Le Front Polisario "a pris note sans surprise mais avec consternation" de la décision du Conseil de l'Union européenne du 29 novembre 2018 adoptant l'accord de pêche UE/Maroc, qui inclut une extension aux eaux adjacentes au territoire du Sahara occidental occupé, a indiqué le ministre sahraoui délégué pour l'Europe, Mohamed Sidati. "Le principe même de cet accord est inacceptable car il constitue une violation flagrante de la souveraineté. Bien entendu, le Front Polisario conteste les conditions de l'accord, ses modalités et ses contreparties financières, mais il ne s'agit là que des conséquences de la question principale: la violation de la souveraineté sahraouie", a ajouté M. Sidati. Il a rappelé l'évidence que le peuple sahraoui a une histoire qui forge son unité et son indépendance vis-à-vis de quiconque, comme l'a reconnu la Cour Internationale de Justice dès 1975. Le Sahara occidental est inscrit depuis 1962 sur la liste des territoires non autonomes, c'est-à-dire des territoires à décoloniser, et l'ONU a toujours abordé la question sous l'angle du droit international. La réaction du Front Polisario fait suite à la décision du Conseil de l'UE qui a adopté, jeudi, l'accord de pêche conclu en juillet dernier avec le Maroc. Le texte, qui inclut le Sahara occidental, doit encore être validé par le Parlement européen. En février dernier, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) avait pourtant tranché que l'accord UE/Maroc violait le principe de l'autodétermination du Sahara occidental. Dans son arrêt de 2016, la CJUE a rappelé que le Maroc et le Sahara occidental étaient deux territoires distincts et séparés et que le Maroc, qui est puissance militaire occupante, ne peut y exercer aucun acte de souveraineté. Il ne peut y avoir d'activités économiques, commerciales ou autres, sur le territoire qu'avec le consentement du peuple du Sahara occidental. == L'UE devrait négocier directement avec le Front Polisario == Dans ces conditions, l'Union européenne "devait négocier directement avec le Front Polisario, seul représentant du peuple sahraoui, a affirmé M. Sidati, mais, a-t-il déploré, les responsables européens l'ont refusé, et ils cherchent à contourner la décision de la CJUE". Le ministre sahraoui délégué pour l'Europe souligne dans ce sens: "Pour contourner la décision de justice, le Conseil de l'Union européenne et la Commission ont fomenté un processus d'extension d'un accord international sur un autre territoire, sans en avoir le moindre droit, car ce territoire relève exclusivement de la souveraineté du peuple Sahraouie". "Une telle extension, en effet, sans le consentement du peuple du Sahara occidental est nulle de droit. Les pseudos arguments sur les bénéfices pour les populations sont dénués de fondements, dès lors qu'il y a violation de la souveraineté. Seul le peuple sahraoui peut dire ce qui est bon pour lui", a-t-il rétorqué, avant d'assurer que "si le Parlement européen entérine cette atteinte à la souveraineté, le Front Polisario exercera un nouveau recours en annulation devant la juridiction européenne". "C'est une question de principe, pas de modalités. Nous dénonçons vivement les contreparties financières qui vont encore apporter plus de 52 millions d'euros, par an, au Maroc pour financer la colonisation, asseoir son occupation. Il s'agit autant de spoliations du peuple sahraoui, mais ce que nous refusons d'abord c'est cette violation de notre souveraineté. Nos interlocuteurs européens vont devoir apprendre à respecter la souveraineté du peuple de Sahara Occidental et l'intégrité de son territoire", a encore indiqué le responsable sahraoui. "Ne pas vouloir respecter ni faire respecter les décisions de ses propres instances judiciaires est en soi une atteinte aux valeurs fondatrices de l'Union Européenne et à sa crédibilité même", a-t-il poursuivi, soulignant qu'"il existe aujourd'hui de grands efforts, avec la médiation de l'envoyé personnel du Secrétaire General de l'ONU, Horst Koehler, pour parvenir à une solution pacifique au long conflit du Sahara occidental". "Il se trouve que l'UE qui souscrit du bout de lèvres à cette dynamique, s'active fébrilement à imposer des accords avec le Maroc s'étendant illégalement au Sahara occidental occupé. Ce qui est de nature à contrarier le processus de paix mené par les Nations Unies au Sahara occidental", a-t-il conclu.