La première partie des mémoires de Chadli Bendjedid, décédé le 6 octobre dernier, qui raconte 50 ans de sa vie (1929-1979), vient de paraître à titre posthume à "Casbah éditions". Ce premier tome (332 pages), qui sera disponible en librairie dimanche prochain, s'ouvre sur les appréhensions de l'ancien président de la République (1979-1992) à livrer ses mémoires. L'auteur explique ses hésitations par "la lecture des mémoires de plusieurs hommes politiques et grands chefs militaires - dont ceux de personnalités algériennes évidemment". "J'ai constaté, dit-il, que la plupart de ces œuvres étaient imprégnées d'un narcissisme qui met en avant la personne de leurs auteurs au détriment de la vérité et de la modestie qu'appelle tout témoignage historique". Ce tome comprend, en plus d'un prologue, 12 chapitres, dont le 1er est intitulé : "Mes racines et mon enfance (1929-1945)", et le dernier : "Boumediene tel que je l'ai connu". Dans ces chapitres, Bendjedid retrace, selon son point de vue, l'évolution de certaines situations ou évènements, comme notamment "le Congrès de la Soummam et la création de la Base de l'Est (1956-1958)", "le complot des colonels (1958-1959)", l'état-major général (EMG) ou le retour de l'espoir (1958-1959)", "le premier prisonnier après l'indépendance" et "le mouvement de redressement de juin 1965". Dans ce dernier chapitre, il consacre une partie à la "sédition de Chabani", où il dit : "Je me dois, ici, de revenir sur les faits et les conséquences de cette affaire parce que j'en fus un des acteurs principaux". Il voit dans cette dissidence "un vil complot dont fut victime un des officiers les plus honnêtes qu'ait connus l'Algérie". Dans ces mémoires, il retrace son parcours militaire, en tant que moudjahid qui a débuté en 1955 et se termine à l'indépendance en tant que membre de la zone Nord opérationnelle, après avoir été chef de région en 1956 et chef de zone (1958-1959). Chadli Bendjedid, qui dément avoir été dans l'armée française avant de rallier en 1955 l'Armée de libération nationale (ALN), relate sa rencontre en novembre 1956 avec le colonel Amirouche. "Je garde de lui l'image connue de tous : élancé, balèze, le regard pénétrant, emmitouflé dans sa kachabia bariolée et sa tête couverte d'un chèche", dit-il ajoutant : "Amirouche tenait fortement à l'unité des rangs au point qu'il n'eut de cesse de réconcilier les frères ennemis, aussi bien à la Wilaya I qu'en Tunisie". Il a salué, dans ses mémoires, "la sagesse de Mohand Oulhadj, qui mit un terme à sa rébellion en Kabylie pour se joindre aux forces des frontières engagées dans la bataille de l'intrus marocain (octobre 1963)" et le leader Mehdi Ben Barka "qui fut le seul homme politique marocain à condamner ouvertement et sans ambages les visées impérialistes du roi" et qui a qualifié l'agression de son pays contre l'Algérie de "trahison à la lutte des peuples maghrébins pour l'unité". L'auteur se considère le premier prisonnier de l'Algérie indépendante. De retour de Tripoli, après la réunion du CNRA (Conseil national de la révolution algérienne), Chadli raconte qu'il fut "arrêté" sur le territoire de la Wilaya II, "parce que les responsables du GPRA avaient dit à Boubnider (Responsable de la Wilaya II) que Chadli est le plus grand des perturbateurs. Son nom est parmi les premiers de la liste des officiers ayant signé la pétition dénigrant le GPRA et soutenant l'état-major général". Ce premier tome, édité en arabe et en français, sera suivi en mars prochain de l'édition du 2e et dernier tome, qui sera consacré à des "questions importantes et sensibles ayant marqué l'histoire récente de l'Algérie". L'auteur justifie sa décision d'écrire ses mémoires par "l'insistance d'un certain nombre de (ses) amis, parmi les fidèles moudjahidine" et par "les tentatives de certains de porter atteinte à (son) passé militant".