La dysfonction érectile, autrefois appelée improprement et péjorativement «impuissance sexuelle», est une entité particulière pouvant être le symptôme d'une maladie ou pouvant être «la maladie». Sa perception a considérablement évolué ces dernières années. Avant les années 80, lorsqu'un patient se présentait à son médecin traitant avec une douleur de la poitrine et pour peu qu'il dépasse la cinquantaine, une batterie extraordinaire d'examens médicaux était déployée pour essayer de retrouver une origine à ses troubles ; et lorsqu'on ne trouvait pas, on pouvait dire que le trouble était certainement d'origine psychique. Mais si le même patient venait se plaindre de troubles sexuels, il était tout de suite orienté vers un psychiatre. Telle était la prise en charge des troubles sexuels. L'effet "Viagra" en 1998 a radicalement chamboulé les attitudes et les troubles de la sexualité sont considérés comme un véritable baromètre clinique de l'état de santé et de la qualité de vie. Pour le diabétique cet aspect est particulièrement important puisque les troubles de l'érection sont un problème fréquent, qui augmente avec l'âge d'une manière un peu plus importante que la population générale, et qui est lié à l'équilibre du diabète et/ou à la présence de complications. La question angoissante de la relation diabète-sexualité et de l'influence du diabète sur la vie sexuelle du diabétique sous-tend l'appréhension de la maladie diabétique. Cependant, ces troubles ne sont pas inéluctables et des thérapeutiques existent. L'impact négatif des troubles de l'érection chez le diabétique a été largement étudié et il déborde largement la sphère sexuelle. Il va entrainer un sentiment de honte, de dévalorisation, de culpabilité et une "crise" d'identité masculine. Le retentissement sur la vie de couple est important, mais le retentissement sur la vie sociale, relationnelle et professionnelle l'est tout autant avec une perte de la confiance en soi, diminution des capacités professionnelles, etc. La femme du diabétique peut remettre en cause sa féminité avec la confusion entre manque d'érection et manque de désir pour elle. Malgré les souffrances engendrées par cet état, peu de diabétiques en parlent spontanément à leur médecin, préférant de loin qu'il prenne l'initiative. En 2009, il est impensable que le médecin n'aborde pas ce sujet avec son patient diabétique et ceci pour plusieurs raisons : - la première est que parler de sexualité n'est plus un tabou, l'OMS la reconnaissant depuis... 1974 comme partie intégrante de la définition de bonne santé; - la seconde est qu'elle est l'opportunité de faire un bilan de santé; - la troisième est qu'elle peut faire découvrir un diabète en étant la première manifestation de la maladie diabétique; - enfin parce qu'actuellement on sait que c'est une étape importante dans la maladie vasculaire et coronarienne. Les solutions pharmacologiques existent et l'amélioration de la dysfonction érectile améliore comme l'ont montré des études scientifiques, la qualité de vie du patient avec une diminution nette des scores d'anxiété, de dépression ou d'agressivité, une amélioration sensible des capacités intellectuelles et professionnelles. La fonction sexuelle des diabétiques doit être évaluée au moins une fois par an lors d'une consultation, plus de 85% des patients n'osant l'aborder avec le médecin traitant. Cette situation de "blocage" dans tous les sens doit faire place à une situation plus proactive de la part du médecin: "les personnes présentant des troubles de la fonction sexuelle ont droit à un diagnostic et une prise en charge médicale correcte" (International Council on Male Sexual Health, 2001). A Oran, les services de Diabétologie et de Médecine interne s'intéressent à la question depuis de très nombreuses années et une prise en charge des patients souffrant de dysfonction érectile est possible . Encore faut-il, sachant toute la détresse de ces patients et leur difficulté à aborder le sujet avec leur médecin traitant, que ce dernier prenne le temps d'en discuter. Mais les choses évoluent… Dr M. ARRAR