En 2015, le Yémen a basculé dans le chaos. Les rebelles chiites Houthis (Ansarullah) contrôlent toujours la capitale Sanaa et résistent à la machine de guerre de la coalition arabe dans un conflit dévastateur. Un conflit aggravé par les difficultés rencontrées par l'émissaire de l'ONU a lancer des négociations de paix, sollicitant le soutien du Conseil de sécurité pour "un cessez-le-feu durable et complet". Le "coup d'Etat" mené par les Houthis en septembre 2014 dans la capitale Sanaa a marqué le début d'une campagne militaire, qui avait amené les rebelles jusqu'à la grande ville d'Aden dans le sud du pays et forcé le président Abd Rabo Mansour Hadi et son gouvernement à s'exiler. Cela fait plus de dix ans que des rebelles chiites combattent le gouvernement central sunnite du Yémen pour des questions à la fois religieuses, économiques et sociales. Avec ce qui est appelé le "Printemps arabe", le Yémen a entamé une transition démocratique après le départ du président Ali Abdallah Saleh début 2012 sous la pression de la rue. Mais tout a changé lorsque le nouveau chef de l'Etat a lancé, en 2013, un processus de dialogue national afin d'élaborer une nouvelle Constitution et préparer des élections pour 2014. Ces discussions ont abouti notamment à la proposition de faire du Yémen un +Etat fédéral+, afin de satisfaire les revendications des habitants du sud du pays, qui s'estiment lésés. Mais le projet envisage d'accorder aux Zaydites, une communauté chiite dont sont issus les Houthis, un territoire sans accès à la mer. Cela, ajouté à l'apparente incapacité du gouvernement à résoudre les problèmes économiques et sociaux du pays, ont conduit les Houthis à déclencher un soulèvement contre le pouvoir qui s'est traduit par la prise, en janvier 2015, du palais présidentiel Forcé de collaborer dans un premier temps, le président Hadi a fini par fuir la capitale, le 21 février pour se réfugier à Aden. Quant aux Houthis venus du Nord, ils ont dû reculer face aux raids de la coalition arabe dirigée par l'Arabie saoudite qui a, depuis le début de ses opérations en mars 2015, bombardé leurs positions à travers le pays, tout en fournissant un soutien logistique aux forces gouvernementales afin d'empêcher les rebelles, dits aussi Ansarullah, de s'emparer de l'ensemble du pays. Le premier résultat tangible de cette offensive appelée "Tempête décisive" est la reprise, à la mi-juillet par les troupes loyalistes, du contrôle de la ville portuaire stratégique d'Aden, déclarée capitale "provisoire" du Yémen ainsi que cinq provinces du pays. Sanaa, prochain objectif du gouvernement La reprise d'Aden est considérée comme un pas important pour le président Hadi et son Premier ministre Khaled Bahah qui, après des mois d'exil en Arabie saoudite, sont rentrés à la mi-novembre dans cette ville pour l'"exercice de leurs fonctions à l'intérieur du territoire yéménite". Mais cela reste insuffisant pour ramener la paix et la stabilité dans ce pays. Une fin rapide aux combats, et le retour du Yémen à une transition politique "pacifique et ordonnée", ne se réaliseront qu'après la reconquête de Sanaa qui risque, elle, d'être plus difficile, a-t-on estimé. Après la reconquête d'Aden, la coalition a sorti les grands moyens pour arracher Sanaa aux Houthis et le nord du Yémen. En effet, après avoir misé au départ sur une campagne de raids aériens, plusieurs pays arabes du Golfe (Arabie saoudite, Qatar et Emirats arabes unis) ont opté pour la solution terrestre. La bataille de Sanaa "sera sanglante", a prévenu dans ce contexte Mme April Longley, spécialiste du Yémen au sein de l'International Crisis Group (ICG). "Le pays se prépare à une nouvelle phase plus meurtrière", a-t-elle affirmé. Dialogue interyéménite... après une année noire sur le plan humain Les Yéménites ont payé un lourd tribut durant l'année 2015 du fait des combats acharnés entre les parties rivales et des raids de la coalition arabe qui ont fait depuis mars au moins 6.000 morts, pour près de moitié des civils, selon les estimations de l'ONU. L'ONU dresse ainsi un bilan humanitaire désastreux: Les civils continuent de faire face à une situation humanitaire qui se détériore et subissent les conséquences du mépris flagrant des parties pour les lois de la guerre. Plus de 21 millions de personnes ont besoin d'une assistance humanitaire dans le pays, soit 80% de la population. Environ 20 millions de personnes n'ont pas accès à l'eau potable et le nombre d'enfants souffrant de malnutrition sévère dépasse les 500.000, selon le dernier rapport du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA). Devant l'ampleur de cette catastrophe, l'ONU n'a épargné aucun effort, depuis le début du conflit yéménite et surtout durant l'année en cours, et a réussi enfin à réunir, en Suisse, les parties en conflit par le biais de son envoyé spécial Ismail Ould Cheikh Ahmed, parallèlement à l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu. Mais pour le moment, aucune avancée n'a été enregistrée: la trêve est quotidiennement violée et les négociations semblent de plus en plus compliquées. Davantage d'efforts de la communauté internationale sont donc nécessaires pour trouver une solution politique au Yémen et mettre fin au chaos dans ce pays qui profite aux groupes terroristes, Daech et al-Qaïda en tête.