ALGER - Le gouvernement nigérian a approuvé lundi une baisse du prix du carburant dans une tentative d'arrêter la grève générale qui paralyse le pays depuis une semaine, alors que les syndicats, toujours inflexibles, ont décidé de poursuivre le débrayage en exigeant un retour des prix des carburants à leur niveau d'avant le 1er janvier. Afin de mettre fin à cette grève générale enclenchée le 9 janvier et éviter qu'elle ne s'étende au secteur pétrolier dans le premier pays producteur de brut en Afrique, le gouvernement nigérian a annoncé une baisse d'environ 30% du prix de l'essence. "Le gouvernement va continuer de poursuivre une déréglementation complète du secteur pétrolier", a déclaré le président nigérian Jonathan Goodluck à la télévision. "Toutefois, compte tenu des difficultés rencontrées par les Nigérians (...), le gouvernement a approuvé une baisse du prix du carburant à 97 nairas le litre", a-t-il assuré. Mais le chef de l'Etat reste ferme sur le fond, soulignant que "le gouvernement allait continuer de poursuivre une déréglementation complète du secteur pétrolier". "Je demande instamment aux dirigeants syndicaux d'appeler à la fin de la grève et à la reprise du travail", a-t-il lancé lors de son intervention. Selon le gouvernement l'arrêt de subventions aux carburants, qui coûtent à la caisse de l'Etat quelque 8 milliards de dollars, a pour but de financer la modernisation des infrastructures du pays. Cette mesure a provoqué le courroux des syndicats qui avaient annoncé la reprise dans la journée de la grève, suspendue durant le week-end pour permettre les négociations avec les autorités. Des pourparlers ont eu lieu dimanche entre le président Goodluck et les principaux syndicats nigérians, dont le Nigeria Labour Congress (NLC) et le Trade Union Congress (TUC), mais aucune avancée n'a été enregistrée à l'issue de la rencontre. Le président du Sénat nigérian David Mark, qui a joué le rôle de médiateur entre le gouvernement et les syndicats, avait indiqué dimanche que le gouvernement allait annoncer les prochaines étapes pour régler la crise provoquée par la hausse du prix des carburants. Les syndicats jugent insuffisant l'engagement du président de "suspendre la question de la dérégulation complète" du marché des carburants. Ils posent comme préalable à toute discussion un retour des prix à leur niveau d'avant le 1er janvier. Pour des raisons de sécurité, les syndicats du pays ont décidé de suspendre les manifestations de rue. Des heurts entre manifestants et la police avaient fait une quinzaine de morts. "Nous sommes arrivés à la conclusion que nous devons rester à la maison, éviter de descendre dans les rues, pour être certains de ne pas mettre en danger des vies innocentes en raison de la situation sécuritaire dans le pays", a déclaré Abdulwahed Omar, le chef de la centrale syndicale, le Nigeria Labour Congress. Durant la matinée de lundi, des militaires ont établi des barrages aux principaux points stratégiques de Lagos, la capitale économique du pays, en interdisant l'accès au principal lieu des manifestations. Plusieurs personnes qui tentaient d'aller au parc où avaient eu lieu les rassemblements ont été refoulées par les militaires. Quelque 200 manifestants ont tenté de se regrouper avant que l'armée n'intervienne. Le déploiement de l'armée intervient alors que le nord du pays est le théâtre de violences interethniques attribuées par les autorités à la secte extrémiste Boko Haram. Le président Jonathan Goodluck a décrété l'état d'urgence dans les Etats de Yobe, de Borno, du Plateau et du Niger (nord-est et centre-ouest), régions où les attaques du groupe extrémiste ont fait des centaines de morts. Peuplé de plus de 152 millions d'habitants, le Nigeria est premier producteur africain de pétrole, mais la majorité des Nigérians vivent dans le besoin et ne gagnent pas plus de deux dollars par jour.