Les questions mémorielles dans les relations algéro-françaises ont été au centre du discours prononcé jeudi par le président français, François Hollande, devant les membres des deux chambre du Parlement algérien, reconnaissant, à cette occasion, le caractère "profondément injuste" d'un système colonial ayant infligé des souffrances pendant 132 ans aux Algériens. Le président Hollande a notamment déclaré, dans son discours, "reconnaître les souffrances infligées par la colonisation française à la population algérienne, affirmant que ce système a un nom : "c'est la colonisation". Parmi ces souffrances que le peuple algérien a endurées durant cette page noire de son histoire, le chef de l'Etat français a cité, plus particulièrement, les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata (8 mai 1945) qui demeurent, a-t-il dit, "ancrés dans la conscience des Algériens mais aussi des Français". M. Hollande a estimé, à ce propos, que la vérité, "doit être dite aussi sur les conditions dans lesquelles l'Algérie s'est délivrée du système colonial, sur cette guerre qui, longtemps, n'a pas dit son nom en France, la guerre d'Algérie". "Connaître, établir la vérité c'est une obligation, elle lie les Algériens et les Français. C'est pourquoi il est nécessaire que les historiens aient accès aux archives", a-t-il insisté. C'est la raison pour laquelle, le président français a plaidé pour une coopération dans ce domaine pour que cette vérité "puisse être connue de tous". Le président Hollande avait estimé, cependant, lors d'une conférence de presse qu'il a animée mercredi, au premier jour de sa visite en Algérie, que le passé "ne doit pas empêcher les deux pays de travailler pour l'avenir, (...) d'aller plus vite et plus loin". Le 17 octobre dernier, François Hollande avait affirmé que la République reconnaissait "avec lucidité" la "répression sanglante" qui s'était abattue sur les Algériens le 17 octobre 1961 à Paris, un geste, du reste, officiellement salué par Alger. Toutefois, de nombreux historiens pensent que le président français peut aller plus loin en annonçant officiellement une reconnaissance de la France de tous les crimes qu'elle avait commis contre le peuple algérien durant la période coloniale. Pour l'historien français, spécialiste de la guerre d'Algérie, Benjamin Stora, il y a, aujourd'hui, une nécessité "absolue" d'aborder la "nature répressive" du système colonial. "Il y a encore beaucoup de choses à dire, à faire sur la période de la colonisation, mais ce travail a déjà commencé, depuis de nombreuses années, par les historiens des deux rives, et surtout par les nouvelles générations de chercheurs qui dévoilent les vérités sur cette histoire", avait-t-il souligné. De son côté, Josette Audin, veuve du militant de la cause nationale Maurice Audin, avait plaidé pour une "condamnation ferme" de la France de l'assassinat de son époux en juin 1957 par les parachutistes, ainsi que de tous les crimes perpétrés en Algérie pendant la colonisation. "Il est temps, plus de cinquante ans après la fin de la guerre d'Algérie, que la vérité soit connue et reconnue", a-t-elle suggéré. Le président Hollande devra se recueillir, au deuxième jour de sa visite d'Etat en Algérie, devant la plaque commémorative de Maurice Audin, disparu en juin 1957 en plein Bataille d'Alger.