La crise politique en Tunisie continuait jeudi de s'aggraver avec la menace de l'opposition d'annuler ses pourparlers avec le gouvernement qu'elle appelle à la démission, et ce, dans un climat sécuritaire critique après la mort de six gendarmes dans des combats avec un groupe armé extrémiste. Les forces de l'opposition laïque tunisienne ont décidé de suspendre leur participation au dialogue national, qui a été reporté à vendredi, en exigeant "un engagement écrit et formel" du gouvernement à démissionner. Le Front populaire décide la suspension de sa participation au dialogue national en attendant "un engagement clair et explicite sur la démission du gouvernement", sur la base de la Feuille de route, a indiqué un cadre dirigeant de l'opposition cité par l'agence officielle TAP. "Nidaa Tounès (un important parti d'opposition) considère que la reprise du dialogue n'est pas faisable (...) sans un engagement formel et écrit du gouvernement à démissionner", a estimé ce parti, dirigé par l'ex-Premier ministre post-révolutionaire Béji Caïd Essebsi. L'opposition réclame que le gouvernement, dirigé par le parti Ennahda, s'engage à démissionner dans les trois semaines suivant le lancement des négociations pour laisser la place à un cabinet d'indépendants. Ces pourparlers, prévus à l'origine mercredi, ont été reportés à vendredi matin, les détracteurs du pouvoir jugeant que le Premier ministre Ali Larayedh n'avait pas répondu à leur condition en n'annonçant qu'un "engagement sur le principe de renoncer au gouvernement" sans évoquer de calendrier. Ils sont prévus à 09H00 GMT, selon le syndicat UGTT, principal médiateur de la crise et organisateur des négociations. Outre la mise en place d'un cabinet apolitique, ces négociations, sans cesse reportées, doivent aboutir à l'adoption de la Constitution, en cours d'élaboration depuis deux ans, la rédaction d'une loi électorale et des dates pour les prochains scrutins. Le gouvernement est entraîné depuis trois mois dans une grave crise politique notamment après l'assassinat d'un opposant dans une profonde crise politique nourrie par l'essor des groupes extrémistes armés. Un climat sécuritaire critique Le climat était d'autant plus tendu que la Tunisie observait un deuil national de trois jours après la mort de six gendarmes dans une nouvelle attaque attribuée à groupe extrémiste armé. Beaucoup de régions en Tunisie ont exprimé leur colère par des grèves, des protestations et même des actes de violence. Au Kef (centre), dans la matinée, une foule de manifestants a saccagé et incendié le local d'Ennahda sans que la police n'intervienne, avant de brûler dans la rue le contenu de ces bureaux. Dans cette même ville, une foule monstre a participé dans l'après-midi aux obsèques d'un officier de gendarmerie tué la veille avec cinq camarades dans un affrontement avec un groupe armé. A Sidi-Bouzid comme à Kasserine (centre-ouest), l'ensemble des institutions publiques et les écoles étaient fermées à la suite d'un appel à la grève générale des antennes de l'UGTT. A Kasserine, ville située au pied du mont Chaambi où l'armée pourchasse depuis des mois un groupe terroriste lié à Al-Qaïda, des manifestants brûlaient des pneus dans les rues. Enfin, à Menzel Bourguiba (nord) où un policier a été tué mercredi soir dans un incident séparé attribué aussi à des extrémistes, onze militants salafistes ont été arrêtés, a indiqué le ministère de l'Intérieur.