Au lendemain de la clôture de la deuxième édition du festival national de la musique et de la chanson raï, la direction de la culture de la wilaya a pris la louable initiative d'éditer à son compte un intéressant dossier sur l'histoire de ce genre musical au niveau de son terroir spécifiquement belabbésien, ainsi que ses sources, son fonds poétique, ses musiciens et ses multiples interprètes dans ses formes dites ‘trab', ‘old' et ‘new'. Se déclinant en 24 pages, cette nouvelle publication à caractère documentaire propose une série d'articles de synthèse rédigés par un collectif rédactionnel composé essentiellement de journalistes, d'universitaires et d'artistes de la région. Outre de petits rappels bibliographiques sur les principaux chantres connus du melhoun et les figures emblématiques de la chanson bédouine (les chioukh Madani, Abdeklmoula et N'djadi) et du raï (Rimitti et Djenia), le dossier comporte également des écrits d'excellente facture sur plusieurs autres acteurs de la mouvance raï en général, à savoir les poètes, les paroliers, les berrah, les arrangeurs, les éditeurs… Une analyse du corpus Melhoun et raï est également proposée en pages centrales par le professeur Habib Mounsi, qui enseigne actuellement le module de l'analyse du discours à la faculté des lettres et des sciences humaines de l'université Djillali Liabes de Sidi Bel-Abbès. Un musicien de la ville, Mahmoudi Abdelghani, signe deux magnifiques papiers sur les arrangeurs «faiseurs de tubes» et les artistes de génie tout en levant le voile sur les particularismes musicaux du raï belabbésien, «des mélodies en La majeur, résume-t-il, un rythme soutenu de roulements récurrents de la batterie et une rythmique atypique, le tout marqué par des textes structurés et interprétés dans un ordre bien agencé pour le genre». Enfin, dans une édifiante réflexion sur l'avenir du genre, Brahim Hadj Slimane, journaliste et auteur d'un roman et de deux excellents ouvrages sur la musique et la création artistique en Algérie, aura le meilleur mot de la fin en conclusion de cet important recueil documentaire en estimant, à juste titre, que «contrairement à ce que proclament ses détracteurs, le Raï ne s'éteindra pas. Tout simplement parce que, en dehors de quelques accords, de rythmes et de leitmotivs, de base et qui font sa marque de reconnaissance, il n'a pas de forme figée. Il est ouvert à tout métissage, tout air et rythme nouveau, qui soit dans l'air du temps». «Ce qu'on peut déplorer, soulignera-t-il cependant, c'est l'absence de prise en charge artistique de cette musique, en dehors de son milieu artisanal d'origine. Mis à part Khaled et qui n'est seulement qu'un grand interprète (de grand cœur également), le Raï n'a pas engendré de figure charismatique, en mesure de tirer cette musique de l'avant, en apportant des ruptures, des innovations. Le champ libre a été laissé aux maisons de disques occidentales. Mais celles-ci, naturellement mues par la recherche du profit maximum et mal placées pour connaître et restituer les pulsations d'une société comme celle-ci, ne pouvaient pas jouer ce rôle. Qui sait? N'insultons pas l'avenir.»