Spectaculaire retournement de situation dans le secteur de l'Education, le gouvernement via son ministre de l'Education Boubekeur Benbouzid a décidé de se déjuger dans les sanctions qu'il a prises contre les enseignants et leurs syndicats en grève depuis bientôt dix jours. Comme par enchantement, le ton est désormais à l'apaisement et aux belles formules. Vingt-quatre heures après la réunion du gouvernement, le ministère de l'Education est passé à l'acte pour annoncer un train de mesures d'ouverture auxquelles les syndicats n'ont jamais rêvé jusque-là. Ainsi, «dans un souci d'apaisement», Benbouzid a annoncé dans un communiqué l'annulation pure et simple de la ponction sur salaire des journées non enseignées. Les enseignants percevront donc intégralement leurs salaires. Le ministère exhorte juste ses interlocuteurs de rattraper tous les cours perdus «suivant un planning qui sera arrêté par l'administration de l'établissement scolaire». Benbouzid joue l'apaisement après avoir promis l'enfer à ses fonctionnaires. La soudaine «générosité» du ministre ne s'arrête pas là. Il a promis, également, de mettre en oeuvre «au plus tôt» les réponses positives apportées par le gouvernement aux revendications soulevées par les syndicats du secteur. Pour ce faire, une commission mixte (ministère de l'Education nationale-syndicats) sera à pied d'oeuvre dès aujourd'hui pour l'élaboration, dans les délais les plus courts, des propositions relatives au régime indemnitaire des enseignants. Les syndicats des enseignants, jadis diabolisés, sont invités avec respect pour débattre de leurs préoccupations. Le communiqué du ministère de l'Education tient cependant à souligner que cette disponibilité au dialogue émane du gouvernement. «Conformément à la décision du Premier ministre, toutes les primes et indemnités entrant dans la composition du salaire seront versées avec effet rétroactif à partir du 1er janvier 2008», précise encore le ministère. Au plan légal, le département de Benbouzid reconnaît implicitement la représentativité de tous les syndicats de l'Education auxquels il opposait une sourde oreille auparavant. «Une large concertation» sera engagée avec tous les syndicats autour de la révision du dossier des oeuvres sociales des travailleurs de l'Education nationale» promet en effet le ministre. Mieux encore, il précise qu'une réponse favorable a été donnée pour «l'élargissement de la gestion des œuvres sociales aux différentes organisations syndicales du secteur», un grand acquis pour les syndicats autonomes. Et ce n'est pas fini ! Le communiqué du ministère assure qu'une réponse «favorable» a été également émise aux revendications liées au dossier de la médecine du travail, dans ses différents volets, notamment médical et social. Le ministère de l'Education nationale a réitéré son «entière disponibilité à oeuvrer, de concert avec l'ensemble des syndicats, pour l'amélioration constante des conditions socioprofessionnelles des différents corps de l'Education nationale», en les appelant à une «prise de conscience objective qui soit à la hauteur de ces réelles avancées». Pour qui connaît les rapports conflictuels entre Benbouzid et la famille de l'Education, il est difficile de croire à cette grande disponibilité. Il est regrettable de constater la facilité avec laquelle le ministre répond favorablement aux doléances des enseignants, alors qu'il aurait pu le faire avant pour éviter dix jours de grève. Il est néanmoins évident que cette bienveillance et ce «bon sens» retrouvés sont directement liés à l'atmosphère très chaude en Algérie dans le sillage du scandaleux traitement de nos «Verts» au Caire. Les pouvoirs publics ont ainsi préféré calmer le jeu au risque de se retrouver hors jeu sur le terrain.