SUR-SEINE (Ile-de-France)- La militante française de la cause sahraouie, Claude Mangin, plus que jamais déterminée, a entamé mercredi sa deuxième semaine de grève de la faim illimitée revendiquant sans relâche son droit de rendre visite à son époux, le militant sahraoui Naâma Asfari, détenu politique au Maroc. Claude Mangin, rappelle-t-on, a été empêchée mardi dernier par les autorités marocaines de rendre visite à Naâma Asfari, et expulsée pour la quatrième fois en deux ans. Lors d'une conférence de presse, organisée à la mairie d'Ivry-sur-Seine, Claude Mangin, qui s'était habituée à jeûner pendant huit jours en solidarité avec son époux, s'est montrée quelque peu sceptique quant à sa capacité physique d'observer cette grève de la faim jusqu'à la satisfaction de sa revendication "légitime", garantie par la Convention de Genève en matière de droit humanitaire que le Maroc, a-t-elle dit, en est signataire. "Je remercie le maire d'Ivry-sur-Seine qui a aménagé à la mairie un espace pour moi. Je suis suivie quotidiennement par un médecin", a-t-elle dit aux journalistes présents, précisant qu'elle commence à sentir une fièvre. Par ailleurs, elle a indiqué qu'elle a envoyé mercredi une lettre au président Emmanuel Macron afin qu'il intervienne, sur le plan humanitaire, auprès des autorités marocaines pour l'autoriser à se rendre au Maroc. Au cours de la conférence de presse, Claude Mangin a lu une lettre envoyée par Naâma Asfari, condamné à 30 ans de prison, qui a salué son courage. "Ton acte n'est pas une vengeance coûte que coûte mais un appel à la réconciliation", a-t-il notamment écrit. Le maire Philippe Bouyssou a souligné, lors de la conférence de presse, que "nous avons conscience de la gravité de notre engagement en soutenant la grève de la faim illimité de Claude Mangin", relevant que c'est "une première" dans la commune. "Notre seul objectif est que Claude puisse rendre visite librement et le plus vite possible à son mari", a-t-il ajouté, affirmant qu'il partage la même position que Claude Mangin en matière de soutien au peuple sahraoui dans sa lutte pour l'autodétermination. -Rendre la dignité au peuple sahraoui- Pour sa part, le délégué général de l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT), Jean-Etienne de Linarès, a estimé que Naâma Asfari et le groupe des Sahraouis de Gdeim Izik sont le "symbole" du combat du peuple sahraoui, soulignant que l'interdiction par les autorités marocaines du droit de visite aux prisonniers est "la simple preuve de représailles". Manifestant son soutien à la gréviste de la faim, il a affirmé qu'il faut "rendre la dignité au peuple sahraoui qui se bat pacifiquement au moment où d'autres combats se manifestent par des violences", dénonçant le "silence terrifiant" des autorités françaises. Intervenant de son côté, la présidente de l'Association des amis de la République arabe sahraouie démocratique (AARASD), Régine Villemond, a considéré que la grève de la faim de Claude Mangin est un appel à "plus de raison" aux autorités marocaines qui doivent, selon elle, "sortir de plus de 40 ans d'isolement et d'enfermement" sur la question du Sahara occidental. "Il est temps pour le Maroc de se construire autrement que dans la haine", a-t-elle dit. Sur un autre plan, le maire Philippe Bouyssou a indiqué qui s'était rendu mardi au château de Betz (Oise) du roi du Maroc, Mohammed VI, espérant être reçu afin de l'interpeller, a-t-il dit, sur le "désespoir" de Claude Mangin. Une vidéo diffusée dans les réseaux sociaux montre qu'il s'était déplacé au château sans être reçu par le roi et que l'ambassade lui a fait savoir qu'il était reparti au Maroc. Le Maroc, soutenu par la France, interdit depuis des mois des visites aux prisonniers sahraouis détenus dans ses prisons, ainsi que celles des militants des droits de l'Homme. On dénombre au total 350 personnes interdites de se rendre au Maroc. En février dernier, deux avocates, Ingrid Metton et Olfa Ouled, du groupe des 24 militants sahraouis de Gdeim Iziz, détenus au Maroc depuis plus de sept ans, ont été interdites d'entrer au Maroc. Les deux avocates, du barreau de Paris, qui avaient défendu les militants sahraouis lors des audiences de leur procès en appel, entre janvier et mai 2017, à la Cour d'appel de Rabat-Salé, ont voulu rendre visite à leurs clients suite à des informations faisant état des mauvais traitements qu'ils auraient subis en prison, rappelle-t-on. Dix-neuf militants sahraouis, rappelle-t-on encore, ont été lourdement condamné le 19 juillet 2017, au terme de ce procès où les seules preuves présentées restent des aveux signés sous la contrainte. Les prisonniers politiques sahraouis ont été dispersés dans 7 prisons à travers le territoire marocain.