Lors de la représentation générale du spectacle «Larmes de lune », conçu par Fadela Assous sur des morceaux choisis de textes, fragments de pièces théâtrales, poèmes de Kateb Yacine , un vent venu de la mer, pour paraphraser justement l'auteur de Nedjma, a traversé les planches du TRSBA, exhalant un air poétique empreint d'un réalisme où l'histoire du « polygone » étoilé émerge, dévoilant la tragédie d'un peuple colonisé et sa résistance pour se libérer de ce joug et, sur un ton d'humour, montrer les difficultés de bâtir son indépendance après les affres du crime colonial, surtout regard d'un poète tourmenté dans sa dimension amoureuse représentée par la transfiguration de Lakhdar et de Nedjma. L'histoire d'une passion élevée sur le socle de la révolution algérienne, évocation métaphorique du drapeau d'où ressort avec émotion le croissant et l'étoile, époux éternel devant l'humanité, pour dire que la metteur en scène et comédienne fétiche de Kateb Yacine et son équipe de l'Action Culturelle des Travailleurs a su nous transmettre l'épopée biographique et romanesque, dramaturgique avec une intuition féminine et un savoir faire de métier qui a brillé de bout en bout de ce spectacle dont la beauté essentielle réside dans le fait qu'il s'agit d'un atelier de formation de comédien du TRSBA en collaboration avec l'université Djillali Lyabès. Et ces stagiaires bien dirigés ont bien pénétré l'univers du descendant kéblouti à travers ce montage d'extraits du « Cadavre encerclé » dans lequel Lakhdar, le militant de la cause nationale mourant évoque la rue de Nedjma, la rue toujours crépusculaire dans toutes ses perspectives, ses habitants et ses clameurs nocturnes, entre ses joies et ses misères, rue de son unique amour où il va rendre l'âme, des larmes de nuit, de lune. Le scénographie basée sur le portemanteau des costumes et accessoires et la scène nue a permis de situer l'espace du jeu et la forme dans lequel a évolué la vision du metteur en scène où l'on a reconnu plusieurs écoles contemporaines, entre autres celle de Peter Brook, de Grotowski. L'interprétation de ces jeunes a fait sensation notamment celle de Aboubaker Benaissa en Kateb Yacine , coiffé d'un mdal, de sa chemise rouge, carreau noir, de sa canne, entourés d'un florilège de petits bourgeons de scène en l'occurrence Hicham Chellali , Kouba Sid Ahmed, Aïcha Benazza, Asma Hamed, Meriem Otman , Amine Dahou , Miloud Benaïssa, Narimane Issad, Karima Cheroud, Aicha Djarboue, Abdellah Bentrad et Mokhtar Sofiane , une succulente distribution, relève aussi, si l'on maintient le rythme du suivi. Le support de l'éclairage, tenu avec un doigté habituel, efficace et précieux de Miloud Benkhater qui, il faut le souligner, a déjà travaillé aux côtés de Kateb Yacine dans les années 80 et l'accompagnement musical de Hamid Djili rappelant le souvenir de Smail Habbar et Tahar Boudiaf, moment de nostalgie aussi pour les compagnons de Yacine. Signalons également que la conception des costumes, réalisée par Mme Nacera Kadri, composée d'un effet vestimentaire unique et une variété d'accessoires allant de la chéchia au képi. On peut dire que la soirée a été une belle rencontre finalisée par une collation bon enfant clôturant cette fête « katébienne » sous le ciel d'un Bel Abbès toujours enivré par la victoire des « Verts ».