Un questionnement sur les tabous entourant le corps féminin dans la société tunisienne et toutes autres sociétés similaires, a été proposé à travers la projection, jeudi soir à Alger, du long métrage "Challat de Tunis" de la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania. D'une durée de 85 mn, ce faux documentaire à la limite entre la fiction et le documentaire a été présenté en avant- première au Maghreb en compétition officielle du 2e Festival d'Alger du cinéma Maghrébin qui se tient depuis mercredi. S'appuyant sur un fait divers datant de onze ans, le film enquête sur une légende urbaine commune à plusieurs pays arabes, le "Challat" un homme mystérieux qui balafre le postérieur des femmes de Tunis qu'il juge habillées à l'occidentale. La première partie du film, la plus intéressantes aux yeux des spectateurs reste la recherche de cet individu libéré de prison, la réalisatrice et son cameraman sillonne les rues et les quartiers populaires de Tunis à sa recherche et organisent même un casting pour jouer le rôle du "Challat" dans un film. Ces entretiens avec la population puis le casting renseignent sur les mentalités dominantes en milieux populaires et qui parfois donnent même raison à ce criminel qui a instauré une psychose pendant quelques temps à Tunis et lui trouvent des justificatifs. Dans une société en pleine effervescence après la chute du régime de Zine El Abidine Ben Ali en 2011, le corps de la femme semblait, à travers ce film, redevenir un enjeu important remettant en cause tout les acquis tunisiens en matière de droit de la femme. Avec l'apparition de Jalel Dridi, le "Challat présumé", le film vire vers la fiction suivant le criminel chez lui en explorant ses frustrations et ses délires poussant le ridicule à acheter un appareil pour vérifier la virginité de sa petite amie ou à sponsoriser un jeu vidéo et des T-shirts à son effigie. A la fin du film Jalel se révèle être un imposteur qui avait été arrêté dans cette affaire puis innocenté par la justice, et l'exagération de la légende urbaine est aussi mise en avant par la réalisatrice qui a retrouvé et interrogé deux véritables victimes. Même si le thème a déjà été abordé sous toutes ses coutures dans le cinéma des pays arabes, cette £uvre a quand même été appréciée par les spectateurs qui y voient une manière singulière et comique de l'aborder. Inauguré mercredi, le 2e Festival d'Alger du cinéma maghrébin se poursuivra jusqu'au 11 juin à la salle El Mouggar et à la cinémathèque d'Alger avec 38 œuvres maghrébines en compétition dans trois catégories.