Le Nobel de littérature 1982, Gabriel Garcia Marquez, avait bel et bien été «torturé» en 1961 par la police coloniale française qui le soupçonnait d'être un élément du FLN. Une victime collatérale. L'avocat et ancien responsable de la Fédération de France du FLN, Me Ali Haroun a raconté samedi passé à Alger, la mésaventure vécue par le célèbre romancier de nationalité colombienne en octobre 1961 dans un commissariat de police parisien. C'est l'aventure réelle rapportée par notre confrère DNA. Les faits se situent dans le sillage de la répression des manifestations du 17 octobre 1961 au cours desquelles des centaines d'Algériens ont été tués, jetés ligotés dans la Seine, torturés, déportés ou portés disparus pour avoir manifesté contre le couvre-feu imposé par le préfet de police de Paris de l'époque, Maurice Papon. «Dans leur folie répressive et meurtrière, les policiers de Papon arrêtent et conduisent dans les commissariats non seulement les Algériens mais également tous ceux qu'ils soupçonnent d'en être parce qu'ils ont le teint basané et les cheveux bruns», a raconté Me Haroun. Au moins deux personnes ont fait les frais de ces brutalités. Un journaliste du quotidien américain The Washington Post qui a d'ailleurs «dénoncé dans son célèbre journal la sauvagerie des autorités françaises». Il s'agirait, sans doute, du correspondant du Post et du Chicago Tribune à Paris, Waverley Root. Les policiers ont également arrêté un autre badaud qui avait le malheur de se trouver au mauvais endroit, au mauvais moment. Conduit au commissariat, interrogé et roué de coups, le malheureux, malgré son accent espagnol très prononcé, ne parvient pas à convaincre les policiers qu'il est Colombien et non Algérien. «Tu dois être un Oranais qui maîtrise bien l'espagnol. Ce n'est pas à nous que tu vas jouer un tel coup», insistent ses tortionnaires. De guerre lasse, ils finissent par relâcher le malheureux hispanique qui s'en est sorti avec des boursouflures et des hématomes. Cet homme là s'appelle Gabriel Gracia Marquez, futur prix Nobel de littérature. Sans argent après la fermeture du journal El Espectador sur ordre du dictateur Rojas Pinilla, Marquez a donc trouvé refuge au dernier étage d'un hôtel du quartier Latin, à Paris. A l'époque des faits, il terminait la rédaction de son roman La Mala Hora (sorti en 1962). En 1982, trente et un ans après ces manifestations, un journaliste algérien interroge Gabriel Garcia Marquez, s'il connaît l'Algérie? «Non malheureusement, je n'ai jamais visité votre pays. Par contre, j'ai bien payé pour sa libération», lui répond le célèbre nouvelliste en lui racontant la mésaventure du jeune basané à l'accent espagnol avec la police française. Gabriel José de la Concordia García Marquez est un écrivain colombien né le 6 mars 1927 à Aracataca, en Colombie. Romancier, nouvelliste, journaliste et activiste politique, il est devenu lauréat du prix Nobel de littérature en 1982. Surnommé affectueusement «Gabo» en Amérique Latine, García Marquez est un des plus grands auteurs du XXe siècle.