L'ancien président français Nicolas Sarkozy a été mardi en garde à vue dans les locaux de la police judiciaire à Nanterre (banlieue de Paris) et pourra être mis en examen dans le cadre de l'enquête sur le financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007. C'était le journal électronique Médiapart qui avait révélé en 2012, sur la base d'un document libyen, le financement de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy par le colonel Maammar el Gueddafi donnant ainsi à l'ouverture d'une information judiciaire en avril 2013. Après plusieurs révélations et un ouvrage de deux journalistes, Fabrice Arfi et Karl Laske, qui lève tout doute sur le financement par Maâmmar el Gueddafi, assassiné le 20 octobre 2011 à Syrte, c'est pour la première fois que l'ancien président français est entendu dans cette affaire qui a connu depuis plusieurs épisodes, dont le dernier est l'arrestation à Londres d'Alexandre Djouhri qui a joué le rôle d'intermédiaire. L'enquête en France a été confiée à plusieurs juges d'instruction du pôle financier de Paris, dont le juge Serge Touraine qui a déjà renvoyé Sarkozy devant le tribunal pour l'affaire Bygmalion, une autre affaire politico-financière française. Durant la campagne présidentielle de 2012, l'agence de communication Bygmalion a (sur)facturé ses prestations pour 18 millions d'euros au parti de Sarkozy, l'UMP, dont certaines sommes n'avaient jamais eu lieu, soulevant ainsi l'interrogation de la justice sur l'utilisation de cet argent. Une instruction s'est déroulée entre 2014 et 2016 et s'est terminée par le renvoi en correctionnelle de 14 personnes, dont Nicolas Sarkozy. Pour l'affaire du financement libyen, l'ancien président français a été placé en garde à vue qui peut durer quarante-huit heures et pourra, par la suite, être présenté aux juges afin d'être mis en examen. Les informations publiés par Médiapart avaient fait état, sur la base du journal personnel de l'ancien Premier ministre libyen, Choukri Ghanem, retrouvé noyé à Vienne, dans lequel ce dernier parle d'une somme de 1,5 million d'euros à Sarkozy et d'une autre envoyée par Saïf el-Islam, fils d'el Gueddafi, de 3 millions d'euros. Le beau-frère d'el Gueddafi, Abdellah Senoussi a également envoyé à Sarkozy 2 millions d'euros. Ziad Takieddine et Alexandre Djouhri étaient chargés d'acheminer ces sommes pour les remettre à destination. Une note signée par le chef des services libyens, Moussa Koussa faisait état d'un accord de principe pour verser 50 millions d'euros en soutien à la campagne de Nicolas Sarkozy, mais sur cette somme promise, selon les auteurs de l'ouvrage "Avec les compliments du Guide", (Fayard, 2017), 20 millions auraient été donnés directement à Boris Boillon et à Claude Guéant en espèces, citant un ancien cadre libyen qui a témoigné devant la police. Ziad Takieddine avait révélé, dans une vidéo publiée le 15 novembre 2017, qu'il a "personnellement" remis à Claude Guéant, l'ancien directeur du cabinet du ministre de l'Intérieur, et à Nicolas Sarkozy, ministre de l'Intérieur alors, plusieurs valises contenant de l'argent liquide, préparées par le régime libyen, pour un montant total de 5 millions d'euros, précisant qu'à deux reprises il les avait remises à Claude Guéant, dans son bureau, puis une troisième fois, en janvier 2007, à Nicolas Sarkozy en personne, dans l'appartement privé du ministre de l'Intérieur.