Des experts de l'ONU ont prévenu lundi qu'une crise mondiale de l'eau était imminente, appelant la communauté internationale à protéger et à gérer avec prudence cette ressource fragile et limitée. Dans une conférence de presse qu'ils ont donnée au siège de l'ONU à l'occasion de l'Année internationale de la coopération dans le domaine de l'eau célébrée en 2013, Mme Ana Persic, de l'UNESCO et coordonnatrice de cet événement mondial, et M. Paul Egerton, de l'Organisation météorologique mondiale (OMM), ont affirmé que l'un des objectifs de cette Année internationale était de faire prendre conscience à la communauté internationale de l'importance vitale de cette coopération pour la paix, la sécurité et la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Pour sa part, le Représentant permanent de la Hongrie auprès des Nations Unies et modérateur de la conférence de la presse, a rappelé qu'en 2020, 60% de la population mondiale vivra dans des zones urbaines dans lesquelles l'accès à l'eau potable et à l'assainissement représentera un défi considérable. ''Nous nous rapprochons doucement d'une crise de l'eau'', a alerté M. Csaba Korosi, en soulignant que la production alimentaire qui doit augmenter de 50% d'ici à 2030, mobilisera à elle seule 70% des ressources en eau. L'utilisation de l'eau, a-t-il préconisé, doit être de plus en plus au coeur de la coopération et de moins en moins au coeur des conflits. Pour sa part, Mme Persic a indiqué que 40% de la population mondiale vit au bord de rivières et de lacs communs à deux ou plusieurs pays et 90% de cette même population vivent dans des pays qui partagent des bassins hydriques. Si la question de l'eau a été à la source de 37 incidents entre pays depuis 1948, elle a aussi permis l'adoption de 295 accords internationaux, a-t-elle fait savoir. L'UNESCO, selon elle, a été choisie pour piloter l'Année internationale de la coopération dans le domaine de l'eau, non seulement pour son implication dans de nombreux projets de gestion de l'eau, mais aussi pour le caractère multidisciplinaire de son mandat couvrant à la fois l'éducation, la culture et la communication. M. Egerton a souligné, de son côté, que des efforts étaient urgents en raison de la rapidité des changements climatiques risquant de raréfier l'eau, des sécheresses et des inondations pouvant, en outre, altérer le développement des pays. Il a qualifié ''d'indispensable'' un consensus sur les stratégies liées à l'eau dans le contexte des objectifs de développement durable. Rappelant que la pénurie d'eau est à l'origine des migrations, des mouvements de réfugiés voire des violations des droits de l'homme, il s'est ditencouragé par le fait que le Conseil de sécurité ait inscrit à son ordre du jour la question du lien entre sécurité et climat tandis que l'OMM accueillera, du 11 au 15 mars prochain à Genève, une conférence de haut niveau sur les politiques liées à la sécheresse. Par ailleurs, le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a réaffirmé, à l'occasion de cette Année internationale, l'importance de l'accès à l'eau douce pour la santé, la sécurité alimentaire et les progrès économiques. ''L'eau est la clé du développement durable. Nous devons oeuvrer ensemble à protéger et gérer avec prudence cette ressource fragile et limitée'', selon lui. Le monde compte 276 bassins fluviaux avec au moins un affluent traversant une frontière internationale et près de 40% de la population mondiale vivent aux abords de ces bassins transfrontaliers, qui couvrent environ 46% de la surface émergée de la Terre, a-t-il précisé. Pour sa part, la sous-directrice générale pour les sciences exactes et naturelles de l'UNESCO, Gretchen Kalonji, a affirmé qu'il faudrait convaincre les secteurs alimentaire, hydraulique et énergétique de coopérer au lieu d'agir sans se consulter. ''Cela exigera des institutions solides, tant au niveau national qu'international, pour répondre aux demandes concurrentielles et désamorcer les tensions, comme par exemple dans les cas d'extraction de gaz de schiste, d'irrigation intensive ou d'édification de barrages'', a-t-elle poursuivi. ''Actuellement, ces différents groupes ne travaillent pas ensemble, ou pas de manière conjointe. Les efforts doivent donc se concentrer sur leur rapprochement et l'élaboration d'une approche plus globale et mieux intégrée de la gestion de l'eau. C'est là la clé qui manque pour faire de l'accès à l'eau douce une réalité pour tous'', a-t-elle ajouté. Précisant que des milliards de personnes restent vulnérables à la pénurie d'eau, à la détérioration de la qualité de l'eau et à d'autres catastrophes comme les inondations et les sécheresses, elle a observé que les femmes, enfants et personnes vivant dans la pauvreté sont évidemment les plus vulnérables. Comme cela est spécifié dans le rapport 2012 sur les OMD, les femmes sont les plus touchées par les pénuries d'eau : En Afrique sub-saharienne, 71% de la charge de collecte de l'eau est dévolue aux femmes et aux filles. 2013 a été proclamée Année internationale de la coopération dans le domaine de l'eau par l'Assemblée générale des Nations Unies en 2010, sur proposition du Tadjikistan.