Le leader de la contestation populaire dans le nord du Maroc, Nasser Zefzafi, a comparu lundi devant le juge d'inStruction à Casablanca sur la base d'une lourde liste d'accusations, étape préalable à son procès qui n'aura pas lieu avant la fin du mois. Sujet à de lourdes accusations, le leader du mouvement "hirak" qui mène la contestation populaire au Rif marocain, Zefzafi, est passé en milieu de matinée devant les juges de la chambre criminelle de la Cour d'appel de Casablanca, selon des médias. Cette comparution intervient sur fond d'appels des organisations des droits de l'Homme et d'ONG internationales à la libération par les autorités marocaines de tous les "prisonniers politiques" et à la fin de la répression féroce menée par le pouvoir à Rabat contre sa propre population. La liste des charges retenues contre Zefzafi comprend, entre autres: "atteinte à la sécurité de l'Etat, tentative d'homicide volontaire et trouble à l'ordre public". La justice marocaine lui reproche également d'avoir reçu 3000 dirhams (près de 300 euros). Avec ces lourdes accusations il risque des dizaines d'années de prison qui peuvent aller jusqu'à la perpétuité, selon les médias. L'accusé est emprisonné depuis la fin mai pour avoir interrompu le prêche d'un imam dans sa ville d'Al-Hoceïma dans le nord du Maroc. Pour rappel, la mort atroce d'un poissonnier dans un camion-benne au mois d'octobre dernier à Al-Hoceima alors qu'il voulait sauver sa marchandise saisie de la destruction, avait mis le feu aux poudres dans une région marginalisée, manquant de tout. Depuis cet évènement tragique, Zefzafi, un chômeur de 39 ans, menait le mouvement revendicatif soci-économique. Ainsi, la ville d'Al-Hoceïma et la localité voisine d'Imzouren ont connu depuis plusieurs mois des manifestations pacifiques, rassemblant parfois des milliers de personnes, pour réclamer le développement d'une région exclue des programmes de développement. Dans la foulée de l'arrestation de Zefzafi, la totalité des leaders et figures connues du "hirak" ont été interpellés. Les heurts se sont également multipliés, les policiers tentant tous les soirs d'empêcher ou de disperser les rassemblements de soutien aux prisonniers du "hirak". En pararallèle, un autre leader du Hirak, El Mortada Lamrache, (poursuivi en état de liberté) a té présenté pour la première fois devant le juge d'unstruction du Tribunal de Sale pour apologie du terrorisme. Sa première audience s'est déroulée lundi. Au total, 176 personnes, selon un dernier bilan officiel, ont été placées en détention préventive. Pas moins de 120 personnes sont en cours de jugement, passibles de sévères condamnations allant jusqu'à 20 mois de prison. Dans ce contexte, une manifestation de soutien à la jeune femme de quelques dizaines de personnes a été viollemment dispersée à Rabat. Plusieurs personnalités de défense des droits de l'Homme et des manifestantes ont été frappées par les policiers, selon des images qui ont fait le tour des médias locaux. La politique de répression adoptée par les autorités marocaines notamment à l'égard des prisonniers a été vivement critiquée par une partie de la classe politique, exigeant la remise en liberté de Zefzafi et ses co-détenus, dont la cause était "pacifique" et les revendications "économiques et sociales". Et le débat fait toujours rage sur les suspicions de tortures et de mauvais traitements qu'auraient subi certains détenus, selon leurs proches. La semaine dernière, des fuites dans la presse d'un rapport du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH), un organisme officiel, ont été transmises à la justice. Ces expertises médicales ont été catégoriquement démenties par la police marocaine. Dimanche, un "comité des familles des détenus" a demandé l'ouverture d'un enquête sur ces allégations de mauvais traitements, et a de nouveau appelé à la libération des détenus, en premier lieu de la jeune Sylia Ziani "dont l'état de santé s'est détérioré".