Jeudi dernier, une soirée parisienne a été consacrée au fondateur de l'Etat algérien moderne, l'Emir Abdelkader, au Centre culturel algérien de Paris. Le Dr. Chamyl Boutaleb, président de la section d'Oran de la Fondation Emir Abdelkader, en fin connaisseur de cette période charnière de l'histoire nationale, a souligné les dimensions de stratège militaire, de bâtisseur d'un Etat moderne avec toutes ses institutions, de diplomate chevronné, de penseur, d'homme de Lettres et de savoir, d'humaniste qu'était l'Emir, désigné à l'âge de 24 ans chef de la résistance populaire contre l'occupant français. "En 17 années de Djihad, l'Emir a mené 116 batailles et affronté 142 généraux français", a expliqué le conférencier, en soulignant qu'il était un moderniste en avance sur son temps. "Il était le premier chef à avoir défini un édit sur le traitement des prisonniers de guerre, presque un siècle avant la convention de Genève. Il était un fervent militant pour le dialogue entre les cultures et les religions et pour un rapprochement entre le sud de l'Europe et le nord de l'Afrique", a-t-il souligné. Le Dr. Chamyl Boutaleb a refusé la thèse selon laquelle l'Emir s'est rendu à la France coloniale. Pour lui, les conditions posées pour l'arrêt des combats, à savoir son départ vers Alexandrie ou Akka, n'ont jamais été respectées. Le conférencier s'est également attardé sur l'acte humanitaire accompli par l'Emir à Damas en sauvant d'un génocide réel près de 15.000 chrétiens menacés par les druzes. "Ce geste a eu un grand retentissement à travers le monde et lui a valu reconnaissance et admiration de tous", a-t-il rappelé. L'orateur a, en outre, mis en exergue la place qu'occupe aujourd'hui la personnalité de l'Emir à travers le monde. "Des rues, des places portent le nom de l'Emir, une ville américaine de l'Etat de l'Ohio est baptisée au nom d'El Kader, une statue est érigée à Mexico, une autre le sera prochainement à Cuba. Mais l'Emir mérite bien plus que cela", a-t-il affirmé. Un intervenant français, dans le débat qui a suivi la conférence, a estimé que cette personnalité "n'appartient pas seulement à l'histoire algérienne mais à celle de l'humanité toute entière". "Il n'était pas ce guerrier cruel comme le présentaient certains militaires français et idéologues colonialistes. C'était un homme de dialogue, ouvert, tolérant, intelligent et fortement moderniste. Ses pensées et ses échanges avec les Saint-simoniens ont fortement influencé ces derniers. De nombreux militaires, convaincus par ses paroles et ses opinions, ont embrassé l'Islam", dira-t-il.