L'Assemblée nationale constituante tunisienne (ANC) est appelée à voter ce dimanche la Loi fondamentale du pays dans un contexte marqué par des désaccords quant à la formation d'un gouvernement d'indépendants, censé sortir la Tunisie de la profonde crise politique qu'elle traverse. L'adoption de la nouvelle Constitution, élaborée après plus de deux ans de travaux, est qualifiée d'"étape importante" de la transition pour faciliter notamment l'organisation, courant 2014, des élections législatives et présidentielles, trois ans après la chute du régime de Zine El-Abidine Ben Ali. Les députés ont déjà approuvé article par article le projet de Constitution entre le 3 et le 23 octobre dernier. La séance de l'Assemblée nationale constituante, prévue à l'origine pour la matinée a été cependant reportée à dimanche après-midi, selon la députée Karima Souid, assesseur de la présidence de la Constituante chargée de l'Information. "Le report de la séance, initialement prévue dimanche matin, intervient à la suite du conflit autour de l'amendement de l'article 19 de la loi constitutive portant organisation provisoire des pouvoirs publics", a-t-elle précisé à l'agence de presse tunisienne, TAP. Selon l'article 19, adopté samedi en soirée, le retrait de confiance au gouvernement est voté à la majorité des 3/5 des membres de l'ANC et le retrait de confiance à un ministre ou plus n'est possible qu'à la majorité absolue (50+1). Le projet de Constitution devrait recueillir la majorité nécessaire des deux tiers des 217 élus, des compromis assez larges ayant été négociés pour permettre son adoption. En cas d'échec, une seconde lecture devra avoir lieu. Si elle échoue aussi, le projet sera soumis au référendum. Un gouvernement apolitique tarde à voir le jour Au moment où le pays s'apprête à se doter d'une nouvelle Constitution, l'annonce tant attendue de la formation d'un gouvernement d'indépendants, prévue samedi, n'a pas eu lieu, le ministre sortant de l'Industrie, Mehdi Jomaâ, chargé de former ce cabinet expliquant ne pas avoir réussi à constituer une équipe faisant le consensus. "Je suis venu (à la présidence) pour présenter la liste, mais j'ai choisi de ne pas le faire aujourd'hui pour aboutir à un consensus", a-t-il déclaré dans la nuit de samedi à dimanche. "Nous ne sommes pas loin de la solution, nous continuons encore les concertations", a assuré M. Jomaâ qui avait été choisi en décembre par la classe politique pour diriger le prochain gouvernement et formellement nommé le 10 janvier. "Peut-être que je serai chargé (de nouveau de former un cabinet), peut-être que ce sera une autre personne", a-t-il ajouté. Selon la législation en vigueur, "en cas d'échec de la formation du gouvernement (...) le président de la République, après concertation avec les partis, les coalitions et les groupes de l'Assemblée, désigne la personnalité la plus apte de former un gouvernement". Dans l'intervalle, le Premier ministre sortant, Ali Larayedh, reste en charge des affaires courantes. Ce retard dans la formation de ce cabinet est dû, selon des médias et politiques tunisiens, à des divergences autour de l'identité du ministre de l'Intérieur. Certaines forces dont celle de Mehdi Jomaâ, militaient pour le maintien de Lotfi Ben Jeddou, en poste depuis mars 2013, d'autres estimaient qu'il devait quitter ses fonctions car il a servi dans l'équipe sortante, dirigée par Ennahda, et qu'il était en poste lors de l'assassinat du député de l'opposition, Mohamed Brahmi, un événement qui avait plongé le pays dans une grave crise politique. Pour le président du bureau politique du Mouvement Ennahdha, Ameur Larayedh, cité par la TAP, toute partie a le droit de s'opposer à la reconduction de Ben Jeddou, mais le dernier mot revient au chef du gouvernement et à l'ANC qui va voter la confiance à ce gouvernement.