Robert Buron, un des négociateurs français des accords d'Evian en mars 1962, était convaincu en 1954 que la décolonisation de l'Algérie était "nécessaire", a témoigné sa fille, Martine, dimanche à Evian, au deuxième jour d'un colloque sur le thème. "Il avait toujours souligné le manque de lucidité, d'ouverture sur l'avenir, dans les décisions gouvernementales les plus diverses", a indiqué l'ancienne députée européenne et maire de Chateaubriand, dans une conférence intitulée "Robert Buron, de l'entrevue secrète des Rousses (11-19 février 1962) à Evian (7-19 mars)". Elle a rappelé que l'opinion de son père s'était forgée lors de sa visite en Algérie le 10 novembre 1954, quelques jours après le déclenchement de la guerre de libération nationale, alors qu'il était ministre de l'Outre-mer, et ses contacts avec ses "collègues » musulmans à l'Assemblée française. "Mon père avait la conviction que la décolonisation était nécessaire. Sa conviction s'est renforcée davantage à la lecture de lettres de jeunes appelés du contingent mayennais (d'où il est originaire) dans lesquelles ils décrivaient l'inconscience de leurs chefs militaires", a ajouté l'oratrice, soulignant la "contribution" du courant de la démocratie chrétienne de gauche à la fin de la guerre en Algérie, auquel appartenait son défunt père. Elle révélera également que Robert Muron avait mis à profit sa visite en Algérie (qu'il a visitée par ailleurs 11 fois en quatre ans) pour nouer des contacts avec des "autonomistes" algériens du Front de libération nationale. "C'est ce profil qui a fait que le général De Gaule l'ait choisi parmi la délégation française aux négociations d'Evian pour que celles-ci puissent se dérouler sur des bases de confiance, et également au regard de ses opinions pour la décolonisation de l'Algérie", a-t-elle précisé. Economiste de formation et moult fois ministre de la République (Outre-mer, Travaux publics...etc), Robert Buron est décédé en 1973. A sa mort, l'Algérie lui a rendu hommage en "reconnaissance du travail accompli", a rappelé sa fille.