Le gouvernement turc opère une vaste opération de reprise en mains de la situation après l'échec du coup d'Etat orchestré par un groupe de militaires, afin de "préserver la cohésion du pays dans le respect de l'Etat de droit", et demande l'extradition du prédicateur Fethullah Gülen accusé d'être lié à la tentative de putsch . Le Premier ministre turc Binali Yildirim a rejeté mardi tout "esprit de vengeance" à l'encontre des putschistes qui ont tenté de s'emparer du pouvoir vendredi soir, appelant à respecter l'Etat de droit. "Personne ne peut être dans un esprit de vengeance (...) une telle chose est absolument inacceptable dans l'Etat de droit", a déclaré M. Yildirim lors d'une allocution à Ankara. "Aujourd'hui, nous avons besoin d'unité", a ajouté M. Yildirim à l'issue d'une rencontre avec le chef du principal parti d'opposition. "J'ai exprimé mon inquiétude au Premier ministre. En particulier, je pense que les actes violents commis envers des soldats qui n'ont fait qu'obéir aux ordres sont injustes", a pour sa part déclaré Kemal Kiliçdaroglu, chef du Parti républicain du peuple (CHP), le principal parti d'opposition. Toutefois, le président turc Recep Tayyip Erdogan a fait savoir lundi qu'il accepterait la réintroduction de la peine de mort si le Parlement turc le décidait au moment où les responsables européens s'opposent à cette éventualité en brandissant le spectre de la compromission des négociations d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne (UE). Depuis Marmaris (ouest) où il était en vacances, M. Erdogan avait immédiatement appelé la population à s'opposer au putsch, dans une intervention en direct à la télévision depuis un téléphone portable. "Il y a en Turquie un gouvernement et un président élus par le peuple" et "si Dieu le veut, nous allons surmonter cette épreuve", avait-il lancé. L'"écrasante majorité" de l'armée turque n'a "rien à voir" avec la tentative de putsch qui s'est déroulée dans la nuit de vendredi à samedi, a assuré mardi l'état-major dans un communiqué. Les militaires ayant pris part à cette "vilénie" seront "sanctionnés de la manière la plus lourde", a ajouté le communiqué. De nombreux hauts responsables militaires s'étaient désolidarisés publiquement des putschistes dans la nuit, dénonçant "un acte illégal" et appelant les mutins à regagner leurs casernes. - Ankara envoyé des "dossiers" à Washington sur une implication de Gülen Le Premier ministre turc a affirmé mardi que son gouvernement avait envoyé des dossiers aux Etats-Unis pour demander l'extradition du prédicateur Fethullah Gülen accusé d'être lié à la tentative de putsch. "Nous avons envoyé quatre dossiers aux Etats-Unis pour (demander) l'extradition du terroriste-en-chef", a déclaré M. Yildirim au Parlement. "Nous leur présenterons plus de preuves qu'ils n'en veulent". "Je vous le dis: ne protégez pas davantage ce traître, ce terroriste-en-chef", a lancé le chef du gouvernement turc. Les autorités turques accusent M. Gülen, un ancien allié du président Recep Tayyip Erdogan qui est devenu hostile à son pouvoir, d'être l'instigateur de la tentative de coup d'Etat menée dans la nuit de vendredi à samedi. Le prédicateur, exilé aux Etats-Unis depuis 1999 et vivant aujourd'hui en Pennsylvanie (nord-est des Etats-Unis), nie ces accusations. Le Premier ministre turc a cependant affirmé mardi: "Nous n'avons pas le moindre doute au sujet de qui a mis en œuvre et exécuté" le putsch avorté, pointant du doigt l'"organisation terroriste parallèle", expression désignant le réseau de M. Gülen. Ce dernier est à la tête d'un mouvement appelé "Hizmet" ("service", en turc), qui compte un gigantesque réseau d'écoles, d'ONG et d'entreprises et est très influent dans les médias, la police et la magistrature.