En attendant l'action publique, le rideau est tombé jeudi dans l'affaire de l'autoroute est-ouest, qui a éclaté en 2009, après un procès ''non stop'' mené par le juge Hellali Tayeb, qui a prononcé un verdict allant de l'acquittement à dix ans de prison ferme. Quinze personnes et sept entreprises étrangères étaient dans le box des accusés dans ce procès qui a duré huit jours, après deux reports et une tentative de la défense de le requalifier, en 2014, en correctionnelle. Peine perdue, puisque cette demande de la défense sera refusée par la Cour suprême qui a confirmé que cette affaire devait être traitée par le tribunal criminel d'Alger. Après donc deux reports, le procès a débuté dimanche 30 avril avec la mise en place du cérémonial traditionnel à un tribunal criminel: présence des accusés, en liberté provisoire et en détention, présence des témoins, constitution du jury et lecture des 250 pages de l'arrêt de renvoi. Le procès se poursuivra jusqu'à dimanche 3 mai, avec la dernière plaidoirie au menu, celle du défenseur du principal accusé, Chani Madjdoub. Auparavant, le représentant du ministère public avait requis de lourdes peines de prison, notamment contre Chani et Khelladi (20 ans de prison). Durant les huit jours de ce procès, qui s'est déroulé sur un air de scandale financier, un des accusés, Adou Tedj Eddine étant cité dans l'affaire Swissleaks, tous les accusés sont passés à la barre et ont été aussi bien entendus qu'interrogés par le président du tribunal sur le degré de leur implication dans cette affaire. Dans l'arrêt de renvoi du dossier, dans lequel deux secteurs, les transports et les travaux publics sont concernés, plusieurs ministres ont été cités, dont l'actuel ministre des transports, M. Amar Ghoul, à l'époque des faits chargé du département des travaux publics, qui a répondu par écrit à des questions que lui avait transmis le président du tribunal. Dans son réquisitoire, le représentant du ministère public avait relevé l'extrême gravité de cette affaire de corruption à grande échelle qui touche l'économie nationale. "Cette affaire de corruption touchant le projet de l'autoroute est-ouest ainsi que d'autres projets de transport en Algérie a terni la réputation économique du pays ", avait-t-il martelé. Jeudi, dans une salle envahie dés l'ouverture du tribunal par une meute de journalistes, dont des représentants de chaînes TV étrangères, des magistrats, des avocats et de simples citoyens, l'atmosphère était très tendue. Tout le monde retenait son souffle quant au verdict final. D'autant que l'annonce de la détention le jour même du verdict de Adou Sid Ahmed et Allab El Khier, qui sont passés en quelques minutes de prévenus en état de liberté provisoire à détenus, a donné le ''tempo'' de ce que devait être la sentence finale de ce procès. Chani Medjdoub, qui avait été condamné par le représentant du ministère public à 20 ans de prison ajoute, par l'annonce de sa décision de mener une ''grève de la faim quel que soit le verdict'' de ce procès, un peu plus de tension dans le camp des familles des accusés. Rideau! C'est peu avant 12 heurs locales que le président du tribunal criminel d'Alger entre dans la salle. Tout le monde retient son souffle. Et puis le verdict. Acquittement, prison et amendes seront les ingrédients de ce verdict, qui verra l'ex-SG du ministère des travaux publics Mohamed Bouchama acquitté, alors qu'il était en détention depuis 2009. Pour cette affaire dans laquelle 15 prévenus et sept entreprises étrangères étaient présents au procès, hormis le 16eme accusé Kouider Tayeb en fuite, la sentence sera l'acquittement à 10 ans de prison. Chani et Khelladi écoperont chacun de 10 ans de prison, d'une amende de plusieurs millions de dinars et la saisie de leurs biens et avoirs. Les sept entreprises étrangères (Citic Crcc- Chine, Cojaal- Japon, Pizarroti-Suisse, Caraventa-Suisse, Isolux Corsan- Espagne, SMInc-Canada et COBA-Portugal) ont été quant à elles condamnées, en tant que personnes morales, à payer au trésor public cinq millions de dinars chacune. Le procès s'est tenu en présence de l'ensemble des collectifs de la défense des 15 personnes et sept entreprises étrangères impliquées dans cette affaire, ainsi que 15 témoins sur les 27 (un témoin étant décédé) mentionnés dans l'arrêt de renvoi. En 2006, le marché pour la réalisation de l'autoroute Est-ouest a été attribué au groupe chinois "CITIC-CRCC", avec un coût de 6 milliards de dollars. Le projet s'étend sur 1.700 km avec un coût qualifié d'exorbitant par des experts de huit millions d'euros le kilomètre dont 1300 km destinés à la construction de 400 échangeurs, des rocades, des viaducs, 400 ouvrages d'art, 17 trémies et 350 aires de repos. Mais, de réévaluation en réévaluation, le projet a coûté 13 milliards de dollars, selon le ministre des travaux publics, Abdelkader Kadi.