La justice britannique a accepté d'extrader Abdelmoumène Rafik Khalifa et de le remettre aux autorités juridiques algériennes, lors de la séance tenue jeudi dernier au tribunal de Westminster à Londres. A l'issue de cette décision, le juge Timothy Workman a estimé que l'extradition de Khalifa «ne contrevenait pas à la convention internationale des droits de l'Homme». Le juge s'est dit également «convaincu» que les «assurances diplomatiques» qu'il a reçues de la part de l'Algérie, quant au respect des droits de M. Khalifa étaient «à la fois fiables et de toute bonne foi». Il a précisé, lors de l'énoncé de son jugement, que le condamné, qui n'était pas à la Cour, aurait droit à un nouveau procès après son retour en Algérie. Le juge a également indiqué qu'il «n'avait aucune preuve» que M. Khalifa avait été victime d'un règlement de compte de la part du Président Bouteflika, comme le prétend la Défense. Le tribunal a estimé ainsi que cette extradition ne contrevenait pas aux droits de l'Homme. Le juge a souligné que si M. Khalifa revenait dans son pays, sa condamnation serait annulée et qu'il aurait droit à un nouveau procès, «suffisamment équitable» et «dans un délai raisonnable». Les conditions d'un jugement équitable seront réunies, a indiqué tout de suite le ministre de la Justice algérien, Tayeb Belaïz, après l'annonce de son extradition. Dans un communiqué publié à l'issue de cette décision, le ministère de la Justice a indiqué que la décision d'extradition «a été prise suite à une série de procédures qui ont abouti à l'annonce de l'acceptation de la demande algérienne en la forme et à l'examen ensuite de l'objet de la demande, la vérification des pièces à conviction en s'assurant que les conditions qui garantissent un jugement équitable du concerné devant les tribunaux algériens sont réunies, et ce, au cours de nombreuses séances d'audition des témoins, d'experts et des plaidoiries des avocats». Khalifa a été condamné par contumace par la justice algérienne à la réclusion à perpétuité. Cette condamnation avait été prononcée en 2007 pour des délits liés à la faillite de la banque qu'il avait fondée. La demande algérienne pour l'extradition de Khalifa, rappelle-t-on, est basée sur des documents relatifs à la falsification de l'hypothèque de la villa familiale et d'un local commercial jusqu'à la constitution du groupe Khalifa. Parmi les autres chefs d'inculpation retenus contre Khalifa, figurent également les cas de vols survenus au niveau des différentes agences de Khalifa Bank, sur ordre de l'accusé lui-même, la gestion anarchique et la négligence ayant marqué les transferts de devises sous le couvert de diverses transactions qui étaient en réalité, selon la liste des chefs d'accusation, des détournements organisés. Abdelmoumène Rafik Khalifa a été jugé par le tribunal criminel de Blida et condamné par contumace à une peine de prison à perpétuité pour plusieurs crimes en relation avec la gestion de Khalifa Bank. Les autorités algériennes avaient alors découvert un «trou» de 500 millions de dollars. Il s'était réfugié au Royaume-Uni en 2003 et fut arrêté le 27 mars 2007 sur le territoire britannique dans le cadre d'un mandat d'arrêt européen délivré par le Tribunal de grande instance de Nanterre, près de Paris. Le parquet de Nanterre avait ouvert en fin 2003 une information judiciaire pour «abus de confiance, banqueroute par détournement d'actifs, banqueroute par dissimulation de comptabilité et blanchiment en bande organisée.» Une autre demande d'extradition a été introduite par la France auprès de Londres mais son examen a été gelé, dans l'attente d'une décision définitive de la demande algérienne, qui prévaut à celle de Paris. L'avocate de Khalifa, Me Anna Rothwell, a déjà annoncé de son côté qu'elle appellerait de la décision à la Haute Cour de Londres. Un processus qui devrait prendre plusieurs mois.