Le ministre délégué, représentant du Front Polisario pour l'Europe, Mohamed Sidati a appelé mardi l'Union européenne (UE) à des "négociations directes" en vue d'un accord qui permettra aux entreprises européennes d'exercer leur activité au Sahara occidental ou dans les eaux adjacentes dans le respect du droit et la sécurité juridique. "Le Front Polisario a clairement indiqué qu'il était prêt et autorisé à négocier directement avec l'UE et les entreprises européennes un accès légal à nos ressources naturelles", a-t-il écrit dans une lettre adressée à la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini. Pour le ministre sahraoui, l'ouverture de négociations directes constitue, actuellement, "la seule option légale et crédible à court terme pour que l'UE évite d'exposer ses Etats membres et les entreprises européennes à de graves risques juridiques et financiers découlant de leur participation à l'exploitation" des ressources naturelles du Sahara occidental. Mohamed Sidati a réitéré, à ce titre, sa préférence pour "un dialogue constructif et ouvert" avec l'UE en vue de résoudre ces problèmes, exprimant son souhait de trouver en l'UE "un partenaire égal". Selon le ministre sahraoui, les questions commerciales concernant le Sahara occidental ne peuvent être résolues de manière durable que dans le cadre d'un règlement politique global. Il a, à ce propos, mis en garde l'UE contre les conséquences de l'approche qu'elle a adoptée lors de la renégociation de ses accords avec le Maroc, soulignant que son attitude "ne fera que miner les efforts de Horst Kohler (envoyé personnel du SG de l'ONU au Sahara occidental) en vue d'une reprise des négociations directes entre le Front Polisario et le Maroc". Mohamed Sidati a dénoncé le processus de consultation initié par la Commission européenne dans le cadre de la renégociation des accords UE-Maroc afin d'obtenir le consentement du peuple sahraoui, qualifiant sa conduite d'"inconcevable" et ses manoeuvres visant à saper le statut du Front Polisario de "profondément antidémocratique", "moralement répréhensible" et "légalement discutable". Il a démenti, ainsi, les allégations de la Commission européenne sur la participation d'organisations civiles représentant le peuple du Sahara occidental dans les concertations qu'elle mène et qui visent à contourner les arrêts de la justice européenne, soulignant que ce processus n'avait pas été accompli avec les représentants réels du peuple sahraoui. Le ministre sahraoui a appelé, à ce titre, la Commission à publier la liste des organisations civiles consultées dans le cadre de ce processus. -Aucune participation de la société civile sahraouie aux consultations- Il a rappelé également qu'une centaine d'organisations de la société civile sahraouie ont exprimé début février leur "profonde préoccupation" face aux négociations entre l'UE et le Maroc visant à inclure les produits issus du Sahara occidental occupé dans leurs accords commerciaux sans le consentement du peuple sahraoui. Ces organisations avaient condamné une approche de la Commission européenne "destructrice et insoutenable". Mohamed Sidati a souligné, dans ce contexte, que le Front Polisario, reconnu par les Nations unies en tant que représentant légitime du peuple sahraoui, "a démontré sa capacité à contester les accords UE-Maroc lorsque ces accords incluent illégalement le Sahara occidental". "Au nom du Front Polisario, je vous exhorte à soutenir sans équivoque le processus politique de l'ONU, non seulement pour défendre les droits légaux du peuple sahraoui, mais pour un avenir durable pour le Maghreb, bâti sur la stabilité démocratique, la prospérité, et l'Etat de droit", a-t-il ajouté. Il a estimé que l'UE doit reconnaître que l'exploitation illégale et continue des ressources naturelles du Sahara occidental "renforce encore l'occupation illégale de ce territoire par le Maroc, entrave le processus politique et encourage les violations graves des droits de l'Homme des Sahraouis par le Maroc". Dans un arrêt rendu le 27 février dernier, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a jugé que l'accord conclu entre l'UE et le Maroc ne peut en aucun cas s'appliquer au Sahara occidental et dans les eaux adjacentes à celui-ci. Reprenant les principes posés par l'arrêt du 21 décembre 2016, la Cour rappelle que les accords d'association et de libéralisation conclus entre l'UE et le Maroc doivent être interprétés, conformément au droit international, en ce sens qu'ils ne sont pas applicables au territoire et aux eaux du Sahara occidental. Inclure le territoire du Sahara occidental dans le champ d'application d'un accord entre l'UE et le Maroc viole les principes essentiels du droit international, à commencer par le droit à l'autodétermination, selon l'arrêt de la CJUE. Mohamed Sidati a regretté que les Etats membres de l'UE, encore moins la Commission européenne n'ait pris de "mesures sérieuses" pour se conformer aux décisions de la justice européenne. "Rien n'indique que l'UE, ses Etats membres ou leurs sociétés ont l'intention de se retirer des eaux du Sahara occidental ou de demander le consentement du peuple sahraoui" tel que requis par la justice européenne, a-t-il déploré.