Les travaux du colloque sur "le Sahara occidental – Actualités d'une question ancienne", ouverts lundi à Amiens, ont été axés mardi sur la population du Sahara occidental avec un focus sur le problème de la nationalité d'un peuple en lutte pour son indépendance. Les intervenants qui se sont succédé ont mis l'accent notamment sur la particularité d'un peuple, qui a toujours refusé la colonisation, avec son organisation sociale et ses mouvements dans les territoires occupés par le Maroc, dans les territoires libérés, dans les camps de réfugiés ou en exil, affirmant son attachement à un territoire qui lui reste interdit. L'historien Francesco Correale, (CNRS) a montré, en plongeant l'assistance dans l'histoire du Sahara occidental, que ce sont les habitants de ce territoire qui se sont faits appelés "Sahraouis", rappelant que déjà la lutte contre l'occupant espagnol est une preuve de cette aspiration distincte à un Etat indépendant. La notion de "nationalité" sahraouie a constitué un point très débattu lors de la première séance matinale, autour de laquelle Hélène Raspail, maître de conférences en droit public, a tenté d'expliquer la difficulté et l'ambiguïté de ce statut pour une population, dont son Etat, la République arabe sahraouie démocratique (RASD) n'est pas reconnue notamment par des pays occidentaux. L'Algérie délivre des laisser-passer aux Sahraouis des camps de réfugiés, "à titre humanitaire, mais cela ne veut pas dire que les Sahraouis jouissent de la nationalité algérienne", a-t-elle indiqué, ajoutant que dans les territoires occupés "les Sahraouis sont considérés Marocains", alors que les demandeurs d'asile en Europe "sont considérés comme des apatrides". Elle a précisé que la France considère le Maroc comme le pays de réadmission des Sahraouis réfugiés ou en asile, alors que dans l'assistance on a évoqué le droit international qui stipule que le Maroc et le Sahara occidental sont "deux territoires distincts". D'autres ont même cité, à titre de comparaison, le cas du conflit israélo-palestinien en matière de jurisprudence, soulignant qu'en aucun Israël est considérée comme un pays de réadmission pour les Palestiniens. Pour sa part, la maître de conférence en anthropologie de l'Université de Sussex (Angleterre), Alice Wilson, a indiqué que les changements qui se sont opérés au sein de la société sahraouie (la sédentarité, la séparation, l'exil, la diaspora) n'ont pas éloigné les Sahraouis de leur attachement à leur territoire et au principe de l'autodétermination. Sébastien Boulay, maître de conférence en anthropologie, a abondé dans le même sens en faisant remarquer que les réseaux sociaux et l'ère numérique ont réinventé l'attachement des Sahraouis à leur pays. La représentante de l'ONG Oxfam et ancienne chargée de plaidoyer humanitaire dans les camps de Tindouf, Virginie Mura, s'est penchée, quant à elle, à la situation humanitaire des réfugiés qui connaît, selon elle, des problèmes de financement en raison du statu quo qui dure depuis plus de 40 ans. "L'aide humanitaire n'est pas attractive. C'est une situation délicate", a-t-elle souligné, expliquant que "ce qui manque c'est une évolution politique et le statu quo aggrave la situation".