Depuis jeudi dernier, le Théâtre Régional de Sidi Bel-Abbès vit au rythme de la première édition du festival culturel national des étudiants d'écoles d'art et de jeunes talents. Un programme très riche et varié est proposé, chaque jour, au public par les jeunes festivaliers, représentant la quasi-totalité des écoles des Beaux-arts et instituts de musique et d'art dramatique sur le territoire national. Conférences d'une grande teneur thématique et artistique, ateliers de formation et de consolidation des acquis, expositions d'arts plastiques, concerts et représentations théâtrales, meublent les matinées et les soirées automnales de la capitale de la Mekerra. Des moments de pur bonheur pour ceux qui savent apprécier le beau dans l'inflexion des lignes dans une copie de Modigliani, le son d'arpège à la guitare, tiré par la jeune prodige, Wiam Layoun ou les claquements de mains effrénés d'une ‘Derdba' du folklore béchari. Avant-hier soir, la salle à l'italienne du TRSBA a donné rendez-vous à deux jeunes étudiants de l'ISMAS d'Alger qui ont donné la pleine mesure de leur talent de comédiens à travers la présentation de deux extraits de pièces de théâtres: «Caligula» d'Albert Camus et «Les méfaits du tabac» d'Anton Tchekhov, le premier à avoir campé le personnage de l'empereur romain, dans une «pièce d'acteur et de metteur en scène», assez difficile il est vrai, s'est laissé emporter dans une débauche excessive de gestes, de postures, d'expressions, de tons et d'énergie tout court qui ont fini par biaiser complètement l'orientation qu'a voulu lui donner l'auteur en premier. Dans une analyse structurelle du texte «Caligula», Albert Camus explique en effet que son ambition, loin d'être philosophique, comme le soutenait la critique française de l'époque, était de «montrer la passion de l'impossible» (…) «Dans sa fureur, en illustrer les ravages, en faire éclater l'échec, voilà quel était mon projet. Et c'est sur lui qu'il faut juger cette œuvre», a-t-il tenu à faire observer avant de conclure plus loin: «Et si je me trouvais être, par malheur, scandaleux, ce serait seulement à cause de ce goût démesuré de la vérité qu'un artiste ne saurait répudier sans renoncer à son art lui-même.» Le second étudiant aura beaucoup plus de réussite que son camarade dans son jeu de scène et la manière de rendre, par son expression gestuelle et corporelle, ainsi que sa diction, le monologue, «Les méfaits du tabac» de Tchekhov. Dans une certaine mesure et en dépit des quelques imperfections dommageables, relevées chez l'un ou les prémisses d'un réel talent de comédien relevées à contrario chez l'autre, le public présent ne réservera pas moins un accueil digne d'éloges à l'issue des deux prestations fournies par les deux étudiants.