Les réseaux sociaux sont devenus, en l'espace de quelques années, une source d'information incontournable pour bon nombre d'Algériens, mais aussi un "terrain propice" pour la pratique politique et un moyen facile de "désinformation et d'intox" au sein de la société, ont estimé des spécialistes. En effet, Facebook, Twitter, Google+ et autre Instagram sont des réseaux sociaux qui se sont imposés comme des sources d'informations de "proximité" et d'"instantanéité" dans le pays, notamment depuis le lancement du très haut débit mobile 3G et 4G ces cinq dernières années, ayant permis de "démocratiser" l'internet, multipliant le nombre d'abonnés pour dépasser les 34,5 millions (données de l'ARPCE pour le téléphone fixe et mobile en 2017). Le très haut débit mobile a, ainsi, boosté l'acquisition de smartphones, qui permettent d'avoir un accès rapide à l'information acheminée par les flux des réseaux sociaux, via des alertes et notifications, au détriment des médias classiques qui ont du mal à se positionner dans cet espace web où sont diffusées toutes sortes d'information difficilement vérifiables. "De plus en plus d'Algériens, notamment les jeunes, utilisent les réseaux sociaux comme Facebook (plus de 17 millions en 2017 selon les chiffres de Facebook) ou Twitter pour se tenir informé, notamment de l'actualité. Néanmoins, ces plateformes web sont particulièrement propices à la diffusion de fausses informations ou fake news (rumeurs, désinformations, etc) avec une facilité déconcertante de partage, les rendant ainsi impossible à maîtriser", explique à l'APS Abderrafiq Khenifsa, spécialiste dans le domaine des TIC. Toutefois, si la prolifération de fausses nouvelles sur les plateformes web est quelque fois due à des erreurs ou incompréhensions, elle est aussi souvent diffusée intentionnellement afin de nuire à autrui, à des institutions ou tout simplement de faire le buzz. En effet, des dizaines voire des centaines d'informations invérifiables, parfois portant atteintes à des personnes, entreprises ou institutions publiques, sont diffusées anonymement et relayées ou partagées par des internautes notamment via Facebook, qui, malgré son règlement qui interdit les déclarations haineuses, menaces crédibles ou attaques directes à un individu ou un groupe, ainsi que les faux profils ou impostures, n'a aucune obligation de transparence et d'objectivité. Derniers en date, des messages attribués à la Sûreté nationale faisant l'apologie de slogans tendancieux ont été largement diffusés sur les réseaux sociaux. Le gouvernement s'est également insurgé contre l'utilisation des réseaux sociaux pour amplifier le phénomène de la Harga (migration clandestine). Le ministre de l'Intérieur, des Collectivités Locales, et de l'aménagement du territoire, Nouredinne Bedoui, a indiqué que "ces moyens de communication, influencent considérablement, les jeunes algériens, à travers de fausses histoires d'espoir, et ce en plus de l'impact des chansons à caractère incitatif, et dont le contenu est fortement dégradant (...)". Des campagnes de désinformation pour électriser le débat En outre, les réseaux sociaux sont devenus un espace "anonyme" où sont relayées, via des comptes suspects, des campagnes de désinformation systématiques visant à "électriser" le débat, notamment à la veille d'élections locales, législatives ou présidentielles. Les comptes anonymes, généralement illustrés d'images et vidéos violentes, relayant de fausses informations, sont largement diffusées sur le Net via Facebook notamment. En Algérie, on observe également ce phénomène de comptes anonymes qui relaient les "fake news" concernant les événements en cours dans le pays, notamment dans le sillage de la présidentielle d'avril prochain. De fausses informations ont circulé cette semaine, faisant état de l'agression de responsables de formations politiques, en l'occurrence les présidents de TAJ, Amar Ghoul, et du MPA, Amara Benyounes, lors de soi-disant meetings en France en soutien au candidat à la présidentielle, Abdelaziz Bouteflika. Ces informations ont été vite démenties par le MPA et TAJ. Face à cette situation, le gouvernement algérien n'a pas tardé à réagir en estimant, d'emblée, que le citoyen est devenu une proie facile aux rumeurs colportées sur les réseaux sociaux, "ce qui pourrait porter atteinte à la stabilité du pays". Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a souligné, lors de la rencontre gouvernement-walis tenue en novembre dernier, l'impératif d'adapter la communication institutionnelle à l'ère des réseaux sociaux, afin de mettre en avant les efforts et les réalisations du gouvernement, tout en les exhortant à "ne pas laisser le terrain à la rumeur et, parfois même, à la manœuvre subversive". Les partis politiques s'approprient les réseaux sociaux Mais pour les partis politiques, qui ont compris l'importance de ces outils pour mobiliser le maximum de militants et citoyens notamment en prévision de l'élection présidentielle d'avril prochain, les réseaux sociaux constituent une véritable opportunité et un espace de proximité pour poster leurs discours, programmes politiques et activités du parti. La majeure partie des formations politiques s'est, en effet, appropriée ces outils, qu'elle considère comme source de communication et d'information, au même titre que les médias lourds (TV et journaux). Ces partis politiques s'inquiètent désormais tout autant du nombre de participants à un meeting que du nombre de visites de la page Facebook de leur candidat. Plusieurs partis ont, ainsi, tenu à marquer leur présence virtuelle sur les réseaux sociaux en particulier, Facebook, à travers la publication de meetings populaires et autres agendas politiques, illustrés de photos et spots vidéo. Des spécialistes dans les TIC estiment qu'avec Internet, les réseaux sociaux sont devenus un terrain propice à la pratique politique, offrant aux partis "plus de liberté d'expression". Selon eux, les plateformes, telles que Facebook et Twitter, permettent de toucher le grand public et de gagner plus de sympathisants, mais parfois ces mêmes réseaux deviennent des armes à double tranchant.