documentary et Al Jazeera moubasher, sans compter les dizaines d?activit?s annexes, de promotion ou de solidarit? avec certaines causes, ce qui densifie chaque jour l?influence du cette cha?ne qui consacre un d?partement entier ? l?alimentation permanente du site Youtube avec ses ?missions qui sont diffus?es le jour m?me. ?Il n?y a qu?? regarder suffisamment longtemps la cha?ne d?information BBC News pour comprendre d?om vient cet ?tat d?esprit?, nous dit un de nos convives. Mais cette ouverture qui a permis ? Al Jazeera de capter l?attention des t?l?spectateurs arabes, n?est pas toujours pour expliquer la r?alit? politique de certains pays. Ainsi en est-il du cas de l?Alg?rie ou des revanchards, qui avaient des comptes personnels ? r?gler avec l?Etat alg?rien, distillaient rumeurs et accusations ? partir de l??tranger en profitant du micro ouvert d?Al Jazeera, sans ?tayer leur propos de preuves, mais toujours au service de la th?se insidieuse du ?qui-tue-qui??. Une ligne ?ditoriale qui, avec son penchant pour les islamistes, y compris les plus radicaux, finira par donner un bain g?n?ral qui finira par accoucher, entre autre du fameux sondage Internet sur le soutien ou non au terrorisme. On se souvient, fort heureusement d?ailleurs, que les journalistes alg?riens avaient r?dig? une p?tition contre ce sondage honteux et press? leur direction pour s?en excuser et veiller ? ce que ce type de d?rives ne se reproduise plus. De m?me, si l?on reproche ? la cha?ne de rechercher parfois un sensationnel bien calibr? pour maintenir son avance en audimat dans le monde arabe, il faut savoir aussi qu?elle pr?che aussi de ne pas trop tenir compte de la v?ritable identit? et projet politiques de certains invit?s dont certains, il faut le savoir, touchent des compensations financi?re, modestes, mais toujours bonnes que la cha?ne s?assurer de leur fid?lit? et aussi pour damer le pion aux cha?nes concurrentes. Il n?emp?che que le travail dans les cha?nes de t?l?vision du Qatar demeure d?un haut niveau, mais aussi que les moyens accord?s pour parvenir ? cela sont mis sur la table. Ici, nous confient des confr?res alg?riens, des reportages peuvent ?tre r?alis?s partout dans le globe. Les missions sont soutenues, les ?quipes envoy?es, la production audiovisuelle externe et ?trang?re trouve ainsi un filon de premi?re, alors que les cha?nes occidentales se font plus times depuis le ralentissement ?conomique et le r?tr?cissement des recettes publicitaires. Et entre temps, si la croissance du Qatar se porte bien, le boom m?diatique au Qatar, s?est ralenti et est devenue plus cibl?e avec la cr?ation par la Qatar Foundation d?une cha?ne de t?l?vision pour enfant, Al Jazeera Children Channel (qui ne fait pas partie du r?seau Al Jazeera) et qui repr?sente la premi?re en son genre dans le monde arabe et dans le monde tout court. Depuis, le Qatar s?est enrichi d?une r?alisation du ?Centre de Doha pour la libert? de la presse?, dont la direction a ?t? confi?e ? Robert M?nard qui n?est autre que l?ancien secr?taire g?n?ral de? Reporters sans fronti?res (RSF). ?Nous voulons rentrer, mais?? Interrog?s sur les appels de plusieurs responsables politiques alg?riens sur la n?cessit? de la diaspora de revenir et contribuer ? la construction du pays, certains de nos confr?res interrog?s, toujours sous le sceau de l?anonymat, confirment que rien ne leur ferait plus plaisir. Grosso modo, leurs r?ponses se r?sument en ceci: ?Ici, nous sommes coup?s de nos familles et de notre pays et ce n?est pas de t?l?phoner chaque jour ou de lire nos journaux chaque matin sur le Net qui nous compensera. Mais, s?il faut rentrer, il faut aussi savoir pour quoi faire? Il est triste de voir l??tat de notre champ m?diatique qui n?est pas capable de r?pondre aux attaques m?diatiques qui viennent de l??tranger, comme on l?a vu dans les ann?es 1990 avec les cha?nes fran?aises ou plus r?cemment avec le sondage d?al Jazeera?. S?il s?agit de rentrer pour assister ? cela dans un placard les bras crois?s, alors non, on pr?f?re continuer ? capitaliser notre savoir-faire, jusqu?au jour o? il y aura effectivement des choses int?ressantes ? faire?. ?Ce n?est pas une question de salaire, ajoute-t-on aussi. Certains ont suffisamment mis de c?t? pendant quelques ann?es, de quoi s?acheter une maison et une voiture, mais il n?y a pas que l?argent. Nous, on veut travailler et faire notre m?tier ? fond. Ici, les moyens existent pour cela?. D?autres Alg?riens, qui sont pilotes de lignes apr?s avoir fait les beaux jours d?Air Alg?rie, ou ing?nieur en hydrocarbures, disent la m?me chose, et parlent du pays avec une extr?me nostalgie. L?un d?eux ne cache pas que l?une des raisons qui le font rester au Qatar, c?est la proximit? de l?Arabie Saoudite et des Lieux Saints. ?A partir d?ici, je peux ? tout moment partir ou envoyer un parent accomplir le hadj ou la Omra. Et ?a, pour moi, ?a n?a pas de prix?, nous confie-t-il, avant de l?cher un soupir: ?Mais tout de m?me, chez moi, en Alg?rie, il y a une ambiance, tu vois, que je ne retrouverai jamais ici ou dans un autre pays?? De notre envoy? ? Doha Amine B.