Les avocats de la défense dans l'affaire des vaccins périmés, dans laquelle dix cadres de l'Institut Pasteur d'Algérie (IPA) sont accusés, ont relevé, mercredi à Alger, des moyens en la forme devant la chambre correctionnelle de la Cour d'Alger, au cours du procès en appel. Lors de l'audience au cours de laquelle le procès a été reporté au 9 février 2011, les avocats de la défense ont relevé des moyens en la forme consistant essentiellement en la prescription de cette affaire, le code pénal stipulant que les prévenus ne peuvent pas être condamnés pour des délits qui se sont déroulés il y a plus de trois ans. Les avocats ont en effet expliqué que les faits avaient eu lieu en 2005, alors que l'affaire n'avait éclaté qu'en 2009. La chambre correctionnelle a, pour sa part, rejeté ce moyen, rappelant que des procédures ont été entamées durant cette période mettant ainsi fin à la prescription. Les avocats ont aussi rappelé que l'IPA est une entreprise publique à caractère industriel et commercial (EPIC) et que la passation de marchés publics ne fait pas partie de ses prérogatives. A cet effet, ils se sont interrogés pourquoi la justice condamne ces cadres "qui ne sont pas en mesure de passer de tels marchés ?". Le tribunal de Sidi M'Hamed (Alger) dans sa section correctionnelle avait prononcé en première instance, en date du 13 octobre 2010, des peines allant d'une année de prison avec sursis à 10 ans de prison ferme à l'encontre des dix cadres, dont l'ex-directeur général de l'IPA, Miloud Belkaïd. Actuellement en fuite, l'ancien directeur général de l'IPA (2002-2009), qui a écopé de 10 ans de prison ferme, fait l'objet d'un mandat d'arrêt international. Les autres condamnés sont Omani Ammar, représentant des laboratoires étrangers (six années de prison ferme), Abdelmadjid Boudiaf, ancien responsable des moyens généraux, (six années de prison ferme), Aït Ouras Ahmed (une année ferme), et Dali Hamid, directeur général-adjoint au niveau de la commerciale (deux années ferme). L'inculpée Nadia Touabti a été condamnée, quant à elle, à quatre années de prison avec sursis, Boubekeur Djamila, à deux années avec sursis et Aït Ouras Lamine à une année avec sursis, tandis que Chaïb Ahmed a été relaxé. Les mis en cause sont accusés de passation de marchés publics contraire à la législation, dilapidation de deniers publics, obtention d'avantages injustifiés et négligence manifeste ayant causé un préjudice à l'Etat. L'affaire remonte à 2005, lorsque les services de sécurité reçurent une lettre anonyme concernant un important lot de vaccins contre la grippe, la tuberculose, la rougeole et des vaccins pour nourrissons acquis par l'IPA auprès de quatre laboratoires étrangers par voie de marchés publics suspects. Une commission d'inspection ministérielle fut mise en place en mai 2005 établissant dans son rapport la responsabilité des différents intervenants de l'IPA à tous les niveaux. Selon le même rapport, ces marchés publics "anarchiques" ont causé à l'Etat un préjudice de 147.531.844,08 DA, sans compter les frais engagés dans la location des chambres froides. Le document conclut que des poursuites judiciaires devaient être engagées contre les personnes sus-citées. L'enquête qui débuta en novembre 2009 mit à jour la "mauvaise gestion" de l'ancien DG de l'IPA et révélé que la majorité des contrats passés avec des fournisseurs étrangers étaient "non conformes à la réglementation des marchés publics". A ce propos, l'avocat de la prévenue Touabti Nadia, Me Chorfi Cherif, s'est demandé pourquoi aucune mesure n'avait été prise de 2005 à 2009, assurant que sa cliente, en sa qualité de responsable du laboratoire de contrôle de la qualité à l'IPA, "a toujours dénoncé les irrégularités concernant les marchés publics conclus avec des laboratoires étrangers, par le biais d'écrits au ministère". Me Amara Mohcen, a, de son côté, affirmé que son mandant Omani Ammar, qui est représentant des laboratoires étrangers auprès de l'IPA, "n'a fait que son travail" en livrant des vaccins dont la qualité "n'a pas été mise en cause" par la commission d'inspection du ministère, ajoutant que la "stérilité" de ces vaccins constatée par la suite était due à de "mauvaises conditions de conservation".