Le 5ème Festival international de la littérature et du livre de jeunesse (FELIV) a consacré de vendredi à dimanche un colloque international sur "les indépendances dans les littératures postcoloniales", animé par des universitaires algériens et étrangers. Des œuvres littéraires africaines traitant des indépendances ont été décortiquées par des universitaires en se référant à des textes d'auteurs africains, y compris des algériens, pour expliquer comment ces indépendances sont représentées à travers la littérature. Les participants à ce colloque, qui a pris fin dimanche, ont apporté des réflexions sur l'ensemble des littératures écrites depuis les années 1960, période où beaucoup de pays africains se sont libérés du joug colonial, dont l'Algérie en juillet 1962. Ils ont tenté d'apporter des éclairages sur la manière dont l'art de l'écriture, par le roman, la poésie ou le théâtre, a représenté les indépendances, tout en rappelant qu'au départ la littérature montrait l'euphorie des peuples de ne plus dépendre de l'autre et d'être libres dans leur façon de penser. L'usage des langues du colonisateur par des auteurs "colonisés" ainsi que l'apparition de la littérature féminine africaine ont été longuement abordés par les universitaires pour qui le multilinguisme est une richesse et non une déculturation. A ce propos, Benaouda Lebdai, professeur à l'université du Maine (France), spécialiste en littérature coloniale et postcoloniale, affirme que cette dernière "a démontré qu'il y a eu récupération et même africanisation des langues européennes", citant en exemple Rachid Boudjedra et Mouloud Feraoun qui ont introduit les langues vernaculaires (arabes parlé et kabyle) dans leurs romans. L'universitaire a aussi expliqué que les langues européennes, français et anglais notamment, utilisées dans les œuvres littéraires d'auteurs africains, ont permis aux africains d'être présents dans le concert des nations et d'affirmer, par la langue du colonisateur, une identité africaine à part entière. Par ailleurs, les participants au colloque se sont penchés sur la question du désenchantement, auquel "la joie des indépendances" a cédé la place, relevé à partir des années 80 dans des écrits d'auteurs africains quand ces derniers "se sont rendus compte que les régimes (politiques) empruntaient de plus en plus la voie de la dictature". A ce propos, M. Lebdai explique qu'un écrivain d'Afrique "peut représenter les africains dans leurs ressentiments en créant des personnages à travers lesquels, il exprime le mal-être et la mal-vie des individus afin de leur apporter l'espoir et les inciter à aller de l'avant", analyse-t-il. Concernant l'apparition de la littérature féminine d'expression française ou anglaise en Afrique, les participants au colloque étaient unanimes à affirmer que les indépendances ont donné la possibilité aux femmes de s'exprimer et d'être plus visibles. Une visibilité qui s'est traduite par une présence féminine affirmée sur scène littéraire en Afrique, dès les années 1960, à l'exemple Assia Djebar ou Ken Bugul (Sénégal). Outre ce colloque consacré aux littératures postcoloniales, le festival propose aux visiteurs des débats sur différents thèmes littéraires ainsi que des dialogues entre auteurs algériens et étrangers. Le 5ème FELIV se poursuit jusqu'au 23 juin à l'esplanade de Ryadh El Feth (Alger), à Batna et à Sidi Bel Abbès.