Le fait se confirme avec la réélection de Mahmoud Ahmedinejad et la continuité annoncée des options stratégiques de l'Iran, l'Algérie est de mieux en mieux placée pour servir d'intermédiaire entre l'Occident et ce pays sous pression internationale. Si la route de Téhéran est passée pendant plusieurs années par Damas, ce n'est plus le cas aujourd'hui, maintenant que l'alliance entre la Syrie et l'Iran est «travaillée au corps» par la diplomatie française. A travers l'UPM, Nicolas Sarkozy a ouvert comme une issue de secours devant la Syrie, sous le coup de sanctions économiques et de plus en plus isolée sur la scène internationale et même arabe. Damas se met déjà à pondérer son soutien, sans faille, au régime des mollahs, surtout maintenant que les relations avec le Liban tendent à la normalisation et que l'Egypte et l'Arabie Saoudite donnent l'impression d'intégrer la Syrie dans les grandes décisions arabes. Cet isolement aggravé de l'Iran, provoqué par la diplomatie française, a eu lieu au moment où Téhéran divise le monde arabe. Il y a, d'une part, ceux prônant une acceptation de cet allié dans les pressions à exercer contre Israël (à l'image du Qatar et de la Syrie notamment, comme on l'a vu à l'occasion de la guerre contre Ghaza). D'autres pensent que l'Iran est un ennemi, qu'ils accusent de vouloir déstabiliser les Etats sunnites avec son expansion chiite (notamment l'Egypte, le Liban, les Emirats Arabes Unis, Bahreïn ou, plus récemment, le Maroc). Une adversité au centre de laquelle le Hamas à Ghaza et le Hezbollah font office de chevaux de Troie iraniens, sinon de boucs émissaires dans le cadre d'une lutte d'influence au Moyen-Orient. L'Iran a, donc, besoin d'un autre allié stratégique qui soit un pays musulman, et donc forcément arabe, vu que des pays comme le Pakistan ou l'Afghanistan sont embourbés dans leurs problèmes internes, alors que des Etats comme l'Indonésie ou la Malaisie n'entendent jouer aucun rôle particulier sur la scène internationale. La conjoncture n'en est que plus favorable pour que l'Algérie se retrouve, naturellement, dans la position du pays le mieux disposé à jouer le rôle d'intermédiaire privilégié du dialogue entre l'Iran et la communauté internationale. Cela d'autant qu'avec la réélection de Mahmoud Ahmedijenad, la communauté internationale, notamment les Etats-Unis et l'Union européenne, entend mettre les bouchées doubles pour aboutir à un accord qui lui garantirait le caractère pacifique du programme nucléaire iranien. La tension entre le Conseil de sécurité de l'ONU et la Corée du Nord ne fera qu'accélérer les choses pour traiter au plus vite le dossier iranien. Enfin, le président américain Barack Obama a, lui-même, donné l'ultimatum de la fin 2009 à Téhéran pour répondre à son offre de dialogue global. C'est dire si le temps est compté et que la communauté internationale a besoin, faute d'un dialogue direct qui soit possible avec les autorités iraniennes, d'un intermédiaire de choix dont la diplomatie a déjà fait ses preuves. D'ores et déjà, l'on connaît l'excellence des relations politiques et économiques d'Alger avec Téhéran. Tout récemment, au pic des divergences arabes autour de «l'expansion chiite», à l'occasion des sommets de Doha et de Koweït, Abdelkader Hajdar a affirmé que «du côté algérien, nous ne partageons absolument pas une certaine vision entretenue à l'égard de l'Iran et qui appréhende ce pays avec une animosité». «L'Iran n'est pas un pays ennemi pour les Arabes. L'Iran est plutôt un soutien aux pays arabes sur des questions essentielles, comme la question palestinienne, le dossier libanais ou la situation en Irak», avait affirmé l'ambassadeur algérien au Caire et délégué de l'Algérie auprès de la Ligue arabe. «L'Iran, en tant que puissance régionale, a ses propres calculs et ses intérêts, mais de là à nous mettre dans la case des ennemis de l'Iran parce que les Etats-Unis et Israël le font aussi, voilà ce à quoi nous nous opposons», avait ajouté M. Hadjar. L'autre élément qui plaide pour que l'Algérie soit appelée à brève échéance à jouer ce rôle, qui ne sera pas sans retombées sur son influence régionale, c'est bien entendu les points inscrits dans les questions liées à la dénucléarisation du monde. Lors de la récente conférence de l'ONU sur le désarmement nucléaire, c'est bel et bien Alger qui, par une proposition qui a reçu l'adhésion du reste du monde, à commencer par Washington, a trouvé le moyen de débloquer un processus international en panne depuis plus de 12 ans. Cette bonne foi étant démontrée, Alger ne pense pas moins que «personne ne peut empêcher un pays d'aller vers le nucléaire civil», comme l'a clairement déclaré le chef de la diplomatie algérienne, Mourad Medelci. L'Algérie a toujours milité en faveur du développement du nucléaire civil, par les pays qui le souhaitent, et Alger estime que la position de l'Iran est celle d'un pays qui souhaite accéder au nucléaire civil.