L'expert pétrolier, Mourad Preure, a proposé jeudi aux membres de la commission des Affaires économiques, du développement, de l'industrie, du commerce et de la planification à l'Assemblée populaire nationale (APN), l'introduction de mesures au projet de loi sur les hydrocarbures à même de protéger les intérêts des générations futures et leurs parts des recettes pétrolières. Lors de cette séance présidée par Khadidja Righi, présidente de la commission, en présence du président du groupe de travail chargé de l'élaboration du projet de loi, Toufik Hakar et de l'expert en énergie, Mehmah Bouziene, dans le cadre d'une série de réunions consacrées à l'examen de ce texte, M. Preure a plaidé pour la nécessité d'inclure des mesures devant assurer une part des exportations de pétrole au profit des générations futures, à l'instar de ce qui est en vigueur en Norvège. "Il est impératif d'évoquer clairement, dans le cadre du projet de loi, les intérêts des générations futures, à l'instar de ce qui est en vigueur dans plusieurs pays producteurs de pétrole et de gaz dont la Norvège, lesquels placent les recettes de leurs exportations d'énergie dans un fond souverain et recourent à l'hydroélectricité en vue de préserver leurs ressources énergétiques", a fait savoir M. Preure devant les membres de la commission. Concernant son avis sur le projet de loi, l'expert pétrolier a exprimé son soutien à la vision et au "réalisme fiscal" du texte de loi qui se réfère aux principes de la loi sur les hydrocarbures de 1986 quant au partage de la production entre Sonatrach et ses partenaires d'une manière permettant à cette société nationale stratégique de s'acquitter de ses missions de manière efficace. M.Preure a déploré "toutes les années perdues par l'Algérie dans le domaine de l'exploration en raison des mauvais amendements législatifs introduits depuis 2005", et ce, a-t-il dit, en dépit du fait que la loi 86-14 préservait la souveraineté nationale et assurait le partage de la production entre les partenaires, permettant, même, d'attirer les plus grandes sociétés pétrolières en Algérie entre 1986 et 2005. Les modifications introduites à cette loi durant les années 2005, 2006 et 2013 ont eu des incidences négatives sur l'image de l'Algérie et fait fuir les sociétés étrangères de l'activité d'exploration en Algérie, tout en limitant les capacités de Sonatrach en matière d'exploration et de production", a-t-il poursuivi. Etant donné que la force pétrolière et gazière de l'Algérie réside dans "celle de Sonatrach", il est impératif de consolider cette société avec tous les moyens, a-t-il souligné. L'expert pétrolier a appelé, dans ce sens, les membres de la commission à suggérer des mesures supplémentaires à même de renforcer le rôle de Sonatrach dans l'économie nationale, pour devenir, ainsi, la locomotive de la recherche scientifique, des universités et des sociétés nationales. Par ailleurs, M. Preure a évoqué la situation de l'industrie pétrolière mondiale qui traverse une profonde crise en raison de la baisse des investissements et du recul des prix. "Le problème aujourd'hui est sérieux et il fallait le résoudre rapidement notamment dans le cadre des conditions politiques compliquées et d'un marché national caractérisé par une grande hausse de la consommation nationale en raison d'un modèle de consommation irrationnel", a-t-il dit. En outre, l'expert a mis en garde contre "la concurrence féroce" à laquelle font face les exportations du gaz algérien au niveau du marché européen et l'existence de concurrents puissants tels que le Qatar, la Russie, Chypre, l'Egypte, ainsi que le Mozambique et la Tanzanie prochainement. "Notre situation gazière est très inconfortable et notre potentiel de production n'est pas assez suffisant pour défendre nos parts de marché européen au moment où notre demande interne est en forte hausse", a ajouté M. Preure. Concernant la révision des prix de l'énergie, attendue à moyen terme, l'expert a souligné l'inutilité de comparaitre ces prix avec ceux en vigueur dans le monde sans tenir compte de l'écart des salaires et du pouvoir d'achat dans ces pays. Il a proposé l'adoption du projet de loi sur les hydrocarbures par une loi-cadre sur la mutation énergétique en Algérie. Récemment, le ministre de l'Energie, Mohamed Arkab avait affirmé que près de 60% des réserves primaires en hydrocarbures étaient épuisées, en raison de la hausse de la consommation locale et de l'exportation. Les recettes des hydrocarbures du pays ont reculé à 24,6 milliards USD en septembre 2019 contre 29 milliards USD durant la même période en 2018, soit une baisse de 16 %. Les cours du pétrole algérien ont reculé à 65 USD/baril durant cette période contre 72 USD/baril durant la même période de l'année dernière.