Les députés et sénateurs pakistanais élisent mardi le successeur du président Asif Ali Zardari dans un scrutin marqué par le boycott du Parti du peuple pakistanais (PPP), qui est passé dans l'opposition après sa défaite aux dernières législatives. Le résultat de ce scrutin est attendu dans la soirée. Au Pakistan, le président n'est pas élu au suffrage populaire mais par un comité restreint formé des membres des deux chambres du parlement et des quatre assemblées provinciales. La fonction présidentielle est devenue presque symbolique dans ce pays depuis un amendement constitutionnel de 2010, qui avait transféré une partie des pouvoirs du président à la chambre basse, et donc renforcer les prérogatives du Premier ministre. Au pouvoir depuis 2008, le président sortant et chef de file PPP, M. Zardari, veuf de la seule femme Premier ministre de l'histoire du pays, Benazir Bhutto, assassinée en décembre 2007, avait déjà affirmé qu'il ne serait pas candidat à sa succession. Initialement prévue le 6 août, la présidentielle pakistanaise a été avancée au mardi 30 juillet par la Cour Suprême, une décision critiquée par le PPP, qui a perdu les législatives de mai dernier, remportées par La Ligue musulmane (PML-N) de M. Sharif. — Deux candidats en lice pour le scrutin— Frustré par la décision de la Justice, le PPP, aujourd'hui la principale formation d'opposition, a annoncé le boycott de cette présidentielle. "La Cour suprême ne nous a pas avertis et ne nous a pas donné la chance de lui présenter notre point de vue avant de prendre cette décision unilatérale", avait dénoncé vendredi le sénateur Raza Rabbani, du PPP. "Nous n'avons donc pas d'autres choix que de boycotter ce scrutin", a-t-il ajouté, soutenant que le candidat de la formation à la présidentielle n'aurait pas le temps de faire le tour du pays pour convaincre les députés de voter pour lui d'ici le scrutin de mardi. Après ce boycott, le désistement de certains candidats et le rejet de quelques candidatures, deux postulants seulement restent en lice pour le titre de président du Pakistan. Il s'agit de Mamnoon Hussain, un cacique de la PML-N ayant fait fortune dans le textile et été brièvement gouverneur de la province méridionale du Sind en 1999. Il affrontera Wajihuddin Ahmed, un ex-juge de la Cour suprême à la retraite qui défend les couleurs du Tehreek-e-Insaf (PTI), formation ascendante de l'ex-gloire du cricket Imran Khan. Lors des dernières législatives, le PTI était arrivé en troisième position sur l'échiquier politique, derrière la PML-N et le PPP, mais n'a pratiquement aucune chance, selon des analystes, de remporter la présidentielle de mardi tant les appuis de la PML-N sont importants. — Le futur président face à des défis colossaux— Le successeur de Zardari sera confronté à d'énormes défis, le pays étant actuellement en proie à une crise énergétique sans précédent, qui irrite sa population et freine sa croissance économique. Sur le plan sécuritaire, le Pakistan est secoué par des attentats à répétition menés par les insurgés talibans du TTP. La dernière attaque en date a eu lieu vendredi et a visé un marché fréquenté des zones tribales du nord-ouest du pays. L'attentat avait fait 51 morts. L'épineux dossier du retrait des forces de l'Otan en Afghanistan voisin et ses conséquences sur la stabilité régionale figure aussi parmi les tâches qui attendent le nouveau président du Pakistan. Le président Zardari doit normalement abandonner ses fonctions à la fin de son mandat, début septembre, et les analystes s'attendent à ce qu'il passe la plus grande partie de son temps à l'extérieur du Pakistan en raison de menaces contre lui — le chef de sa garde personnelle a d'ailleurs été tué ce mois-ci dans un attentat ciblé à Karachi (sud)—, et pour échapper à d'éventuelles accusations de corruption.